Près de 90 % de la population de martinets ramoneurs a disparu depuis les années 1970 au Canada. Pour éviter que leurs petits nids établis dans des cheminées ne soient détruits par mégarde, le Zoo de Granby et des organismes de conservation sensibilisent les services de ramonage.

Début mars, deux entreprises de ramonage actives dans la région de Granby ont participé à un atelier du Zoo.

« On essaie d’aller chercher leur expertise en tant que spécialistes de la cheminée et d’ajouter un volet sensibilisation à leur travail, parce que souvent, ils ne connaissent pas l’oiseau, qui est brun et ressemble à tous les autres », explique la biologiste Audrey Maynard, chargée de projet en conservation au Zoo de Granby.

Cet oiseau migrateur, qui revient au Québec entre la fin d’avril et le début de juin, est reconnaissable à ses ailes arquées en forme de boomerang, et à sa courte queue.

Les cheminées prisées

Si l’espèce nichait autrefois dans des arbres creux, elle a depuis longtemps adopté les cheminées des maisons et des grands bâtiments. La cheminée doit offrir un matériau rugueux (brique, pierre, béton, etc.) et être assez spacieuse (ouverture d’au moins 28,5 centimètres en diagonale, ou largeur extérieure de 45 cm).

PHOTO FOURNIE PAR LE ZOO DE GRANBY

Un nid de martinets ramoneurs

Or, beaucoup de ces cheminées industrielles, institutionnelles ou résidentielles ont été détruites ou recouvertes d’un chapeau ou d’un grillage. Moins de mille sont actuellement répertoriées comme étant utilisées par le martinet ramoneur dans l’ensemble de la province, indique l’organisme Québec Oiseaux. Les martinets revenant généralement nicher dans les mêmes cheminées, il est important d’en préserver l’accès.

La formation du Zoo est « un outil extraordinaire pour savoir comment ils font là leur nid et comment le reconnaître : on en a touché un dans nos mains, c’est exceptionnel », s’enthousiasme Julien Labonté, franchisé de Ramonage 4 Saisons à Saint-Jean-sur-Richelieu.

PHOTO FOURNIE PAR CONNEXION NATURE

Cette plaque est remise à des propriétaires de la région de biosphère du mont Saint-Hilaire, dont la cheminée est utilisée par des martinets ramoneurs et qui ont pris l’engagement moral de protéger l’oiseau et son habitat.

« Le martinet ramoneur, c’est notre petit cousin quasiment familial », illustre Clara Toscani, copropriétaire de Ramonage Jovan à Cowansville. « On ne peut pas faire autrement que de l’aider, ça va nous faire plaisir ! »

Lorsqu’une cheminée est utilisée par des martinets, il ne faut pas y faire de ramonage ni de travaux entre le 1er mai et le 1er septembre, afin de ne pas nuire à la nidification.

Si les ramoneurs en repèrent une sur le territoire de la MRC de la Haute-Yamaska (qui inclut Granby), ils sont invités à contacter le Zoo, qui ira rencontrer les propriétaires.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Audrey Maynard, biologiste, chargée de projet en conservation au Zoo de Granby, devant la fausse cheminée qui a été construite pour abriter des nids de martinets ramoneurs au parc de la Tannerie, à Granby

Au début, ça fait peur parce que les gens n’aiment pas beaucoup apprendre qu’ils ont des animaux dans leur cheminée. Mais quand on leur explique, qu’on leur montre un vrai nid et des photos, ils sont émerveillés par le petit oiseau.

Audrey Maynard, chargée de projet en conservation au Zoo de Granby

Répertorier les cheminées

C’est ce qui est arrivé à Anne-Marie Turenne-Fouquet, une résidante de Granby, qui était à la maison avec ses enfants lorsque Mme Maynard est passée chez elle durant la semaine de relâche. Dans son cas, c’est un bénévole qui avait vu des martinets autour de sa cheminée l’été précédent. En ouvrant une trappe d’accès, ils ont trouvé le nid, tombé à la fin de la saison. Les enfants « étaient tout excités de voir que c’était vrai », raconte Mme Turenne-Fouquet. Les nids, minuscules, ne posent pas de risque pour la cheminée. « Donc nous, on n’a rien à changer, nous sommes seulement des hôtes pour les oiseaux. »

PHOTO FOURNIE PAR LE ZOO DE GRANBY

Anne-Marie Turenne-Fouquet (à gauche) et ses deux enfants avec le nid de martinets ramoneurs découvert dans leur cheminée lors de la visite d’Audrey Maynard, chargée de projet en conservation au Zoo de Granby.

Le Zoo de Granby n’est pas seul. L’organisme Connexion Nature et la Ville de Mont-Saint-Hilaire ont déjà répertorié une trentaine de cheminées dans leur région, et Connexion Nature veut former des ramoneurs pour en repérer davantage. « On a fait des demandes de financement et on est en attente de réponses. Ce seraient quatre entreprises, un potentiel de 300 à 400 cheminées », indique la responsable de l’engagement des communautés, Geneviève Poirier-Ghys.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Un nid de martinets ramoneurs

Québec Oiseaux, qui a fait de la sensibilisation auprès des ramoneurs dans le passé, a publié plusieurs fiches d’information sur son site. Et l’Association des professionnels du chauffage (APC), qui compte 260 entreprises membres au Québec, a souvent rappelé l’importance de préserver l’espèce. Cette année, l’APC poussera la sensibilisation plus loin en invitant une spécialiste du Zoo à son congrès, à la mi-mai. « On lui offre un kiosque, gratuitement parce qu’on croit à la cause, pour qu’elle puisse répondre à toutes les questions, puis peut-être donner une petite formation », indique la directrice générale de l’association, Marie-Claude Bouchard.

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Les martinets de Martinville

PHOTO FOURNIE PAR LE ZOO DE GRANBY

La cheminée de l’église de Martinville, utilisée par des martinets ramoneurs durant la saison de nidification

Le village de Martinville, à une heure quinze en voiture à l’est de Granby, a préservé son ancienne église en y aménageant des espaces de loisir. La cheminée, toutefois, inquiétait les assureurs, qui pressaient la municipalité de la démolir. Un entrepreneur s’apprêtait à le faire l’été dernier lorsqu’un bénévole a aperçu des martinets ramoneurs. Réparer la cheminée coûtera cependant près de 70 000 $, beaucoup plus que les 20 000 $ prévus pour la démolir. Pour un village de moins de 500 habitants, c’est énorme. Le Zoo de Granby a donc décidé d’appuyer le projet en demandant des subventions auprès de Québec et de divers organismes de conservation. Et Martinville, qui avait déjà prévu aménager une halte-paysage associée à un oiseau aux abords du village, a tout naturellement choisi le martinet comme emblème. « Tout est relié, c’est spécial ! On était vraiment contents », dit la directrice générale de la municipalité, Julie Létourneau.

Regardez des martinets voleter à l’intérieur de la fausse cheminée construite à Granby :

Consultez la page Facebook du Zoo de Granby

Découvrez le martinet ramoneur :

Consultez le site de Québec oiseaux Consultez le site de la Ville de Mont-Saint-Hilaire Consultez le site du gouvernement du Canada Consultez le site de Connexion nature