Depuis une vingtaine d'années, Sylvain Tremblay réinvente le moulin à poivre avec un imaginaire débridé. Sa dernière collection témoigne de tout l'effet qu'a eu sur lui la récente exposition portant sur le joaillier des tsars, Karl Fabergé, à Montréal.

À l'instar des quelque 150 000 visiteurs qui ont admiré l'été dernier au Musée des beaux-arts de Montréal les oeuvres de Fabergé, le célèbre orfèvre russe qui créa des oeufs décoratifs pour la famille impériale au tournant du XXe siècle, l'artiste Sylvain Tremblay en est ressorti ému, voire un petit peu transformé.

La finesse des précieux objets observés a eu une si forte impression sur le créateur de 58 ans, qui s'ingénie depuis deux décennies à réinventer la base formelle du moulin à poivre, qu'il a engendré une nouvelle collection à la forme ovoïde aussi épurée qu'ouvragée, reposant essentiellement sur une alternance du merisier, de l'érable et du wengé.

«Partout dans le monde, le moulin à poivre ressemble à un poteau de galerie et je n'ai jamais compris pourquoi», constate-t-il. Avec plus d'une centaine de formes à son actif, il a certes fait la preuve que sa silhouette classique est loin d'être la seule à servir sa fonction.

Qu'ils soient abstraits ou en forme de sardine, de pingouin ou de tour Eiffel, les créations uniques de l'ébéniste sont toutes articulées autour d'un mécanisme en inox américain garanti à vie. «Comme je suis un artiste et non un avocat, j'ai cherché la meilleure technologie qui existe et jamais je n'ai eu à la remplacer.»

Une matière privilégiée

Si la forme est primordiale dans le processus créatif de l'artisan de Saint-Colomban, la matière - surtout du bois, mais aussi de la résine, du métal et même la fourrure - l'est tout autant. Cependant, la loupe d'érable, une excroissance qui produit un bois noble au grain riche et tortueux vendu chèrement à la livre, s'inscrit de plus en plus comme matériau privilégié. «J'en ai déjà eu une de 2,75 m de diamètre qui pesait 4500 kg. Tout un bétail!», se souvient-il.

Contrairement aux temps anciens où le poivre servait de monnaie d'échange - d'où l'expression «payer en espèces (épices)» - il faut débourser de 60 à 150 $ pour détenir l'une de ses pièces uniques, ce qui est peu en comparaison des 35 millions estimés pour un seul oeuf produit par Karl Fabergé!

____________________________________

Sylvain Tremblay sera au Salon des métiers d'art de Montréal du 5 au 21 décembre.

peppermilltremblay.com

PHOTO FOURNIE PAR SYLVAIN TREMBLAY

Sylvain Tremblay