Le gouvernement libéral de Jean Charest a manqué de leadership depuis le début de la crise à Montréal-Nord, estiment autant l'Action démocratique que le Parti québécois.

La lenteur à réagir, le manque de réponses, le rôle effacé du ministre de la Sécurité publique, Jacques Dupuis, sont répréhensibles selon les partis de l'opposition à Québec.

«Quand le ministre a juste à enfiler ses bottes de caoutchouc pour aller dire à une municipalité qu'un programme qui existe déjà va s'appliquer, il est capable de le faire, mais lorsqu'il y a une crise où il faut faire preuve de leadership, chaque fois qu'un dossier devient plus difficile à régler, il disparaît», a lancé Sylvie Roy, critique adéquiste en sécurité publique.

Le ministre Dupuis «se défile de ses responsabilités», a-t-elle ajouté. «On ne parle pas d'une simple intervention policière, on ne parle pas d'une arrestation pour vol à l'étalage. On parle d'un quartier sensible où il y a eu une émeute. On parle de deux émeutes en moins de six mois à Montréal.»

Pour Jacques Côté, député du Parti québécois, le gouvernement aurait dû réagir dès la mort de Fredy Villanueva, abattu samedi par un policier montréalais.

«S'il n'était pas au pays (le ministre Dupuis), il a un adjoint parlementaire qui aurait dû réagir. Il est là pour ça, l'adjoint», a dit M. Côté, ajoutant que le ministre de la Sécurité publique est responsable au bout du compte de l'ensemble des forces policières au Québec, puisqu'il se trouve en haut de la pyramide.

«Si on avait un ministre «proactif», qui avait expliqué à la population ce qu'il a expliqué trois jours plus tard, on aurait peut-être eu moins de casse», a pour sa part estimé Mme Roy.

Tirant à boulets rouges sur M. Dupuis, la députée adéquiste a souligné que le ministre avait refusé de répondre aux questions de l'opposition sur de nombreux dossiers cette année, notamment l'embauche de nouveaux policiers, la contrebande de tabac, la production de cannabis sur des terres agricoles, les violences en territoires autochtones, les émeutes après le match du Canadien en avril et l'affaire Clermont Bégin, ce pédophile multirécidiviste dont la libération a soulevé la controverse.

À la fois ministre de la Sécurité publique et ministre de la Justice, M. Dupuis a très souvent répété qu'il ne peut pas commenter les dossiers lorsqu'une enquête ou un procès sont en cours. À son cabinet, on ajoute qu'il ne commente jamais les opérations policières.

Québec discret

Le gouvernement du Québec s'est fait discret depuis les événements de la fin de semaine dernière. La ministre Line Beauchamp, députée du quartier, s'est rendue sur les lieux au lendemain des émeutes, lundi. Jacques Dupuis est revenu d'urgence de ses vacances à l'étranger, lundi soir. Il a rencontré les intervenants du dossier mardi matin. Depuis, plus de nouvelles.

Le ministre Dupuis refuse depuis le début de la crise les demandes d'entrevues de tous les médias écrits, alors qu'il a fait une brève apparition sur les grands réseaux de télévision. À son cabinet, on répond que les médias écrits ont eu toute l'information utile et nécessaire lundi, alors que le ministre était en chemin pour revenir au Québec. Mais il ne pouvait pas répondre aux questions des médias puisqu'il était alors à bord d'un avion, ajoute-t-on. Pourtant, il a passé une bonne partie de la journée au téléphone avec les autorités concernées pour gérer la crise, disait-on, lundi, à son cabinet.

Le ministre Dupuis n'assistera pas aux funérailles de Fredy Villanueva, ce matin. Le gouvernement a délégué la ministre de l'Environnement, Line Beauchamp, députée de Bourassa-Sauvé.