(Ottawa) Le cofondateur de GiveSendGo, une plateforme de financement participatif utilisée par les manifestants du convoi à Ottawa, a témoigné jeudi qu’il ne se formalisait pas de la participation de groupes incitant à la haine comme le Ku Klux Klan et Proud Boys au financement sur le site, pourvu que ce soit fait de manière légale.

La déclaration a émergé de l’un des nombreux échanges animés entre les députés d’un comité de la Chambre des communes et Jacob Wells et Heather Wilson, frères et sœurs qui ont fondé le site américain qu’ils décrivent comme une plateforme chrétienne.

Alors que M. Wells a souligné à quel point la plateforme de financement valorise la liberté, la membre du comité et députée libérale Pam Damoff a remis en question ses liens avec les Proud Boys, qui au Canada sont répertoriés comme une entité terroriste et qui ont utilisé le site pour la collecte de fonds.

« Si nous commencions à imposer des tests décisifs sur la qualité des personnes pour utiliser les services publics, nous serions dans une situation très, très difficile », a déclaré M. Wells.

« Nous croyons absolument au cœur de notre être que le danger de la suppression de la liberté de parole est bien plus dangereux que la parole elle-même », a-t-il ajouté.

En réponse, Mme Damoff a affirmé : « Ma marque de christianisme est très différente de la vôtre si elle inclut la haine. »

Les députés ont pressé de questions les fondateurs de GiveSendGo pour avoir permis aux organisateurs d’utiliser leur site pour amasser des millions de dollars après que la ville d’Ottawa a déclaré l’état d’urgence face à la situation.

Les manifestants du convoi à Ottawa se sont tournés vers la plateforme de M. Wells et Mme Wilson après que GoFundMe a mis fin à une campagne antérieure.

Mme Wilson a déclaré qu’elle pensait que GoFundMe avait eu tort de mettre fin à la collecte de fonds initiale et a déclaré que de nombreuses campagnes qu’ils hébergent se tournent vers eux après avoir été supprimées en raison de « croyances politiques ».

M. Wells a dit qu’à en juger par ce qu’il a vu, il pense que la manifestation ayant bloqué l’accès à la colline du Parlement était en grande partie pacifique, même si elle comprenait des éléments « marginaux ».

Il a affirmé devant le Comité permanent de la sécurité publique et nationale que la plateforme de financement promeut « l’espoir » et la « liberté » et a dit croire qu’il était injuste de brosser un certain portrait général de la manifestation en fonction des actions de certains.

Mme Wilson a déclaré aux députés qu’elle croyait que si le premier ministre Justin Trudeau avait choisi de parler avec les camionneurs qui manifestaient autour de la colline du Parlement, une grande partie de ce qui s’est passé aurait pu être évitée.

Elle a dit également que si le gouvernement libéral fédéral s’était inquiété de l’argent recueilli grâce à GiveSendGo, il aurait dû tendre la main à l’organisation.

Les plus de 8,4 millions US recueillis grâce au site ont été gelés après que le gouvernement de l’Ontario a intenté une action en justice pour demander que les fonds ne soient pas distribués.

Plus tôt jeudi, le comité qui étudie la relation entre les plateformes de financement participatif et le financement de l’extrémisme a également entendu le président de GoFundMe, Juan Benitez, aux côtés d’un avocat de la société, qui a défendu la manière dont la plateforme de financement participatif a géré la campagne initiale.

Les députés ont interrogé M. Benitez sur la réponse de la plateforme à une collecte de fonds organisée par Tamara Lich, qui a généré plus de 10 millions pour le soi-disant « convoi de la liberté », qui a vu des manifestants dans de gros camions refuser de quitter le centre-ville d’Ottawa pendant plus de trois semaines.

M. Benitez a témoigné que GoFundMe a commencé à surveiller la campagne à la mi-janvier après qu’elle est devenue populaire et a initialement déterminé qu’elle respectait ses conditions de service.

Le comité a appris que le 27 janvier, près de deux semaines après le début de la collecte de fonds, le site a versé un million de dollars à l’organisatrice.

Kim Wilford, avocate de GoFundMe, a déclaré à l’époque que rien n’indiquait qu’il y avait des problèmes avec l’organisatrice. L’argent a été fourni avec des informations sur la manière dont les fonds seraient distribués, y compris la manière dont l’argent restant serait envoyé aux organismes de bienfaisance enregistrés, a-t-elle déclaré.

M. Benitez a déclaré aux députés qu’après le déblocage de l’argent, la situation a pris une autre tournure.

« Les choses ont changé immédiatement et très rapidement, a-t-il déclaré. La communication a changé, les informations sur les faits ont changé, le convoi lui-même a changé et nous avons réagi à ces changements. »

Il a expliqué aux députés comment, le 4 février, après avoir consulté la police locale, GoFundMe a décidé de suspendre la campagne, qui, à ce moment-là, avait dépassé 10 millions, et a commencé à offrir des remboursements aux donateurs.

Mme Wilford a déclaré que le site GoFundMe est fier de la façon dont il a géré la situation.

Le comité a appris que plus de 85 % des dons de la campagne provenaient du Canada.

Le gouvernement fédéral n’a pas directement contacté GoFundMe au sujet de préoccupations concernant la collecte de fonds, a noté M. Benitez.

« La collecte de fonds du convoi de la liberté était unique, a-t-il déclaré. Nous soutenons les manifestations pacifiques, à condition qu’elles respectent nos conditions de service. »

Il a ajouté que bien qu’il y ait des leçons à tirer de l’expérience, il espère que les députés reconnaîtront les mesures prises par GoFundMe.

Le gouvernement fédéral s’est finalement appuyé sur la loi sur les mesures d’urgence, jamais utilisée auparavant, pour geler les fonds des manifestants.