Que mangent les Canadiens ? Plusieurs indices permettent de savoir ce qu’ils mettent dans leur assiette. L’un d’eux, mesuré par Statistique Canada, évalue la « disponibilité » des aliments pour chaque Canadien. Coup d’œil sur les plus récentes données.

Disponible, mais pas nécessairement consommé

Qu’est-ce qu’on mange, exactement ? Combien de kilos de pommes, de litres de lait, d’œufs sont consommés par chaque Canadien pendant une année ? « C’est très difficile de mesurer la consommation réelle », explique Rémy Lambert, professeur au département d’économie agroalimentaire de l’Université Laval.

Pour s’en approcher, Statistique Canada mesure la « disponibilité des aliments » en utilisant les données factuelles dont elle dispose. « Pour chaque aliment, on additionne ce qu’on produit et ce qu’on importe, on soustrait ce qu’on exporte, on compare les inventaires au début et à la fin de l’année, et on divise par le nombre de Canadiens », dit-il.

Le résultat indique la « disponibilité » d’un aliment, ce que Statistique Canada appelle aussi la « consommation apparente ». Cet aliment « disponible » n’est pas nécessairement acheté par le consommateur : il peut l’être par un transformateur qui en fera un nouveau produit. Il ne tient pas compte non plus des particularités du territoire, souligne Sébastien Rioux, de la Chaire de recherche du Canada en économie politique de l’alimentation et du bien-être. « L’offre alimentaire varie selon où on habite, par exemple, si on vit près des zones agricoles maraîchères. »

Plus les gens en mangent, plus un aliment est disponible… ou pas ?

Généralement, la disponibilité d’un produit suit la demande, mais pas toujours : en 2021, en raison des problèmes de la chaîne d’approvisionnement, « la relation entre la disponibilité des aliments et les préférences des consommateurs était plus difficile à discerner », écrit Statistique Canada dans son rapport publié le 31 mai dernier. Plusieurs raisons font varier la disponibilité d’un produit.

Par exemple, la demande pour la farine était importante pendant la pandémie (merci, Ricardo), mais sa disponibilité, elle, était en baisse… et pas seulement en raison de la demande. La diminution de la disponibilité de la farine de blé en 2021 coïncide « avec une baisse de la production du blé en raison des conditions de sécheresse dans l’Ouest canadien » en 2020, précise Statistique Canada.

INFOGRAPHIE LA PRESSE

Moins de disponibilité, plus de diversité

Néanmoins, l’observation de la disponibilité des aliments reflète l’évolution des préférences alimentaires. L’une des baisses les plus notables est celle de la quantité de lait disponible pour la consommation. Depuis dix ans, la quantité de lait disponible par personne est passée de 76,5 litres en 2011 à 60,9 litres en 2021 – une baisse de 20,3 %.

Pourquoi y a-t-il moins de lait disponible ? Dans une étude publiée en 2017, Statistique Canada suggérait que la baisse observée depuis 2009 pouvait être attribuable aux « succédanés de produits laitiers offerts aux consommateurs, comme le lait de soya et le lait d’amande ». « Certaines personnes choisissent également les desserts congelés à base d’huile de noix de coco, par exemple, plutôt que la crème glacée. »

Le même phénomène explique en partie la diminution de la disponibilité de la bière au cours des 20 dernières années ; outre la hausse de la quantité de vin disponible, il suffit de jeter un coup d’œil dans la catégorie des autres boissons pour comprendre que les buveurs d’alcool n’ont pas cessé de trinquer.

Cidres, coolers et autres boissons rafraîchissantes

2011 : 3 litres

2021 : 7 litres

Quand l’exportation mine la disponibilité

L’exportation est l’une des variables de l’équation qui influe grandement sur la disponibilité d’un produit. Si la disponibilité du sucre d’érable a diminué de 10 % en un an, c’est surtout en raison d’une courte saison des sucres au printemps 2020 et d’une augmentation des exportations. De même, le bœuf canadien, très demandé aux États-Unis en 2021, a vu sa disponibilité diminuer de 3,4 % en un an. Mais la disponibilité du bœuf diminue constamment depuis une décennie, signe aussi de l’évolution des préférences alimentaires.

Disponibilité de la viande de bœuf (par personne)

1980 : 28,7 kg

1990 : 24,8 kg

2000 : 23,4 kg

2010 : 19,9 kg

2020 : 18 kg

Source : Statistique Canada