Conservant le ton adopté au cours des derniers jours, le premier ministre Stephen Harper a relancé de plus belle les scénarios d'élections automnales en déclarant, mardi, qu'il déterminera dans les prochaines semaines si les conservateurs auront les coudées franches pour gouverner lorsque les travaux parlementaires reprendront.

Cette déclaration survient quelques jours après que M. Harper ait admis qu'il soupesait la possibilité de déclencher lui-même des élections générales, dans l'optique où le Parlement s'avèrerait improductif.

Une telle décision l'obligerait cependant à faire fi de la loi sur les élections à date fixe, que les conservateurs ont fait adopter et qui fixe le prochain affrontement à l'automne 2009.

«C'est clair que les partis d'opposition ne vont pas respecter la date fixe; M. Dion a indiqué qu'il peut défaire le gouvernement à n'importe quelle opportunité. Evidemment l'élection ne sera pas en octobre 2009, et c'est évident que je dois faire une analyse de la situation parlementaire», a fait valoir le premier ministre, de passage à Hamilton, mardi.

En ajoutant que cette réflexion se tiendrait dans les semaines à venir, M. Harper semble indiquer que le déclenchement des élections pourrait bien survenir avant la reprise des travaux aux Communes, prévue le 15 septembre.

En plus de sa réflexion, le premier ministre a dit vouloir rencontrer tous les chefs des partis d'opposition pour discuter de la situation.

Cette rencontre sera cruciale pour le Bloc québécois, qui jugera des résultats pour déterminer l'étape suivante.

«À la sortie de la rencontre, si je constate que Stephen Harper s'entête avec son agenda de droite qui ne convient pas du tout au Québec, à notre première journée d'opposition, le Bloc québécois va déposer une motion de non-confiance à l'endroit du gouvernement conservateur», a indiqué le chef bloquiste Gilles Duceppe, de passage à Shawinigan.

Le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD), Jack Layton, ne croit pas pour sa part que les Canadiens pardonneront à Stephen Harper si celui-ci ne respecte pas sa loi sur les élections à date fixe.

«Voilà un autre exemple qui démontre que les Canadiens ne peuvent pas faire confiance à ce premier ministre», a noté M. Layton en entrevue.

Si les intentions du Bloc québécois et du NPD sont assez claires, le point d'interrogation demeure le Parti libéral. Au printemps dernier, c'est l'abstention ou l'absence des libéraux lors de votes critiques qui a permis au gouvernement Harper de se maintenir au pouvoir.

Que fera le chef libéral, Stéphane Dion, cette fois-ci? Difficile à prédire, ce dernier montrant un peu moins d'empressement que son vis-à-vis conservateur à en découdre. Pour l'instant, il dit vouloir attendre le bon moment.

«Un élément important, dans ma décision, c'est dans quelle mesure les Canadiens s'attendent à avoir une élection fédérale et sont bien préparés à regarder la chose de très près», a expliqué M. Dion, en conférence de presse.

À son avis, à pareille date l'an dernier, parce que plusieurs scrutins provinciaux venaient de se terminer ou étaient sur le point de se tenir, les électeurs n'auraient pas été très attentifs.

«Ils le sont plus maintenant», a ajouté le chef libéral, qui n'hésite pas pour autant à dénoncer vertement les politiques «idéologiques» de droite des conservateurs.

M. Dion ne semble toutefois pas prêt à mordre à l'appât que lui tend le premier ministre qui fait tout pour le provoquer. Encore mardi, M. Harper en a remis, allant jusqu'à traiter le chef libéral «d'irresponsable» parce qu'il hésite à renverser les conservateurs minoritaires à la Chambre des communes à cause de mauvais résultats dans les sondages.

La réplique du chef libéral s'est faite cinglante. «Ce qui est irresponsable, c'est la sienne (son attitude). C'est de prétendre qu'il y a une crise au Parlement quand chaque fois c'est son parti qui bloque les travaux du Parlement», a souligné M. Dion.