La défense des Seahawks de Seattle a fini première pour les points accordés, les verges accordées et le nombre de revirements cette saison. Plusieurs facteurs expliquent cette domination, mais deux joueurs de l'unité se sont particulièrement illustrés.

Earl Thomas est actuellement considéré comme le meilleur demi de sûreté de la NFL, et si ce n'est pas le cas, Richard Sherman devrait être considéré comme le meilleur demi de coin. Les deux coéquipiers pourraient cependant difficilement être plus différents, comme on a pu le constater, hier.

«J'étais nerveux avant de venir vous parler aujourd'hui. J'appréhendais de bégayer, mais je suis resté calme, et tout se passe bien», a mentionné Thomas devant la cinquantaine de journalistes réunis à Renton, en banlieue de Seattle, où s'entraînent les Seahawks.

Bien qu'il ne craigne pas d'émettre ses opinions, Thomas est plutôt du type timide. Tout le contraire de Sherman, qui, lui, en irrite plusieurs en raison de sa franchise et de ses propos souvent controversés. Certaines personnes estiment qu'il est une grande gueule en manque d'attention.

Sherman s'est notamment attiré la critique en s'autoproclamant le meilleur demi de coin de la NFL avant le début de la saison. Cela a mené à une guéguerre avec Darrelle Revis, puis à une solide prise de bec avec le commentateur Skip Bayless, du réseau ESPN. Ce dernier a affirmé que Sherman n'était pas dans la même classe que Revis. Sherman a ensuite traité Bayless d'ignorant, de pompeux, d'égocentrique et de crétin...

Sauf que finalement Sherman avait raison. Après deux saisons de huit interceptions d'affilée - même si les quarts évitent de lancer le ballon dans sa direction -, Sherman s'est établi comme le meilleur à sa position. Il a obtenu sa place au Pro Bowl et a été nommé dans l'équipe par excellence de la ligue (All Pro).

Mais ce ne sont pas les accolades qui motivent Sherman. C'est plutôt le fait qu'il n'a été choisi qu'en 5e ronde du repêchage de 2011. Comment un demi de coin de 6'3, qui possède de bonnes mains (il est un ancien receveur), de bonnes habilités en couverture, et qui est diplômé de la prestigieuse Université Stanford ait pu glisser jusqu'au 154e rang? J'ai demandé au demi de coin s'il y comprenait quelque chose, hier.

«C'est en effet extrêmement difficile à comprendre! Tous les jours, je regarde ce que les dépisteurs ont écrit à mon sujet. Que je n'étais pas assez agile, que je n'avais pas de bonnes mains, que je n'étais pas assez instinctif pour être un demi de coin. J'y pense chaque jour», a raconté Sherman.

«On nous conseille souvent de ne pas lire les articles à notre sujet, mais c'est précisément ce que je fais. Je lis les commentaires négatifs et ça me motive encore plus. C'est pour cette raison que les nominations au Pro Bowl et tous les honneurs individuels m'importent peu. Je reste affamé parce que je veux faire mentir tous ceux qui ont douté de moi.»

Selon Thomas, Sherman sait précisément ce qu'il fait lorsqu'il provoque des controverses avec ses déclarations incendiaires.

«Il est extrêmement intelligent. Tout ce qu'il dit, il le dit pour une raison. On se retrouve parfois dans le rôle du vilain, mais il nous a par le fait même permis de recevoir de la publicité», a noté le demi de sûreté, qui a ensuite rappelé qu'on ne parlait presque pas des Seahawks il y a quelques années.

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Ça fait longtemps qu'on n'a pas vu une ligne tertiaire exceller comme le fait celle des Seahawks. Sherman, Thomas, Brandon Browner et Kam Chancellor ont tous été nommés au Pro Bowl à au moins une reprise depuis 2011.

Ces quatre joueurs sont les membres originaux de la fameuse Legion of Boom, mais d'autres jeunes joueurs ont émergé cette saison, dont les demis de coin Byron Maxwell et Walter Thurmond. Les deux premières choses qui distinguent les joueurs de la tertiaire des Seahawks sont leur taille et leur combativité sur le terrain.

«Notre attitude change lorsqu'on revêt notre uniforme. On ne pourrait pas être aussi intenses et agressifs à l'extérieur du terrain, car on se retrouverait en prison!», a d'ailleurs lancé Sherman, hier, déclenchant un fou rire collectif dans la salle.

«De nos jours, dès qu'un receveur échappe une passe, il veut qu'une punition soit décernée, et ça gâche le jeu, selon moi. Les demis défensifs devraient pouvoir être physiques. C'est de cette façon que le football a été inventé et qu'il devrait être joué», croit Sherman.

La tertiaire des Seahawks est imposante et robuste, mais possède évidemment d'autres qualités.

«Ce qui nous distingue, c'est notre préparation d'avant-match pendant la semaine. On respecte l'adversaire en étudiant et en analysant son jeu sous toutes ses coutures», a analysé Sherman.

«C'est évident que coach Carroll (Pete) veut des joueurs imposants, mais je pense qu'on doit d'abord être capable de réussir des jeux-clés. On doit être confiants, sans être arrogants», a renchéri Thomas.

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Si les Seahawks peuvent compter sur autant de demis défensifs de talent, c'est en grande partie parce que plusieurs d'entre eux n'ont toujours pas écoulé leur premier contrat. Ils touchent donc des salaires relativement modestes. Par exemple, celui de Sherman a été d'environ 600 000 $ cette saison.

Sherman, Thomas, Browner et Thurmond pourraient tous obtenir leur autonomie au cours des 14 prochains mois s'ils ne signent pas de nouveaux contrats. Compte tenu du plafond salarial, il est peu probable que les Seahawks parviendront à garder tous les membres de la Legion of Boom à long terme.

C'est l'une des raisons pour lesquelles les Seahawks ne veulent pas gaspiller l'occasion qui se présente à eux, même s'ils forment une jeune équipe. Et Sherman croit qu'un championnat est essentiel afin que la défense des Seahawks puisse laisser sa marque.

«C'est en gagnant un Super Bowl qu'on entre dans la légende, comme les défenses des Steelers de Pittsburgh ou celle des Bears de 1985», a affirmé le demi de coin, il y a quelques jours

Mais avant de penser au Super Bowl, les Seahawks devront d'abord vaincre leurs ennemis jurés, les 49ers de San Francisco, en finale de conférence, dimanche au CenturyLink Field. Un match qui sera âprement disputé et qui devrait être particulièrement intense, d'après Sherman.

«On ne s'aime pas et on ne s'aimera pas de sitôt. Je ne suis même pas sûr qu'il y aura des poignées de main après la rencontre.»