Hugo Houle a reçu un courriel-surprise la semaine dernière. Son directeur sportif lui suggérait d'inscrire une sortie de sept heures à son agenda dominical. Son nom venait d'être ajouté à la sélection d'AG2R La Mondiale pour Milan-San Remo, la première des grandes classiques de la saison. Il se joint donc à David Veilleux, l'autre cycliste québécois qui sera du départ dimanche.

«Le plan initial était que je fasse deux courses en fin de semaine, la classique Loire Atlantique et Cholet-Pays-de-Loire. Je ne m'attendais pas à ça», a réagi Houle, joint au téléphone jeudi à son appartement d'Uriage les Bains, près de Grenoble.

À peine un mois et demi après ses débuts dans sa nouvelle formation, Houle n'a pas mis de temps à tomber dans l'oeil de ses patrons. À 22 ans, il découvrira donc l'un des cinq monuments du cyclisme.

«C'est une chance de faire une course du genre à mon âge, surtout que je suis nouveau dans l'équipe, a-t-il souligné. Je prends ça comme une occasion de prendre de l'expérience, de découvrir un peu c'est quoi, courir 300 kilomètres. Connaître mon corps aussi. C'est un bon repère par rapport aux prochaines grosses classiques.»

Déjà double champion canadien U23 (route et contre-la-montre), Houle a confirmé son potentiel l'an dernier. Deuxième du Tour de Beauce, le cycliste de Sainte-Perpétue a défendu avec succès son titre national au contre-la-montre. Aux Mondiaux U23, il a raté le podium de peu sur route (4e) et a fini 13e à l'épreuve solitaire.

Ironiquement, la mise à l'arrêt inattendue de son équipe, SpiderTech-C10, lui a permis de joindre AG2R, l'une des 19 formations appelées à disputer toutes les épreuves du World Tour.

En décembre, à son retour d'un premier stage en France, Houle a été frappé par un drame. Son frère cadet Pierrick, 19 ans, a été happé à mort par un chauffard, qui a été accusé de délit de fuite mortel et de conduite avec facultés affaiblies ayant causé la mort.

Houle a retardé son retour en Europe, mais a poursuivi son entraînement sur rouleau. À son grand étonnement, sa forme n'en a pas trop souffert. Sa 29e place aux Trois Jours de Flandre-Occidentale, au début du mois, l'en a convaincu. «L'an dernier, j'étais limite, je n'avais pas fini. Cette année, je roulais à l'avant, ça allait bien.»

Il a réussi à maintenir son poids à 71 kg durant l'intersaison, ce qui contribue à ses bonnes sensations, évalue-t-il. «Je suis pas mal de retour où j'en étais à la fin de la dernière saison.»

Dimanche, Houle aura pour seuls objectifs d'acquérir de l'expérience et de comprendre la dynamique de course de la Primavera, présentée pour la première fois en 1907.

Un virus

David Veilleux, lui, savait depuis plus d'un mois que son nom figurerait sur la liste des partants d'Europcar. L'expérience acquise au cours des dernières années lui permet d'aborder l'épreuve avec sérénité. «Oui, la course est longue, mais elle l'est pour tout le monde», a fait valoir l'athlète de 25 ans, joint en Gérone, en Espagne.

Son souci est plutôt un virus qui l'a tenu loin de son vélo pendant «quatre-cinq jours» la semaine dernière. Il s'est repris jeudi avec un entraînement solo de six heures. «Ma préparation a été un peu déséquilibrée, a-t-il constaté. Il va peut-être m'en manquer un peu, mais mon travail n'est pas tant dans le final que dans l'approche. Mon d'objectif sera d'aider des coéquipiers comme Thomas (Voeckler) ou Vincent Jérôme à bien se placer au pied des montées.»

Fait à noter, Veilleux et Houle partagent le même entraîneur, Pierre Hutsebaut. Ce dernier ne cache pas sa fierté. «C'est un honneur qu'ils aient été choisis, surtout pour Hugo, qui est dans une grosse équipe avec une trentaine de coureurs», a-t-il souligné.

Hutsebaut souhaite que ses deux protégés puissent franchir la Cipressa (275e km) dans le premier groupe. «Ce serait déjà formidable. Milan-San Remo est une course très nerveuse. Il faut la faire plusieurs fois avant de pouvoir s'y illustrer. Pour les Italiens, c'est comme un championnat du monde.»

Milan-San Remo sera diffusé en direct sur RDS2 à partir de 9 h 30.