Si Alexandre Burrows dit vrai, la Ligue nationale de hockey devrait prendre ses responsabilités et envoyer l'arbitre Stéphane Auger se reposer chez lui pour le reste de la saison, sinon pour toujours.

Une ligue «professionnelle» - dans tous les sens du terme - ne peut tolérer qu'un officiel affiche ouvertement son parti pris contre un joueur ou une équipe, comme l'aurait fait Auger lundi soir en disant à l'attaquant des Canucks de Vancouver qu'il se vengerait de lui, après que Burrows l'eut supposément fait mal paraître lors d'un match antérieur.

Auger, on le sait, a infligé deux punitions éminemment contestables au joueur québécois en troisième période et les Predators de Nashville en ont profité pour vaincre les Canucks, 3-2.

C'est une chose de prévenir un joueur qu'on l'aura à l'oeil; c'en est une autre de lui annoncer à l'avance qu'il va payer, quoi qu'il arrive.

Il y aura toujours une part de subjectivité dans l'arbitrage, comme il y aura toujours, dans le feu de l'action, des erreurs de jugement parfaitement compréhensibles. Mais la LNH ne peut tolérer qu'un officiel laisse son ego dicter ouvertement sa conduite, sous peine de remettre en question l'intégrité même du sport. Un risque qu'une ligue qui se respecte, et qui respecte ses partisans, peut difficilement se permettre.

Je ne suis pas naïf. Les arbitres sont des êtres humains. On peut comprendre qu'ils soient tentés à l'occasion de «passer un message» à un joueur qui les a ridiculisés. Mais si Auger voulait vraiment rendre à Burrows la monnaie de sa pièce, la prudence la plus élémentaire aurait commandé de ne pas le lui dire en toutes lettres, sous le regard des caméras de télévision par-dessus le marché. La vengeance n'est pas seulement un plat qui se mange froid; elle se déguste aussi préférablement en silence.

La colère et la spontanéité de Burrows dans ses commentaires à l'endroit d'Auger laissent peu de doute dans mon esprit quant à la véracité de ses récriminations. Surtout que je ne vois pas comment l'arbitre pourrait justifier sans rire les punitions infligées à Burrows, en particulier celle pour obstruction sur une mise en jeu. À Québec, on a brûlé Kerry Fraser et Andy Van Hellemond en effigie pour moins que ça!

Cela dit, il ne serait pas étonnant que cette affaire se termine en queue de poisson. La preuve circonstancielle favorise Burrows, mais en l'absence de corroboration par un tiers, Colin Campbell aura beau jeu de dire qu'il est impossible de déterminer qui dit vrai entre le joueur et l'arbitre - qui, on doit le présumer, va nier les allégations de Burrows, avec l'appui de son syndicat.

Qu'il soit sanctionné ou non, Auger risque fort de se retrouver sur une voie de garage. Pour les arbitres comme pour les joueurs, les séries éliminatoires sont la vraie saison. Et vous pouvez parier l'allocation de votre petit dernier que Stéphane Auger va les regarder à la télé comme tout le monde.