Le bar où Carrie aime siroter des cosmopolitans dans Sex and the City? Le club de striptease fréquenté par Tony Soprano dans Les Soprano? À New York, des tours spécialisés offrent aux fans la possibilité de marcher sur les pas de leurs héros.

Deux fois par jour, le bus de Sex and the City fait ainsi le plein en face du Plaza Hotel, près de Central Park. De jeunes femmes, souvent venues entre copines, y embarquent pour découvrir les lieux du feuilleton, faire du magasinage comme ses héroïnes, boire et manger comme elles...

Des clip vidéo diffusés dans le bus montrent Carrie, Miranda, Charlotte ou Samantha sur les lieux visités, la guide alterne anecdotes de la série, devinettes et détails sur New York, et pendant trois heures et demie, les admirateurs traversent avec délice la frontière entre fiction et réalité, se photographiant à chaque étape.

Le Plaza? C'est là que Carrie s'est figée, voyant Big en sortir avec une autre femme, explique la guide, Stephanie Schweitzer.

Le bus descend la 5e avenue, dépasse le célèbre bijoutier Tiffany. «Qui a fait une proposition de mariage à qui»? demande-t-elle.

La réponse fuse avec un gloussement de joie de l'arrière du bus. À Greenwich village, le bus s'arrête dans une pizzeria filmée dans la série, près d'un sex shop visité par Charlotte. Certaines admiratrices goûtent la pizza, d'autres reviennent de la boutique avec un petit paquet enrubanné.

«tout devient vivant»

«J'adore, je voudrais que ce ne se termine jamais», soupire Kristi Tanghare, une Américaine de 28 ans, venue avec une amie pour son anniversaire. «Je suis complètement obsédée par Sex and the City, j'ai vu et revu les épisodes. Et là, tout devient vivant».

«La série parle de choses auxquelles nous pouvons nous identifier, dont parlent les filles, et en même temps, dont on a peur de parler», ajoute son amie Jennifer Hegarty qui a adoré «chaque minute» de l'excursion.

Nouvel arrêt, cette fois pour faire du magasinage dans les boutiques de luxe de Bleecker Street. Dans le bus, la guide offre à chacune un «cupcake», petit gâteau crémeux avec lequel se consolent parfois Carrie ou Miranda.

À bord du bus, autant d'étrangères que d'Américaines.

Kristi et Jennifer ont déjà acheté un jouet coquin, un sac à main et son portefeuille assorti, et attendent le prochain arrêt pour boire un cosmopolitan.

Aurélie Maheux, 26 ans, Française venue de Caen dont le compagnon est l'un des rares hommes à bord, a revu récemment en dix jours les 94 épisodes de Sex and the City. La jeune femme, qui a prévu de dîner dans un restaurant filmé dans la série, aime ses héroïnes, car «ce sont des femmes modernes, libres, qui parlent de sexe en toute liberté».

Le samedi, autre tour, autre public, pour les Soprano. Des couples, un peu plus âgés, embarquent pour un voyage de près de 5 heures dans le New Jersey et ses paysages industriels. Le guide Marc Baron, ancien figurant de la série, enchaîne là aussi anecdotes et devinettes, et distribue même des petits cadeaux. Les fans, dont beaucoup de Britanniques, sont passionnés, connaissent la série sur le bout des doigts.

Points d'orgue du voyage, le restaurant Holsten's où Tony Soprano, le mafieux déprimé, a mangé lors du dernier épisode, et la boîte de striptease «Bada Bind», dans la vraie vie «Satin Dolls». Elle est quasi-déserte en milieu de journée, deux jeunes femmes dont l'une en string et sweatshirt s'y trémoussent sans conviction. Mais les admirateurs sont ravis, s'y imaginent avec Tony.

Ces dernières années, ce tourisme spécialisé a connu une progression spectaculaire.

«J'avais commencé un peu comme un passe-temps le week-end, en 1999, car ces tours n'existaient pas alors que New York est l'endroit le plus filmé au monde», explique à l'AFP Georgette Blau, 39 ans, PDG de On Locations.

Sa compagnie offre désormais à New York sept tours en bus (dont Sex and the City et Les Soprano) consacrés au cinéma et à la télévision, et deux tours à pied. Certains sont en français ou allemand. S'y ajoute des tours privés en limousine, et un tour à Boston.

Quelque 90.000 personnes y participent chaque année, dont la moitié venue de l'étranger, notamment de France, d'Australie, du Royaume-Uni, d'Italie, du Japon et d'Allemagne, selon Mme Blau.

En 1999, «il y avait trois compagnies qui faisaient ça dans le monde», dit-elle. «Maintenant, il y  en a plus de 100 dont 12 ou 13 aux États-Unis».