(Montréal) Il n’y aura plus de négociations quant au projet de gazoduc traversant les terres autochtones du nord du Québec, affirment des chefs innus qui s’y opposent.

Les Premières Nations innues de Mashteuiatsh, Pessamit et Essipit se disent prêtes à prendre des mesures, voire entamer des poursuites judiciaires, pour empêcher la construction du projet Énergie Saguenay de GNL Québec sur leurs terres.

La déclaration publiée vendredi était en réponse aux déclarations du président de GNL Québec, Tony Le Verger, qui a affirmé le week-end dernier qu’il souhaitait poursuivre les négociations avec les communautés autochtones.

Le vice-chef de la Première Nation de Mashteuiatsh et porte-parole des trois Premières Nations innues, Charles-Édouard Verreault, a déclaré vendredi en entrevue que GNL Québec n’obtiendra pas leur consentement.

Les Premières Nations innues avaient déjà exprimé en mai leur opposition au projet de plusieurs milliards de dollars, à la suite de la publication du rapport du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) sur le projet.

« On a écouté, on a fait nos recherches sur le projet […], et suite aux conclusions du BAPE, il était clair pour nous que notre position serait ferme, a déclaré M. Verreault. Ce projet ne verra pas le jour sur notre territoire. »

Le rapport de 500 pages du BAPE a conclu que les avantages du gazoduc de 750 kilomètres ne l’emporteraient pas sur les coûts environnementaux qui y sont associés. L’étude du projet a suscité une réponse inédite pour un rapport de l’organisme avec plus de 2500 mémoires présentés, dont 91 % étaient contre le projet.

« Comme le mentionne le rapport du BAPE […], il n’existe aucun moyen efficace pour GNL Québec de s’assurer que le gaz naturel liquéfié servirait effectivement de substitut à des combustibles plus polluants dans les marchés d’exportation visés, a indiqué M. Verreault. Impossible, donc, pour la compagnie de rencontrer ses engagements en matière de diminution globale des gaz à effet de serre. »

Le porte-parole de GNL Québec, Louis-Martin Leclerc, a déclaré en entrevue que l’entreprise restait ouverte à des négociations avec les communautés afin d’expliquer les avantages du projet.

« Nous sommes et restons ouverts au dialogue afin d’avoir l’opportunité d’expliquer nos engagements et de démontrer que le projet Énergie Saguenay fournira du gaz naturel liquéfié avec la plus faible empreinte carbone au monde, apportant ainsi une contribution importante à la lutte contre les changements climatiques », a affirmé M. Leclerc.

Le projet Énergie Saguenay a été présenté pour la première fois aux communautés autochtones en 2014 comme une mesure de lutte contre les changements climatiques, a déclaré M. Verreault.

Le tracé proposé transporterait du gaz naturel liquéfié de l’Ouest canadien jusqu’à une usine de liquéfaction à Port Saguenay, au Québec. Il traverserait cependant des terres autochtones, a expliqué M. Verreault.

Pour les Premières Nations innues, accepter un projet qui pourrait poser des menaces environnementales irait à l’encontre des valeurs ancestrales, a-t-il déclaré.

« Ce territoire est l’endroit où nos ancêtres sont établis depuis des siècles et où nous détenons des droits ancestraux et des titres innus », a insisté M. Verreault.

Les droits ancestraux des Premières Nations innues n’ont toutefois pas encore été officiellement reconnus par le gouvernement du Québec.

Le ministre québécois des Affaires autochtones, Ian Lafrenière, a déclaré vendredi qu’il était au courant de la position des Innus, mais qu’il attendait la décision du ministre de l’Environnement, Benoit Charette, sur le projet.

Le gouvernement du Québec a indiqué en avril qu’il déciderait d’ici la fin de l’été s’il donner le feu vert au projet.

« Toutes les options sont encore sur la table, au niveau des actions que l’on pourrait poser [pour arrêter le projet] si le gouvernement [va de l’avant] », a déclaré M. Verreault.

« Il n’est pas question qu’il voie le jour sur le territoire innu », a-t-il affirmé.