Le ministre de l’Agriculture du Québec, André Lamontagne, rencontrera « dans les plus brefs délais » les Producteurs de grains du Québec (PGQ), au moment où ces derniers mènent une course contre la montre pour terminer les récoltes.

À l’heure actuelle, 74 % des superficies de maïs restent encore à récolter, sur un sol enneigé, avec des tiges fragilisées et cassées. Près de 10 % des superficies de soya sont maintenant ensevelies sans avoir été récoltées. Cette situation touche des milliers de producteurs, à la grandeur du Québec, selon les PGQ.

Ces derniers ont sollicité dimanche matin une rencontre d’urgence avec M. Lamontagne. La rencontre devrait aussi avoir lieu avec le PDG de La Financière agricole du Québec, Ernest Desrosiers.

« Nous sommes sensibles aux conséquences de la neige hâtive chez les agriculteurs. La rencontre aura lieu dès que nous aurons tous convenu d’une date », a affirmé l’attachée de presse du ministre, Laurence Voyzelle. 

Le cabinet du ministre Lamontagne n’a pas voulu s’avancer sur la forme d’aide que Québec pourrait fournir. Cependant, Mme Voyzelle a tenu à rappeler que le gouvernement avait déjà soutenu les agriculteurs plus tôt cette année « en annonçant un programme pour compenser les pertes à la suite de la sécheresse de 2018 ». L’aide de Québec, combinée à celle d’Ottawa, avait alors atteint 60 millions. 

Les PGQ, qui représentent quelque 10 500 producteurs à travers la province, espèrent trouver avec le Ministère des solutions à la crise pour assurer une meilleure protection contre les effets des intempéries sur la production de grains.

La demande de rencontre a été transmise ce matin au cabinet du ministre. Nous sommes heureux que cette rencontre soit en voie d’être confirmée.

Benoît Legault, directeur général des Producteurs de grains du Québec, dans un communiqué transmis dimanche matin 

« Il y en a pour qui ça va être triste »

Dans les champs, la course contre la montre se poursuivait dimanche pour les agriculteurs, surtout que des épisodes de pluie verglaçante sont attendus au cours de la semaine. 

« Pour le moment, nous ramassons le beau maïs. Mais il va falloir attendre que la neige fonde pour ramasser celui qui est cassé. […] La météo annoncée cette semaine est inquiétante », dit Stéphane Blanchette, agriculteur de Saint-Charles-sur-Richelieu.

Après plusieurs journées et nuits de travail, ce dernier estimait que le tiers de ses récoltes étaient terminés. Malgré les difficultés auxquelles les agriculteurs sont confrontés, il se dit chanceux de la qualité de son maïs, qui lui permettra de sauver une partie de la mise. 

De notre côté, la qualité est là, mais tous n’ont pas la même chance. Certains producteurs ne peuvent même pas vendre leur récolte en raison de la mauvaise qualité des grains, causée par la température.

Stéphane Blanchette, agriculteur de Saint-Charles-sur-Richelieu

En plus des pertes qui diffèrent d’un producteur à l’autre, M. Blanchette évalue la hausse des coûts d’exploitation entre 20 et 30 %. « La glace cause énormément de bris sur les moissonneuses », explique-t-il. 

« Beaucoup d’agriculteurs vont passer un hiver difficile, très difficile, ajoute M. Blanchette. Je sais que des producteurs ont le moral très bas en ce moment. Il y en a pour qui ça va être triste. »

1,2 milliard

« C’est une période exceptionnellement désastreuse pour les récoltes de grains au Québec. Après des récoltes de céréales et de canola excessivement difficiles, c’est maintenant au tour des producteurs de maïs et de soya de se retrouver dans le pétrin », a de son côté déclaré le président des PGQ, Christian Overbeek.

« Nous en appelons maintenant à la sensibilité du gouvernement face à une situation extrême et totalement imprévisible », ajoute le président des PGQ.

La valeur de la production annuelle de maïs au Québec est d’environ 675 millions de dollars. Elle est d’environ 500 millions de dollars pour le soya.

La situation a fait réagir la co-porte-parole de Québec solidaire Manon Massé, qui a appelé le gouvernement Legault à offrir son soutien aux agriculteurs touchés par le gel précoce de leur récolte cette année. 

En marge du congrès de son parti, dimanche, Mme Massé a fait valoir l’importance de soutenir ces travailleurs pris de court par l’arrivée prématurée de la neige. Avec la multiplication de ce genre de phénomènes météorologiques en raison des changements climatiques, le Québec doit se doter d’outils pour réagir, croit-elle.

« Une chose est certaine, on ne peut pas les abandonner. Le dérèglement climatique est là, ça prend le soutien nécessaire quand le pire arrive. […] Ça se traduit rarement autrement que par une aide financière », a indiqué Mme Massé. 

— Avec Thomas Dufour, La Presse