Ce n'est pas comme si Josh Gorges en était à ses derniers kilomètres sur la route du hockey. Ce n'est pas comme si le vétéran défenseur avait quelque chose comme 40 ans et qu'il ne lui restait plus beaucoup de temps. Mais Gorges commence à ressentir le poids des années qui passent.

Pour lui, les présentes séries sont les sixièmes en neuf ans de carrière dans la Ligue nationale. Il n'a jamais vraiment pu «passer proche», comme on le dit dans le milieu, sauf peut-être une fois, en 2010, lors de ce printemps magique qu'il n'a certainement pas oublié.

Depuis cette fois-là, Josh Gorges attend sa chance. Depuis cette fois-là, Josh Gorges espère.

«On finit par y penser avec le temps, a-t-il expliqué hier après l'entraînement à Brossard. Ça fait neuf ans que je suis dans cette ligue. Probablement que j'ai déjà joué plus de la moitié de ma carrière. Il me reste moins de temps, et les occasions ne sont pas si nombreuses. Il faut savoir les saisir, parce qu'on ne sait jamais s'il y en aura d'autres.»

Non, ce n'est pas tous les printemps qu'un joueur de la LNH peut rêver de la Coupe Stanley. Mais cette fois, Gorges y pense un peu. Il le reconnaît sans hésiter: l'équipe, l'ambiance en ville, le triomphe rapide en quatre petits matchs contre Tampa Bay au premier tour, tout ça est de nature à nourrir la flamme de l'espoir.

«Quand on est jeune, on croit toujours qu'il y aura d'autres occasions. Mais avec le temps, on réalise que les belles occasions ne se présentent pas à chaque année. Il faut un groupe de joueurs qui est particulier.»

Il prend une petite pause, regarde un peu dans le vestiaire, puis ajoute du même souffle: «J'aime ce groupe-là. Je crois en ce groupe-là. Nous avons le potentiel pour accomplir de grandes choses... Il faut maintenant le faire.»

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Josh Gorges connaît bien Duncan Keith. Les deux hommes se sont croisés dans le monde du hockey junior, alors qu'ils portaient tous deux le maillot du club de Kelowna, lors de la saison 2002-2003.

Les deux amis ont des points en commun. Ils ont à peu près le même âge et font essentiellement le même boulot. Mais Gorges reconnaît qu'il y a comme un petit malaise depuis que le défenseur-vedette des Blackhawks de Chicago a goûté à deux conquêtes de la Coupe Stanley.

Pas une chicane. Pas de mauvais sang. Juste ce genre de petit malaise entre deux compétiteurs qui n'ont pas les mêmes bagues accrochées aux doigts.

«Je connais bien Duncan, on a joué dans les rangs juniors ensemble. Lui, il a gagné la Coupe Stanley deux fois. C'est un ami, alors forcément, on est heureux pour un ami... mais on veut aussi avoir ce que cet ami-là possède! Il y a un peu de jalousie, je ne veux pas trop lui en parler. Mais je lui ai déjà demandé comment c'était de soulever la Coupe. Comment c'était de prendre la Coupe et de l'apporter à la maison...»

C'est un peu de ça dont Josh Gorges a peur : ne pas gagner. Rater son coup. Être de ceux qui, au moment de la retraite, n'auront jamais goûté au champagne du triomphe ultime.

«Il y a tous ces grands joueurs qui n'ont jamais rien gagné durant toute une carrière, des gars qui ont joué pendant 18 ans, et qui n'ont rien. La Coupe Stanley, ce n'est pas un trophée que l'on obtient si facilement.»

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Plus haut, il était question de rêve. D'espoir, en quelque sorte. Du printemps 2010. Bien sûr, nous ne sommes plus en 2010, mais le défenseur de 29 ans trace quand même un parallèle entre cette équipe-là, battue au troisième tour des séries, et cette équipe-ci, qui attend d'entreprendre le deuxième tour contre les Bruins de Boston.

«La plus grande similitude, c'est le groupe, l'esprit de corps. La seule raison qui explique nos succès en 2010, c'est parce qu'on s'était mis à jouer en équipe. Des clubs comme Pittsburgh et Washington avaient plus de talent que nous, mais on a bataillé et on a bataillé... Nous avions 20 gars qui poussaient dans la même direction chaque soir.

«Cette fois, nous sommes encore les négligés. Ça ne nous dérange pas. On comprend. Les Bruins, ils ont été les meilleurs en saison, ils ont gagné le trophée du Président. Ils ont eu du succès en séries lors des dernières années. Ce ne sera pas facile. Nous devrons tout donner pendant sept matchs.»

Quand on lui fait remarquer qu'il prédit déjà une série de sept parties, Josh Gorges se contente de sourire. Les prédictions, ce n'est pas trop son truc, mais il comprend l'ampleur du défi qui les attend, lui et sa bande.

«Je crois qu'il faut s'attendre à une longue série... Il y aura des obstacles sur le chemin», précise-t-il. Avec la sagesse du vétéran qui espère sans rien tenir pour acquis.