(Québec) Les retraités du quotidien Le Soleil à Québec accusent la Confédération des syndicats nationaux (CSN) de chantage et d’avoir gardé le silence sur la déroute de leur régime de retraite.

Leurs prestations seraient réduites de 30 % à la suite de la reprise de ce journal du Groupe Capitales Médias (GCM) par une coopérative, selon un scénario qui pourrait être avalisé mercredi au palais de justice de Québec.

Dans une lettre adressée mardi au président de la CSN, Jacques Létourneau, et obtenue par La Presse canadienne, l’association des retraités exige des réponses concernant la caisse de retraite, qui accuse un déficit estimé à 65 millions.

L’association veut savoir pourquoi le syndicat n’a pas prévenu ses membres lors de la vente du journal par Power Corporation au Groupe Capitales Médias en 2015.

Selon le groupe de retraités, il y avait déjà des preuves que le propriétaire, Martin Cauchon, ne pouvait assumer le paiement du déficit de la caisse en cas de faillite ou de fermeture. La CSN aurait dû alors informer ses membres et faire une sortie publique, au dire des retraités.

Si comme prévu une coopérative rachète Le Soleil, tout comme pour les autres journaux de GCM, la coopérative n’aura aucune responsabilité à l’égard du régime de retraite actuel.

Chantage

L’association de retraités accuse également la CSN d’avoir fait du chantage dans l’opération de sauvetage de GCM. Ainsi, des représentants syndicaux auraient affirmé que les doléances des retraités allaient menacer le sauvetage des journaux par les coopératives, peut-on lire dans la lettre.

« C’est comme si la CSN prenait en otages les employés des journaux pour forcer les retraités à renoncer à leur droit de poursuites, écrivent les représentants des retraités, Robert Fleury et Pierre Pelchat. Un tel chantage est indécent, voire honteux de la part de la CSN. Québecor (qui a déjà reluqué GCM) aurait fait la moitié de telles menaces que la CSN l’aurait dénoncé vivement sur la place publique. »

Enfin, l’association reproche à la CSN d’avoir refusé de la rencontrer deux fois, ainsi que d’avoir refusé la présence de deux observateurs aux négociations entre les syndicats et le syndic, avec les coopératives pilotées par la CSN.

« Incidemment, ces supposées négociations n’ont rien donné aux retraités », font valoir les représentants des retraités.

« La plupart des membres des comités de direction des associations de retraités sont d’anciens officiers syndicaux qui ont milité pendant plusieurs années. Ils ne se reconnaissent plus dans la CSN d’aujourd’hui », concluent-ils.

Réaction de la CSN

La CSN a été appelée à commenter la lettre de l’association. Le porte-parole de la confédération a préféré ne pas accorder d’entrevue, mais plutôt transmettre une déclaration écrite.

La CSN affirme avoir exprimé sa « grande préoccupation » à l’égard des régimes de retraite lors de la vente des journaux à GCM, mais Retraite Québec avait néanmoins avalisé la transaction.

Le syndicat dit avoir collaboré avec les associations de retraités pour sauver les régimes de retraite, toutefois, aucun repreneur ne voulait s’engager à sauver les journaux ainsi que les caisses de retraite.

« La décision difficile de les fermer, prise par la Coopérative nationale de l’information indépendante (les repreneurs) dans sa proposition déposée auprès du syndic de faillite et soumise aux syndicats comme condition de survie de l’entreprise, visait à assurer la relance des six quotidiens », peut-on lire.

À l’abri de ses créanciers depuis août, GCM compte quelque 350 employés permanents et publie les quotidiens régionaux Le Soleil, La Tribune, La Voix de l’Est, Le Droit, Le Nouvelliste et Le Quotidien. GCM est un client de La Presse canadienne.

Pas moins 948 cadres et syndiqués retraités de six quotidiens devraient voir leur rente amputée de 25 % à 30 % à compter du 1er janvier.

Dans le cadre de l’audience prévue mercredi, les retraités ont l’intention d’intervenir devant le juge Daniel Dumais afin de demander un droit de représentation dans le but d’obtenir des documents confidentiels détenus par le syndic.