L’arrivée en scène de Catherine Fournier dans la course à la mairie de Longueuil est un autre indice qui nous permet de croire que la politique municipale est capable d’attirer les jeunes.

Est-ce que la campagne qui se dessine sera celle qui nous fera voir un plus grand nombre de jeunes candidats, particulièrement des femmes ? Je commence sérieusement à le croire.

Quelques jours avant l’annonce de Catherine Fournier, 29 ans, nous apprenions que Maude Marquis-Bissonnette, 32 ans, allait défendre les couleurs d’Action Gatineau à la mairie de cette ville de 300 000 habitants. Le maire sortant, Maxime Pedneaud-Jobin, a annoncé qu’il ne briguerait pas un troisième mandat.

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Catherine Fournier, candidate à la mairie de Longueuil

Il faut également parler d’Évelyne Beaudin, 32 ans, qui ose le même défi avec le parti Sherbrooke Citoyen et de Valérie Renaud-Martin, 39 ans, qui s’engage dans une lutte contre le maire de Trois-Rivières, Jean Lamarche.

De son côté, Nadine Viau aimerait bien s’emparer de la mairie de Beloeil sous les couleurs d’Oser Beloeil. « J’ai 43 ans, je ne suis pas si jeune que cela », m’a-t-elle dit en riant avant de me confier qu’un de ses candidats (dont le nom sera bientôt dévoilé) n’a que 19 ans.

Y aurait-il un « effet Valérie Plante », élue à l’âge de 43 ans en 2017 ? Il est permis de le penser.

Chez les hommes, Philippe Guilbert, 27 ans, et Vincent Boutin, 36 ans, convoitent les mairies de Trois-Pistoles et de Sherbrooke. Pour ce qui est de Marc-Antoine Desjardins, 45 ans, chef de Ralliement pour Montréal, il promet un « bel équilibre d’âge et de diversité ».

La plupart de ces candidats et candidates ont connu une expérience de la scène municipale en tant que conseillers, mais ils ont décidé de faire le grand saut. Pour eux, il est fini, le temps où l’on devait attendre d’avoir franchi le cap de la cinquantaine pour accéder à un poste de maire.

Précisons que l’âge moyen des maires au Québec est actuellement de 58 ans, alors que celui des conseillers est de 53 ans.

À Élections Québec, on m’a dit qu’il était trop tôt pour tirer des conclusions. La date limite pour les mises en candidature est encore loin. Mais ceux qui suivent de près l’actualité municipale ont remarqué qu’il ne se passe pas une journée sans que l’on découvre le nom d’un jeune candidat ou d’une jeune candidate convoitant un poste de maire ou de conseiller.

Même s’ils représentent 26,6 % de la population, les 18-34 ans ne constituent que 8,3 % des élus dans les conseils municipaux au Québec. À chaque campagne électorale, depuis une dizaine d’années, ce sujet revient. Pourquoi les jeunes ne sont-ils pas intéressés par la politique, notamment celle touchant la sphère municipale ?

Pourtant, plus que jamais, la politique municipale s’empare d’enjeux proches de la jeune génération : l’environnement (le mouvement Vague écologiste au municipal travaille fort à attirer de jeunes candidats), l’inclusion sociale, une vie de quartier mieux adaptée à la réalité des jeunes familles, la question des transports actifs et collectifs, les luttes pour une démocratie forte et une meilleure transparence.

Selon des données du ministère des Affaires municipales et de l’Habitation (MAMH), il y a au Québec 1095 maires. Seulement 125 font partie de la tranche des 18-44 ans.

Depuis 2005, la proportion de femmes élues, toutes catégories confondues, augmente doucement. Elle est passée de 24,8 % à 32,4 % lors des dernières élections municipales de 2017.

Seulement 22,6 % des postes de maire sont occupés par des femmes depuis les élections de 2017.

Fait à noter, c’est dans les régions administratives de Montréal (41,2 %), de l’Abitibi-Témiscamingue (40,3 %), de la Côte-Nord (40,3 %) et du Nord-du-Québec (39,3 %) que l’on trouve les plus grandes proportions de femmes parmi les élus.

Pourquoi est-ce si difficile d’attirer les jeunes en politique municipale ? Des observateurs prétendent que ce travail n’est pas adapté à la réalité de la vie familiale. À ça je réponds que l’on pourrait dire la même chose à propos d’une foule de métiers et de professions.

Que l’on soit jeune ou vieux, le rythme de vie des politiciens est difficile et ingrat. Combien de personnes autour de moi, tentées par cette aventure, ont consulté un politicien d’expérience et se sont fait dire : « N’embarque pas là-dedans ! C’est l’enfer ! Tu n’as plus de vie ! »

La famille est donc un frein à une carrière en politique municipale. Or, c’est souvent lorsqu’on patauge dans la réalité familiale que l’on prend conscience des réalités et des enjeux de son milieu.

Dans le but d’obtenir un meilleur équilibre, le MAMH offre actuellement des séances d’information virtuelles dans toutes les régions du Québec. La campagne Je me présente vise à démystifier le rôle et la réalité de la politique municipale. La ministre des Affaires municipales, Andrée Laforest, et la ministre responsable de la Condition féminine, Isabelle Charest, souhaitent faire croître le nombre de candidatures féminines.

Les 47 séances prévues ont attiré 783 participants. Devant un tel succès, le MAMH a ajouté 21 séances qui auront lieu plus tard. Un second volet de la campagne ciblera les jeunes.

Hadrien Parizeau, la nouvelle recrue de Denis Coderre, avait 27 ans quand il est devenu conseiller dans Ahuntsic-Cartierville avec Ensemble Montréal, en 2017. Le plus jeune élu de Montréal a ensuite siégé comme indépendant à partir de 2018.

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Hadrien Parizeau

En novembre dernier, il a publié une lettre dans La Presse qui se voulait une invitation aux jeunes à se lancer en politique municipale. Après avoir prodigué quelques conseils, il disait : « Allez-y, lancez-vous ! Peu importe le résultat, c’est l’expérience d’une vie. […] Je vous le dis, en contribuant à changer les choses pour le mieux dans votre communauté, vous réaliserez qu’il n’y a rien de plus gratifiant que le service public. »

En terminant, voici des données qui devraient nous amener à réfléchir sur les principes mêmes d’une saine démocratie et qui pourraient peut-être éveiller quelques envies : lors des élections de 2017, 3932 postes de conseiller et 534 postes de maire ont été pourvus sans aucune opposition.

Alors que les canaux pour exprimer les idées se multiplient et croulent sous le poids de la critique, ce n’est pas normal de voir cela.