Déjà aux prises avec 17 cas confirmés de listériose, les autorités de santé publique de tout le Canada risquent de se retrouver au cours des prochains jours avec une multiplication de personnes affectées par cette bactérie potentiellement dangereuse.

En Ontario, là où la bactérie a frappé le plus de gens, les responsables de la santé publique ont admis jeudi enquêter sur 17 autres cas supplémentaires.

Officiellement, pour le moment, 13 cas de contamination ont été confirmés en Ontario. Quatre autres cas, deux en Colombie-Britannique, un au Québec et un autre en Saskatchewan ont été également recensés.

En conférence de presse, le directeur de la santé publique ontarienne, le docteur David Williams, a dit s'attendre à d'autres cas au cours des prochaines semaines puisque le temps moyen d'éclosion de la maladie est de trois semaines, et peut même aller jusqu'à 90 jours.

«Outre une femme enceinte de 40 ans, tous les cas touchent des personnes de plus de 50 ans, surtout de 60 et 70 ans», a précisé le docteur Williams.

Les listérioses pourraient être causées par des viandes et charcuteries produites par une usine torontoise des Aliments Maple Leaf et qui font l'objet d'un important rappel. L'Agence canadienne d'inspection des aliments (ACIA) souligne cependant qu'elle sera en mesure de confirmer samedi, après des tests plus poussés, si la bactérie retrouvée dans des produits Maple Leaf est la même que celle qui a rendu ces personnes malades.

«Ces viandes font l'objet d'une enquête en profondeur, mais nous attendons encore des résultats de laboratoires qui nous donneront l'empreinte génétique de la bactérie», ce qui permettra la comparaison menant à une conclusion plus certaine, a expliqué Brian Evans, vice-président directeur de l'ACIA.

Entre-temps, l'agence dit analyser toutes les autres sources possibles de contamination.

Les aliments contaminés par Listeria monocytogenes ne présentent pas nécessairement d'altération visible ni d'odeur suspecte. La consommation d'aliments contaminés par cette bactérie peut causer la listériose. Cette maladie peut entraîner des symptômes qui s'apparentent à la grippe, ainsi qu'une forte fièvre, de graves maux de tête, une raideur de la nuque et des nausées.

Les femmes enceintes, les jeunes enfants, les gens âgés et les personnes dont le système immunitaire est affaibli sont plus vulnérables et devraient être particulièrement vigilants.

L'éclosion de ces listérioses vient relancer l'intérêt pour les changements que le gouvernement conservateur semble vouloir apporter à l'inspection des aliments.

Selon un document du cabinet qui circule depuis quelque temps déjà, le plan du gouvernement ferait en sorte de laisser les inspections alimentaires entre les mains de l'industrie, laissant à l'ACIA un rôle de surveillance plus large.

En point de presse, jeudi, le ministre de l'Agriculture, Gerry Ritz, a évité d'élaborer sur les changements planifiés par le gouvernement dans un «document de discussion qui n'a pas été mis en oeuvre», a-t-il insisté.

«Ce que nous voulons, en fait, c'est adopter un rôle plus proactif à l'intérieur des usines», a expliqué le ministre, affirmant que le budget de l'ACIA a été augmenté lors du dernier budget et que l'agence a embauché 200 nouveaux inspecteurs.

M. Ritz n'avait visiblement pas très envie de s'étendre sur le sujet, préférant s'en tenir à son message qu'il voulait rassurant. «Notre plus grande priorité est de s'assurer que l'approvisionnement alimentaire est sécuritaire. Nous voulons nous assurer que ceux qui vont faire l'épicerie ce soir auront confiance que les produits dans leur panier sont sans danger», a-t-il déclaré.

Mais le Parti libéral n'a pas raté l'occasion de critiquer cette approche des conservateurs. De passage à Toronto, le chef libéral, Stéphane Dion, a rappelé que le gouvernement de Stephen Harper compte parmi ses ministres Jim Flaherty, John Baird et Tony Clement.

«C'est le même groupe qui était avec Mike Harris au moment de Walkerton», a souligné M. Dion, faisant référence à la tragédie de l'eau contaminée qui a coûté la vie à sept personnes et en a rendu malades près de 2000 autres.

«Ils veulent faire la même chose pour l'inspection des aliments», a poursuivi le chef libéral, qui croit que le gouvernement fédéral «doit être responsable de réglementation et de la protection du public en matière d'alimentation».