La vie est courte et même un chroniqueur alerte manque de temps pour rendre hommage à toutes les choses qui font de la politique un irremplaçable laboratoire d’observation de la nature humaine.
Voici donc, dans un pur esprit de bienveillance, un gala qui célèbre le meilleur du pire de la politique québécoise.
Prix Messmer
Benoit Charette
Quand Benoit Charette parle, on a envie de se faire verser une chaudière d’eau froide au visage. Le sympathique ministre de l’Environnement répète sans émotion que tout va bien, jusqu’à l’évanouissement de chaque humain dans la salle. Enfin, de presque tout le monde. La commissaire au développement durable a relevé que la « quasi-totalité » du plan vert ne contenait pas d’indicateurs ni de cibles. M. Charette a prétendu qu’elle s’était mêlée dans les dates. Pas vraiment, a répondu en substance la commissaire. Voilà un être immunisé contre l’hypnose.
Prix Santé et sécurité au travail
Claire Samson
Le budget est présenté à huis clos. Interdit d’utiliser l’internet ou son cellulaire, ou même de quitter la salle. Les députés peuvent toutefois fumer dehors sous escorte policière. Tout le monde accepte les règles, sauf Claire Samson. La sécurité est appelée à cause d’une odeur de cigarette dans la salle... La transfuge conservatrice nie être responsable. Peu après, elle est furieuse de ne pas pouvoir retourner à l’Assemblée au milieu du huis clos. De nombreux policiers l’entourent. Pendant ce temps, les autres politiciens et journalistes lisent studieusement le budget.
De son propre aveu, Mme Samson travaillait plus fort quand elle était serveuse chez Da Giovanni. Étrangement, elle semble penser que c’est la faute des autres.
Prix Centre d’amitié autochtone
Pierre Dufour
Là-dessus, le jury n’a pas délibéré longtemps. Pierre Dufour, ministre des Forêts, de la Faune et des Parcs, remporte la statuette. Il a eu l’audacieuse idée de rejeter sur les Innus la responsabilité de la disparition du caribou. Le lendemain, un journal titrait : « Le ministre s’en prend aux Autochtones », ce qui est toujours la preuve d’un plan de communication réussi…
À sa décharge, le ministre pourrait dire qu’il adopte la même démarche avec les caribous. Pas de discrimination, tout le monde est attaqué avec une égale finesse.
Prix Virage numérique
Sonia LeBel
La ministre des Affaires intergouvernementales, Sonia LeBel, ne recule devant rien pour formuler des demandes au fédéral par textos, essuyer un refus, puis effacer le message.
En bonne émule d’Hillary Clinton, elle assure qu’elle n’a rien à cacher. En effet, elle n’a pas de victoire à montrer… Prochaine étape : envoyer un pigeon voyageur à Ottawa. Il pourrait porter sa vision du fédéralisme : l’important, c’est de participer.
Prix Joueur d’équipe
Catherine Dorion
Catherine Dorion porte mal son nom de députée solidaire. Vendredi, elle a quitté le parlement sans écouter les adieux des autres députés. Elle dit que l’Assemblée nationale est « passée date » et que peu importent les interventions des solidaires, les caquistes « font pas mal ce qu’ils veulent ». Elle n’a même pas mentionné les gains obtenus par son parti, notamment sur le prix des loyers. Un timide appui à ses collègues qui solliciteront un nouveau mandat… À quoi bon voter pour eux s’ils ne servent à rien ?
Prix Drôle de vidéo
Marc Tanguay
Québec solidaire voulait abolir le serment à la reine. La CAQ a demandé un vote pour laisser les libéraux défendre la monarchie britannique. Comment dire ? Cette mésaventure fait penser à une cassette VHS envoyée à la défunte émission Drôle de vidéo. Le jeune Sol Zanetti y brandirait son râteau, à l’assaut de l’épouvantail de la reine. Son copain Simon Jolin-Barrette lui suggère de le déposer par terre, puis appelle l’ami Marc Tanguay en agitant un chiffon rouge. Furieux, Marc fonce et se mange le râteau dans les gencives. Ce serait drôle si ce n’était pas si prévisible.
Prix Adéquiste de l’année
Éric Caire
Le maire de Québec « pollue l’existence des automobilistes » avec son tramway, dénonçait en mars M. Caire. Le député de La Peltrie a une définition bien personnelle de la pollution. Pour lui, les gaz à effet de serre, c’est bien. Les cyclistes, marcheurs et autres communistes qui refusent de faire rouler l’économie en se déplaçant, c’est mal. Comme si la science, c’était relatif, et que la pollution était une affaire de ressenti…
À une autre époque, les militants adéquistes auraient applaudi. Malheureusement pour M. Caire, ils sont passés au Parti conservateur.
Prix Popcorn
Lucien Bouchard et le PQ
Il est toujours triste de voir des gens se battre à des funérailles. M. Bouchard et son parti ont offert un spécial « 2 pour 1 » ce printemps. C’est au pied de la toute nouvelle statue de Jacques Parizeau, en ce début du centenaire de René Lévesque, qu’il a cru bon de régler une fois de plus ses comptes avec son ancienne formation. Le Parti québécois est selon lui un « véhicule usé » qui « ne mérite pas de très bien aller » et dont les gens « ne veulent plus ».
« Plus de beurre », aurait réagi François Legault en dégustant son popcorn.
Prix Badaboum
Eric Girard
Un bon gestionnaire sait établir ses priorités. C’est ainsi qu’Eric Girard a pris l’avion en direction de New York pour baiser la bague de Gary Bettman. Pendant que le Napoléon de la LNH terminait ses mots croisés, M. Girard le suppliait de ramener un club de hockey à Québec. Selon mes infos, M. Bettman l’aurait félicité pour sa promotion comme ministre responsable de l’hypothétique éventuel retour espéré mais peu probable des Nordiques. Accessoirement, M. Girard est encore à la tête des Finances de la nation.
Prix 911/Au secours
Dominique Anglade
Comme disait le regretté Gerry : « Ayoye ». Dominique Anglade a commencé le débat sur la langue avec un plan de 27 propositions à saveur nationaliste. Les cours en français dans les cégeps anglophones, c’était l’idée de son parti. Elle termine la session en manifestant avec ceux qui trouvent que la loi va trop loin. Elle appuie maintenant ceux qui dénoncent la suggestion qui émane de son parti. Aucun véhicule n’est conçu pour reculer à une telle vitesse.
Prix Bébé de l’année
Gabriel Nadeau-Dubois
Le co-porte-parole de Québec solidaire veut chasser son image de carré rouge. Il soigne ses habits et parle avec calme. Et surtout, il ne se prive pas de rappeler qu’il est désormais papa. Comment ne pas faire confiance à un jeune père qui porte un des fragiles espoirs du Québec dans ses bras ? Son bébé apparaît ainsi sur Instagram, sur les photos officielles du parti et ailleurs sur les réseaux sociaux. Il ne manque que le 7 Jours.
Prix Hail Mary
Paul St-Pierre Plamondon
Au football, un Hail Mary est une longue passe en fin de match, envoyée comme une prière en espérant qu’un receveur accomplira un miracle. C’est un peu ce que le chef péquiste a fait en proposant de plafonner le prix de l’essence, même si c’est une mesure à la fois inapplicable et antiécologique. Mais ne le blâmons pas trop. Ses plans sur la santé et les soins à domicile, pourtant sérieux, ont à peine été couverts par les médias. Il attire l’attention comme il peut.
Prix d’urbanisme Frédéric-Back
François Bonnardel
François Bonnardel est l’homme qui plantait des autoroutes autour desquelles il y avait un arbre, en théorie, sur la version initiale de la maquette du projet. À ses yeux, la densification urbaine est « une mode ». Il préfère distribuer des bouts d’asphalte aux électeurs. Un style des années 1940 qui ne se démode pas.
Prix Patriote de l’année
André Fortin
Vous êtes au PLQ. Les francophones désertent votre radeau. Votre cheffe effectue un virage nationaliste désespéré. Comment l’aidez-vous ? Si vous êtes André Fortin, la réponse est : en faisant un peu de bénévolat durant l’été pour la campagne électorale de Justin Trudeau, même s’il s’ingère dans les compétences du Québec et même s’il refuse de hausser les transferts en santé. Et, surtout, sans prévenir votre patronne, Dominique Anglade. Voilà un authentique patriote.
Prix Malentendant
Jonatan Julien
Rarement un projet de loi a été aussi unanimement dénoncé. Pendant des mois, le ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles s’est fait dire de ne pas assouplir le contrôle des tarifs d’électricité. Il s’est entêté à les arrimer à l’inflation. Sa malheureuse loi a été votée sous bâillon. Ce qui devait arriver arriva. Il termine la session avec un autre projet de loi pour corriger son erreur. Faute de temps, il ne sera pas adopté.