La Corée du Nord a annoncé samedi qu'elle était «en état de guerre» avec le Sud, une nouvelle menace prise au sérieux par Washington, Moscou, Berlin et Paris mais minimisée par Séoul.

«À partir de maintenant, les relations inter-coréennes sont en état de guerre et toutes les questions entre les deux Corées seront traitées selon un protocole de temps de guerre», a déclaré la Corée du Nord dans un communiqué commun attribué à tous les corps du gouvernement et institutions.

«La situation prévalant de longue date selon laquelle la péninsule coréenne n'est ni en guerre ni en paix est terminée», indique le communiqué diffusé par l'agence de presse officielle nord-coréenne KCNA.

L'annonce de Pyongyang constitue la dernière en date d'une série de menaces du Nord. Les États-Unis ont aussitôt déclaré qu'ils prenaient ces nouvelles menaces «au sérieux».

«Nous avons vu les informations sur un nouveau communiqué non constructif de la Corée du Nord. Nous prenons ces menaces au sérieux et restons en relations étroites avec notre allié sud-coréen», a déclaré Caitlin Hayden, porte-parole du Conseil national de sécurité.

«Nous voudrions aussi noter que la Corée du Nord a une longue histoire de rhétorique belliqueuse et de menaces et que l'annonce d'aujourd'hui est conforme à un schéma familier», a déclaré Mme Hayden, ajoutant que les États-Unis étaient parfaitement capables de se protéger et de protéger leurs alliés en Asie.

«Nous continuons à prendre des mesures additionnelles contre la menace nord-coréenne, dont fait partie notre plan pour augmenter le nombre des avions d'interception basés sur le sol américain ainsi que les radars d'avertissement et de dépistage», a-t-elle dit.

Le ministre allemand des Affaires étrangères Guido Westerwelle a appelé samedi la Corée du Nord à «cesser de jouer avec le feu», «un jeu irresponsable», dans une tribune au journal Bild.

«Même si les images et les paroles qui nous viennent de Corée du Nord semblent sorties d'une autre époque, elles constituent une menace sérieuse pour la paix dans toute la région», estime le ministre qui se déclare «très inquiet».

La France a également appelé samedi la Corée du Nord à «s'abstenir de toute nouvelle provocation» et est «vivement préoccupée», a déclaré le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Philippe Lalliot.

Paris «demande instamment à la Corée du Nord de s'abstenir de toute nouvelle provocation, de remplir ses obligations internationales, notamment dans le cadre des résolutions pertinentes des Nations unies et de reprendre rapidement le chemin du dialogue».

Pyongyang a par ailleurs menacé samedi de fermer le complexe industriel de Kaesong, une zone de coopération économique et industrielle entre les deux Corées, a annoncé KCNA.

«Nous fermerons sans hésiter le site industriel si la Corée du Sud essaie d'atteindre notre dignité, même de façon légère», ont averti les autorités citées par KCNA.

La zone industrielle implantée à dix kilomètres à l'intérieur de la Corée du Nord a été inaugurée en 2004 dans une volonté symbolique d'établir une coopération entre les deux Corées et représente un apport crucial de devises pour Pyongyang.

Les deux Corées sont toujours techniquement en guerre puisque la Guerre de Corée de 1950-53 s'est terminée par un armistice et non par un traité de paix.

Le Nord avait annoncé plus tôt ce mois-ci qu'il annulait l'armistice et les autres traités bilatéraux de paix signés avec Séoul pour protester contre les exercices militaires conjoints de la Corée du Sud et des États-Unis.

«Ce n'est pas vraiment une nouvelle menace - seulement un élément dans une série de menaces de provocation», a réagi le ministère de l'Unification sud-coréen dans un communiqué.

Le ministère de la Défense du Sud a ajouté qu'aucun mouvement de troupe particulier n'avait été observé près des frontières.

Selon les observateurs, ce n'est pas la première fois que la Corée du Nord annonce la fin de l'armistice.

Le communiqué du Nord avertit aussi que toute provocation militaire près des frontières terrestres ou maritimes entre le Nord et le Sud de la Corée entraînerait «une guerre totale et un conflit nucléaire».

La plupart des experts estiment que ces menaces sont pure rhétorique et qu'elles n'annoncent pas un affrontement concret, mais que tout léger dérapage pourrait entraîner potentiellement une escalade rapide.

La Chine et la Russie ont demandé toutes les deux vendredi aux parties de coopérer pour prévenir une dégradation de la situation, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov exprimant une inquiétude particulière.

«Nous pouvons perdre le contrôle de la situation, elle s'engage dans la spirale d'un cercle vicieux», a déclaré M. Lavrov.

Samedi, la Russie a de nouveau exprimé son inquiétude, appelant les deux Corées et les États-Unis à faire preuve d'une «responsabilité et d'une retenue maximales».

«Nous attendons des deux camps qu'ils exercent une responsabilité et une retenue maximales et que personne ne franchisse le point de non-retour», a dit Grigori Logvinov, responsable russe chargé de la Corée au ministère des Affaires étrangères.

Ces avertissements interviennent après l'ordre donné vendredi par le dirigeant de la Corée du Nord, Kim Jong-Un, de lancer des préparatifs en vue de frappes de missiles visant le continent américain et les bases des États-Unis dans l'océan Pacifique, en réponse à des vols d'entraînement de bombardiers furtifs B-2 américains.

Le secrétaire d'État américain à la Défense Chuck Hagel avait souligné que Washington ne se laisserait pas intimider par les menaces de Pyongyang et était prêt à faire face «à toute éventualité».

Depuis début mars et l'adoption de nouvelles sanctions par l'ONU à l'égard de Pyongyang après un 3e test nucléaire, la Corée du Nord a menacé régulièrement Séoul et Washington de «frappes stratégiques» et de «guerre totale».