« L’impact de la pandémie a été énorme sur nos jeunes. Est-ce qu’on pourrait ENFIN prendre les mesures nécessaires pour que lors de la prochaine année scolaire, on ne se retrouve pas dans un scénario d’infections à répétition ? »

La question est posée par la Dre Marie-Michelle Bellon, qui porte deux casquettes.

La première : celle d’une mère qui a vu ses propres enfants, pleinement vaccinés et très respectueux des consignes sanitaires, ramener la COVID-19 de l’école deux fois plutôt qu’une en moins de six mois et qui s’inquiète de l’effet à long terme pour leur santé physique et mentale.

La seconde : celle de la médecin interniste, qui a travaillé en zone COVID, coordonnatrice médicale du collectif COVID-STOP, qui presse le gouvernement de profiter de l’été pour faire des cours de rattrapage en vue d’une rentrée bien ventilée.

Des dizaines de milliers d’élèves ont dû s’absenter en raison de la COVID-19 au cours des derniers mois. Des pics d’absentéisme ont été notés en janvier lors de la vague Omicron (65 000 absents) ainsi qu’en avril (31 000 absents). Mais il n’est pas nécessaire d’attendre une nouvelle vague pour en tirer des leçons.

« Il faut ajouter des outils à notre arsenal. Et l’outil qui serait le plus efficace en milieu scolaire, c’est l’amélioration de la ventilation. »

Une ventilation adéquate permet de réduire jusqu’à 82 % le nombre d’infections dans les classes, souligne la Dre Bellon, en citant une étude italienne1.

Comme le note l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), le risque de transmission par aérosols augmente dans des espaces restreints, mal ventilés, à forte densité et lorsque la durée d’exposition dépasse 15 minutes2.

« Ça correspond exactement à la situation dans laquelle sont placés nos enfants à l’école. On a l’été devant nous et on a l’impression qu’il n’y a aucun chantier qui est lancé. Pourrait-on enfin prendre les mesures pour réduire l’incidence des réinfections à partir de l’automne ? », demande la Dre Bellon.

Au cabinet du ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, on me dit que des chantiers sont déjà prévus cet été pour améliorer la ventilation dans les écoles, qu’on y consacre des sommes importantes et que tout est fait dans les règles de la science.

Mais la députée libérale Marwah Rizqy, qui talonne le gouvernement depuis près de deux ans à ce sujet et qui a déposé le mois dernier un projet de loi sur la qualité de l’air dans les écoles accueilli dans l’indifférence, est pour le moins sceptique quant aux normes qui guideront ces travaux3. Quiconque ayant suivi de près la piètre gestion de cet enjeu par le ministre Roberge, le cafouillage autour des protocoles de tests de CO2 bidon et l’inquiétant mélange « Santé publique-Santé politique » sait qu’il y a bien des raisons de l’être.

En bonne députée studieuse, Marwah Rizqy a lu des études et consulté de nombreux experts avant de déposer le projet de loi 995, qui vise à assurer la santé et la sécurité des élèves en encadrant la qualité de l’air ambiant. « Pour tirer des leçons de la pandémie, s’il y a une chose que j’ai retenue, c’est l’importance de la qualité de l’air. Quand on comprend que le virus se transmet principalement par aérosols, si on se donne de vraies normes, au moins on aura appris quelque chose. »

François Legault a déjà qualifié d’« obsédés » de la ventilation les députés de l’opposition qui s’intéressent à cet enjeu. Marwah Rizqy n’hésite pas de son côté à qualifier le ministre Jean-François Roberge ainsi que son gouvernement de « ventilosceptiques ».

Je ne crois pas qu’ils ont saisi, malgré les études que j’ai déposées en Chambre, que le virus se transmet principalement par aérosols.

La députée libérale Marwah Rizqy

La physicienne Nancy Delagrave, conseillère scientifique de COVID-STOP, qui a contribué à l’élaboration du projet de loi 995, est préoccupée par le décalage entre ce que dit la science et les efforts de prévention avancés par le gouvernement Legault.

Un exemple ? Selon une étude récente, pour mille infections par aérosols, il y en a à peine une par surface contaminée4. « Mais il n’y a pas eu de campagne sur la ventilation. Quand on en parle, c’est toujours du bout des lèvres. » L’air ambiant est pourtant le plus grand facteur de risque.

Au début de la pandémie, on avait l’excuse de devoir « construire l’avion en plein vol », comme le veut l’expression consacrée. Mais plus de deux ans plus tard, l’avion a eu le temps d’atterrir. Et les passagers épuisés qui ont enduré leur lot de turbulences ne souhaitent qu’une chose : que l’on fasse les ajustements qui s’imposent avant le décollage de la rentrée.

1. Consultez l’étude (en anglais) 2. Consultez les recommandations de l’INSPQ 3. Lisez le projet de loi 995 4. Consultez un article sur l’étude (en anglais)