En 1986, Tim Raines s'est révélé le meilleur frappeur de la Ligue nationale grâce à sa moyenne de ,334 et sa moyenne de présences sur les sentiers de ,413. Ses 194 coups sûrs lui ont permis de terminer au troisième rang de la ligue, derrière Tony Gwynn et Steve Sax. Bon moment pour profiter de l'autonomie direz-vous? Détrompez-vous!

Les propriétaires des équipes du Baseball majeur avaient décidé de faire la vie dure aux joueurs autonomes entre les années 1985 et 1987, si bien qu'à l'hiver 1986-87, seuls quatre joueurs autonomes ont signé une nouvelle entente. Mais pas Raines, qui a dû patienter au 2 mai avant de disputer une première rencontre en 1987.

Ce samedi-là, au stade Shea de New York, Raines a épaté la galerie et montré qu'il comptait reprendre là où il avait laissé la saison précédente. Le voltigeur de gauche, inséré au troisième rang du rôle offensif par le gérant Buck Rodgers, a récolté quatre coups sûrs en cinq présences au bâton, dont un grand chelem en début de 10e face à Jesse Orosco, qui a permis aux Expos de vaincre les Mets 11-7.

«Son retour, jumelé à celui de Dennis Martinez - blessé tout le mois d'avril - nous a relancés, a indiqué Rodgers au cours d'un entretien téléphonique avec La Presse canadienne. C'est comme s'il n'avait pas raté un match.»

Quand Raines a rejoint les Expos, l'équipe montrait un dossier de 8-13. Un mois plus tard, elle se retrouvait à 27-23, en plein coeur de la course au titre dans l'Est, avec les Cardinals de St. Louis et les Mets. Ils termineront finalement la campagne avec une fiche de 91-71, alors la deuxième meilleure fiche de l'histoire du club.

Cela a toutefois été insuffisant pour que l'équipe atteigne les séries. Elle a terminé au troisième rang dans l'Est, à quatre matchs des Cards, un de plus que les Mets. Rodgers croit toujours que la perte de Raines a privé les Expos d'une participation aux séries.

«Je pense même que si nous avions pu compter sur «Rock» pour quelques semaines, même pas le mois au complet, nous aurions participé aux séries, a-t-il affirmé. D'être privés de Raines et de Martinez en même temps, ç'a occasionné un manque à gagner offensivement, mais aussi au monticule et en défense. Mais vous savez, c'est le baseball et c'étaient les règles en vigueur à cette époque...

«Tim était le genre de gars que vous pouviez mettre au début du rôle et qui provoquait des choses, poursuit l'ex-gérant qui aura 79 ans en août. Il pouvait soutirer un but sur balles, voler des buts, frapper des coups sûrs. Il frappait avec puissance des deux côtés du marbre. C'était le genre de gars qui vous permettait d'obtenir un bon début de match à chaque jour.»

Rodgers, alors à sa première saison avec les Expos, n'a plus jamais connu les mêmes succès, jusqu'à son congédiement en 1991. Bien qu'il se doutait de quelque chose, Rodgers ne pouvait savoir à l'époque que c'est son propre propriétaire, par association, qui le privait de son meilleur joueur.

«Je ne savais pas ce qui se passait, qu'il y avait collusion en coulisses. C'était bien au-dessus de ma tête! Je savais ce qui se passait sur le terrain et nous en étions tous affectés. C'est une partie de l'histoire du baseball dont personne n'est fier. Mais nous devions passer au travers et apprendre de tout cela.

«Nous parlions beaucoup de la situation entre nous, mais c'était difficile. Il faut aussi dire que bien des équipes étaient privées de bons éléments en raison de cette collusion, alors il n'y avait pas beaucoup d'aide de disponible (pour venir combler nos lacunes). Nous tentions toutefois de nous assurer que lorsqu'il reviendrait au jeu, Tim serait le mieux préparé possible. C'est ce qui s'est produit avec Tim et Dennis: ils sont revenus au jeu et, presque instantanément, ils étaient à 100 pour cent.»

Rodgers s'est dit ravi que Raines soit finalement admis à Cooperstown, où il sera officiellement intronisé ce dimanche. À ses yeux, il y a peu de joueurs qui le méritent plus que lui.

«Tim a connu des moments difficiles au cours de sa carrière, mais il a développé une éthique de travaill irréprochable, s'est rappelé celui qui réside maintenant en banlieue d'Anaheim. Il a toujours travaillé d'arrache-pied, et c'est ce qu'il a fait pour nous cet saison-là: il a tout fait pour rattraper le temps perdu.»

Raines a frappé en lieux sûrs à ses cinq premiers matchs en 1987 et dans 13 de ses 15 premiers. Sa moyenne, après ces 15 rencontres, se chiffrait à ,344/,429/,607. Il a conclu la campagne à ,330/,429/,526, avec 18 circuits, 68 points produits et 50 buts volés.

Sa moyenne au bâton lui a permis de terminer au troisième rang du circuit et, bien qu'il ait raté un mois complet, ses 175 coups sûrs ont constitué le 10e plus haut total de la Nationale. Rodgers a raison: avec Raines un mois de plus, les Expos auraient probablement atteint les séries.