Contrairement à son confrère qui vient de claquer la porte, la coprésidente du comité scientifique sur les pesticides de Santé Canada – la Québécoise Valérie Langlois – compte poursuivre son mandat dans l’espoir d’améliorer les choses.

« Je vois un peu de positif, donc moi, je reste », a expliqué en entrevue avec La Presse la professeure titulaire de l’Institut national de la recherche scientifique du Québec.

« Faux sentiment de sécurité », « système réglementaire obsolète », « transparence obstruée » : le DBruce Lanphear a récemment claqué la porte du Comité consultatif scientifique sur les produits antiparasitaires de Santé Canada en critiquant sévèrement son Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA). Cette agence encadre l’approbation et l’usage de ces produits chimiques au pays.

« Chaque fois que je les rencontre, je leur dis : “Est-ce que vous me niaisez ? Est-ce que je suis une marionnette ? Est-ce que vous nous utilisez” ? Moi, je ne veux pas faire ça, et chaque fois [ils répondent] : “Non, Valérie, Bruce, vous êtes extrêmement importants. L’ARLA commence une transformation qu’elle n’a jamais vue et on a besoin de gens qui sont indépendants et qui vont nous aider à y arriver.” Parce que quand c’est juste la même mentalité, on en vient à refaire la même chose. Ils n’arrêtent pas de me le dire, donc je dis : “OK, je vais vous faire confiance.” »

« Du jamais vu »

Bruce Lanphear, professeur de santé environnementale des enfants à l’Université Simon Fraser, Colombie-Britannique, et Valérie Langlois ont été nommés à la tête du Comité consultatif scientifique sur les produits antiparasitaires de Santé Canada en juin 2022. Leur mandat était d’une durée de trois ans.

Ce comité de neuf experts indépendants a été créé dans la foulée d’une vive controverse qui a fait les manchettes en 2021. L’ARLA proposait alors de hausser la limite maximale de résidus de pesticides pour certains aliments.

« Je m’inquiète que le comité consultatif scientifique – et mon rôle de coprésident – ne donne un faux sentiment de sécurité, à savoir que l’ARLA protège les Canadiens contre les pesticides toxiques », écrit M. Lanphear dans sa lettre de démission.

Valérie Langlois, qui est également titulaire de la Chaire de recherche du Canada en écotoxicogénomique et perturbation endocrinienne, souligne qu’elle « respecte » son collègue.

Elle voit toutefois d’un bon œil le fait que les réunions de son comité sont publiques. « C’est du jamais vu à l’ARLA », souligne-t-elle.

« Quand j’ai commencé, et ça fait longtemps que je suis dans le domaine, on ne pouvait même pas leur parler », souligne-t-elle.

Pour l’instant, quatre réunions ont eu lieu et deux rapports ont été rendus publics avec des dizaines de recommandations.

« On s’en reparle dans un an, et là, je vous dis si ça vaut la peine. Vraiment, cette année, c’était juste de comprendre comment ça marche. C’est compliqué, leur affaire. Et cette année, c’est sûr qu’on va vouloir des actions. »

L’industrie des pesticides a trop d’emprise sur Santé Canada, dit le NPD

La démission d’un conseiller scientifique de l’organisme fédéral de réglementation des pesticides est un autre exemple de la trop grande influence de l’industrie sur Santé Canada, selon le porte-parole néo-démocrate en matière de santé, Don Davies. Ce dernier a rappelé qu’en février, un membre du conseil d’administration et le directeur exécutif de l’organisme canadien de réglementation du prix des médicaments avaient également démissionné. Ceux-ci alléguaient que les pressions exercées par l’industrie avaient bloqué les réformes visant à réduire le coût des médicaments brevetés.

La Presse Canadienne