(Paris) La France renforce la riposte au coronavirus et la mobilisation des personnels de santé en estimant que le pire de l’épidémie, qui touche désormais le gouvernement, est encore à venir.

« Nous sommes au tout début de cette épidémie », a insisté Emmanuel Macron qui s’est rendu mardi au centre d’appel (15) du Samu de l’hôpital parisien Necker-Enfants malades, qui reçoit environ 6000 appels par jour, le double qu’en temps normal.  

« Nous avons anticipé, nous sommes préparés », a-t-il voulu rassurer.

Pour le ministère de la Santé, la France est toujours au « stade 2 » de l’alerte, renforcé dans « certains départements où le virus circule et progresse avec beaucoup d’intensité ».

Selon le dernier bilan des autorités, trente personnes sont décédées et 1606 au total ont été contaminées par le nouveau coronavirus en France, troisième pays européen en termes de décès derrière l’Italie et l’Espagne.  

PHOTO POOL, REUETRS

Le président français Emmanuel Macron (à d.) s’est adressé aux médias au sujet du coronavirus COVID-19 en présence des premiers répondants du Service d’aide médicale d’urgence (SAMU) à l’hôpital Necker de Paris ce matin.

Le chef de l’État a annoncé la mobilisation de la « réserve sanitaire », composé des personnels de santé éventuellement en retraite ou vacants, « y compris des étudiants en médecine ».

Par un communiqué de leurs Ordres respectifs, qui font valoir « un contexte de forte tension pour le système de santé », médecins et infirmiers sont également conviés à rejoindre la réserve sanitaire pour lutter contre l’épidémie.

Sont concernés les professionnels en retraite depuis moins de cinq ans ou disponibles suite à une cessation d’activité.

sommet de l’État

Progressivement le virus se rapproche du sommet de l’État avec un ministre contaminé (Franck Riester, Culture) et confiné chez lui et une autre, fébrile (Nicole Belloubet, Justice), dont les tests sont en cours.  

L’Élysée a d’ailleurs nettement renforcé les mesures de protection autour du Président et de ses collaborateurs, en limitant visites et réunions. Son directeur de cabinet, Patrick Strzoda, a été prié de télétravailler, car il a été au contact d’un cas positif la semaine dernière.

La hantise des autorités est d’éviter une situation d’engorgement à l’italienne, où les hôpitaux débordés contraignent les médecins à des choix douloureux entre les malades, selon leur âge.

« Nous anticipons, nous adaptons, nous regardons ce qui se passe à l’étranger, nous consultons énormément les experts », a garanti le ministre de la Santé Olivier Véran sur Franceinfo.

Quelque 150 hôpitaux sont mobilisés, prêts à activer leur « plan blanc ».

Environ 1000 tests de dépistage du coronavirus sont pratiqués chaque jour, précise le ministère. Pour augmenter les capacités, le gouvernement a autorisé par arrêté, dimanche, les laboratoires de ville à tester les patients suspectés.  

Le syndicat des biologistes a d’ailleurs réclamé aux autorités des « masques de protection FFP2, mais aussi des masques chirurgicaux indispensables pour prendre en charge les patients à risque » et qui font défaut aux établissements.

Pour freiner au maximum la propagation du virus, outre la fermeture des écoles dans les régions les plus touchées, tous les rassemblements de plus de 1000 personnes sont interdits en France, en plein air comme en milieu clos. Cette interdiction court jusqu’au 15 avril, selon l’arrêté paru au Journal officiel.  

matchs L1 et L2 à huis clos

A l’image du match de Ligue des champions PSG-Dortmund, mercredi soir, quelque 450 manifestations sportives de niveau national - y compris les matchs de Ligue 1 et 2 et ceux de l’équipe de France - et près de 2 millions de spectateurs sont touchés par ces mesures, a précisé la ministre des Sports Roxana Maracineanu.

Les modalités du huis clos seront définies mercredi.

Face à la propagation de l’épidémie en Europe, où les 27 pays membres de l’UE sont touchés, les dirigeants européens tenaient mardi un sommet d’urgence par visioconférence pour tenter de « mieux coordonner » la réponse de l’Union sous l’égide du président du Conseil européen Charles Michel.

La cheffe de l’exécutif européen, Ursula von der Leyen a demandé à ses équipes d’examiner les outils que la Commission peut mobiliser face à la crise, alors que « de nombreux secteurs en souffrent déjà ».

La France attend de cette réunion « un signal au plus haut niveau de coordination » et de « solidarité », a-t-elle prévenu.

A l’approche des municipales, que le gouvernement exclut de reporter, plusieurs personnalités exhortent les Français à ne pas bouder les isoloirs, « pas plus dangereux » que le supermarché fait valoir le ministre de la Santé.

Le ministère de l’Intérieur s’emploie à faciliter la délivrance de procurations pour les personnes vulnérables ou confinées, en particulier dans les Ehpad : elles peuvent déjà demander à un officier de police de se déplacer pour recueillir leurs demandes de procurations.

Mais dans les localités particulièrement frappées par le virus, comme à La Balme en Haute-Savoie, l’un des premiers foyers de contamination en France, les commerçants subissent de plein fouet les conséquences de l’épidémie sur leur activité.

« On n’a que des annulations. Il n’y a pas un chat », soupire la gérante d’un hôtel qui a mis son personnel au chômage technique. Le boucher a perdu « 40 % de chiffre d’affaires sur une semaine » confie-t-il, la coiffeuse, 60 %.

Après une embellie à l’ouverture, au lendemain de la pire débâcle depuis 2008, plusieurs Bourses européennes dont Paris, Francfort, Madrid ou Milan ont terminé de nouveau en négatif mardi soir.