Après 20 mois de négociations, les États-Unis et leurs partenaires ont conclu un accord historique sur le nucléaire iranien privant Téhéran de la capacité de produire en moins d'un an assez d'uranium enrichi pour fabriquer une bombe atomique. En retour, l'Iran obtiendra la levée graduelle des sanctions.

«Cet accord n'est pas fondé sur la confiance. Il est fondé sur les vérifications. Les inspecteurs auront un accès 24 heures sur 24 aux installations nucléaires iraniennes clés», a déclaré Barack Obama ce matin, tout en rappelant qu'il n'excluait pas d'«utiliser la force» si l'Iran ne respectait pas ses engagements.

Le président américain a également promis d'opposer son veto à tout projet de loi du Congrès américain visant à empêcher la mise en oeuvre de l'entente. Celle-ci ne représente pas seulement un tournant dans les relations diplomatiques entre les États-Unis et l'Iran, troisième et plus important pays après Cuba et Myanmar avec lequel Obama a choisi de tenter un rapprochement après des années d'hostilité.

Elle aura également des conséquences majeures sur les relations entre les États-Unis et Israël, dont le premier ministre, Benjamin Nétanyahou, a qualifié l'entente d'«erreur historique». Au cours des derniers jours, il a affirmé que l'Iran avait pour objectif «de conquérir le monde». La levée des sanctions, qui libérera notamment, à terme, près de 150 milliards de dollars gelés à l'étranger, fait partie de ses inquiétudes les plus vives, qui sont partagées par les monarchies sunnites du Golfe.

L'entente négociée entre le P-6 (les États-Unis, la France, la Grande-Bretagne, la Chine, la Russie et l'Allemagne) et l'Iran n'est pas un traité légalement contraignant mais un accord politique qui n'a pas à être approuvé par le Congrès américain. Il devrait néanmoins occuper une place importante dans la campagne présidentielle américaine.

Un exemple du débat à venir : hier, lors de l'annonce officielle de sa candidature présidentielle, le gouverneur du Wisconsin Scott Walker a promis de mettre aux rebuts cette entente dès son premier jour à la Maison-Blanche. Il sera intéressant de voir comment Hillary Clinton se positionnera (N.B. : la candidate démocrate a signalé son appui à l'accord).

Sur la foi des explications de diplomates français, Le Monde a résumé ainsi les grandes lignes de l'accord :

Limiter l'enrichissement d'uranium

L'objectif principal est de mettre en place de sévères restrictions pour garantir que le break-out, le temps nécessaire pour produire assez d'uranium enrichi permettant de fabriquer une arme atomique, soit d'au moins un an pendant une durée de dix ans.

Limiter la production de plutonium

Le plutonium est, avec l'uranium, l'autre matière fissile qui peut être utilisée en vue de la fabrication d'une bombe atomique. L'accord de Vienne stipule que le réacteur de la centrale à eau lourde d'Arak sera modifié pour ne pas pouvoir produire du plutonium à vocation militaire.

Renforcer les inspections

C'était l'un des points les plus délicats de la négociation. Un régime renforcé d'inspections sera appliqué pendant toute la durée de l'accord, et même au-delà pour certaines activités. L'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) pourra ainsi vérifier pendant vingt ans le parc de centrifugeuses et pendant vingt-cinq ans la production de concentré d'uranium («yellow cake»). L'Iran s'engage à mettre en oeuvre, puis à ratifier, le protocole additionnel de l'AIEA, qui permet des inspections intrusives.



Lever les sanctions

L'objectif majeur des Iraniens était d'obtenir la levée des multiples sanctions (de l'ONU, des Etats-Unis et de l'Europe) qui freinent le développement du pays. Les sanctions adoptées par l'UE et les Etats-Unis visant les secteurs de la finance, de l'énergie et du transport iranien seront levées dès la mise en oeuvre par l'Iran de ses engagements, attestée par un rapport de l'AIEA. Cela devrait intervenir début 2016. La même procédure sera suivie pour lever les six résolutions adoptées par le Conseil de sécurité des Nations unies contre l'Iran depuis 2006.

Maintenir l'embargo sur les armes



Les sanctions relatives aux missiles balistiques et aux importations d'armes offensives sont maintenues. Le transfert de matériels sensibles pouvant contribuer au programme balistique iranien sera interdit pendant huit ans, sauf autorisation explicite du Conseil de sécurité de l'ONU.