Le train touristique Orford Express connaît un succès fulgurant depuis son lancement l'an dernier. L'idée est séduisante. Confortablement assis dans un train des années 50, on découvre d'un autre angle et à un rythme paisible, les paysages bucoliques des Cantons-de-l'Est. Et pour ajouter à l'enchantement, le repas gastronomique servi à bord est sans pareil.

Le point de départ: l'ancienne gare quasi centenaire du CP, complètement restaurée, située tout près du lac des Nations, en plein coeur de Sherbrooke. La destination: Eastman, 50 km plus loin, pour un voyage aller/retour de 3h30, à un rythme de 25 km/h - on est loin du TGV! Ce périple comprend également une pause dégourdissement à la pointe Merry, face au lac Memphrémagog.

À bord de l'Orford Express, le temps semble s'être arrêté. Les deux autorails en service datent des années 50. Sous la houlette de l'homme d'affaires sherbrookois André L'Espérance (ancien gestionnaire de la station de ski du Mont-Orford) et de son partenaire, l'abbé Donald Thompson, ces vieilles voitures ont toutefois subi une restauration de trois millions de dollars.

Résultat: les deux vieux «budd cars» se sont transformées en voitures-restaurant haut de gamme. Avec le personnel attentif, le décor classique avec murs en érable, boiserie en merisier, accessoires en acier inoxydable et luxueux fauteuils en cuir, les 140 passagers replongent à l'époque glorieuse des chemins de fer. Quant à mon père, qui m'accompagne dans cette excursion, l'ambiance lui rappelle les trains de son enfance, ce qui l'enchante.

Dès que le train se met à vrombir, le décor devient intéressant. On longe d'abord le lac des Nations, un élargissement de la rivière Magog, et sa nouvelle piste cyclable qui le ceinture. Le conducteur, l'abbé Thompson lui-même, prend le micro et s'occupe de l'animation historique, dont les faits sont appuyés par des images d'archives diffusées sur des petits écrans fixés au-dessus de notre table.

Cinq lacs

Pendant le parcours, cinq lacs défilent à nos fenêtres, dont les lacs Memphrémagog, d'Argent et Magog. On admire aussi quelques vignobles, le marais de la rivière aux Cerises et le massif du mont Orford. À Eastman, point d'arrivée, impossible de débarquer, car les autorails traversent alors un pont ferroviaire de 60 pieds de hauteur, réputé pour ses nombreux effondrements dans le passé... «Construit maintenant en acier, il ne s'écroule plus», dit avec assurance M. Thomson, sourire aux lèvres.

L'Orford Express emprunte les rails qui sont la propriété du Montréal Maine Atlantic Railway, dont le réseau ferroviaire se rend jusqu'à Bangor, au Maine. Il faut donc prendre la voie d'évitement de temps à autre, afin de laisser passer les trains de marchandises, qui ont la priorité sur les pauvres touristes que nous sommes.

Sur le chemin du retour, après la pause d'une demi-heure à la pointe Merry, un chanteur-crooner entonne des balades populaires, genre Frank Sinatra, tout en se promenant dans l'allée centrale. J'avoue que j'aurais pu m'en passer, mais les autres passagers semblent apprécier.

Les fins palais comblés

De mon point de vue (et de celui de mon père), l'expérience gastronomique s'avère la principale raison de prendre ce train. Peu importe le départ que vous choisissiez (brunch, lunch ou souper), les plats du chef comblent les fins palais. Et c'est tout un exploit de réussir à concocter une cuisine aussi délicieuse dans des trains dépourvus de cuisine. Le chef Flanklin Sanchez prépare les repas à quelques kilomètres de la gare et ravitaille le train avant chaque départ.

L'Orford Express (www.orfordexpress.com) est en service jusqu'au 2 novembre, du jeudi au dimanche. Depuis son inauguration l'an dernier, ce train est si populaire qu'il faut s'y prendre d'avance pour obtenir des places pendant le week-end. L'an prochain, une nouvelle voiture panoramique s'ajoutera, ce qui permettra d'admirer le paysage sous tous ses angles.