Plusieurs observateurs attribuent la dégringolade de Ben Carson dans les sondages à une de ses réponses sur le conflit syrien lors du quatrième débat des primaires républicaines pour la présidence. Le neurochirurgien à la retraite avait alors confirmé son ignorance des questions internationales en affirmant que des soldats chinois étaient présents dans le pays de Bachar al-Assad.

Reste à savoir maintenant comment les électeurs républicains réagiront à une manifestation spectaculaire de l'ignorance de Donald Trump concernant une des responsabilités les plus importantes d'un président, à savoir la gestion de l'arsenal nucléaire des États-Unis. Hier soir à Las Vegas, lors du cinquième débat républicain, le journaliste conservateur Hugh Hewitt a demandé au milliardaire quelle était sa priorité concernant la triade nucléaire américaine.

(Comme vous ne briguez pas la présidence, vous ne savez peut-être pas que la triade nucléaire américaine se constitue de missiles intercontinentaux, sous-marins et bombardiers stratégiques, comme s'est plu à le rappeler Marco Rubio dans la vidéo qui coiffe ce billet).

Trump a offert une réponse digne de Sarah Palin. Je la cite dans le texte, car sa traduction risquerait de la rendre encore plus incohérente :

Well, first of all, I think we need somebody absolutely that we can trust, who is totally responsible; who really knows what he or she is doing. That is so powerful and so important. And one of the things that I'm frankly most proud of is that in 2003, 2004, I was totally against going into Iraq because you're going to destabilize the Middle East. I called it. I called it very strongly. And it was very important.

But we have to be extremely vigilant and extremely careful when it comes to nuclear. Nuclear changes the whole ball game. Frankly, I would have said get out of Syria; get out - if we didn't have the power of weaponry today. The power is so massive that we can't just leave areas that 50 years ago or 75 years ago we wouldn't care. It was hand-to-hand combat.

The biggest problem this world has today is not President Obama with global warming, which is inconceivable, this is what he's saying. The biggest problem we have is nuclear - nuclear proliferation and having some maniac, having some madman go out and get a nuclear weapon. That's in my opinion, that is the single biggest problem that our country faces right now.

Après le débat, certains analystes ont affirmé que Trump faisait partie des gagnants de la soirée parce qu'il n'avait pas été trop écorché par ceux qui ont osé l'attaquer (Jeb Bush et Rand Paul). Ils ont retenu comme un de ses moments forts sa réplique à ceux qui ont critiqué son idée de cibler les familles de terroristes pour dissuader ceux-ci de frapper les États-Unis. «Donc, ils peuvent nous tuer, mais nous ne pouvons pas les tuer?» a-t-il demandé.

Et l'on voudrait confier l'arsenal nucléaire américain à cet homme?

Le débat d'hier soir a été aussi marqué par deux affrontements qui se sont déclinés en plusieurs thèmes. Le premier mettait aux prises Trump et Bush, qui a fourni sa performance la plus combative. «Donald est très fort pour les formules toutes faites mais il est le candidat du chaos et il serait un président du chaos», a notamment déclaré l'ancien gouverneur de Floride au cours d'un de ses échanges avec Trump.

«Vous ne pouvez pas accéder à la présidence en insultant tout le monde», a également déclaré Bush.

Pour Bush, cette performance arrive cependant peut-être trop tard.

L'autre affrontement a eu lieu entre Ted Cruz et Marco Rubio, qui ont présenté des positions divergentes sur la politique étrangère, les programmes de surveillance et l'immigration. Comme d'habitude, le sénateur de Floride a impressionné par son assurance et son éloquence. Il sera cependant intéressant de voir si Cruz a marqué des points auprès des républicains en rappelant que son collègue avait fait équipe avec le sénateur démocrate de New York Chuck Schumer, figure honnie des conservateurs, pour réformer le système d'immigration.

Chris Christie a également bien fait, répétant à plusieurs reprises le mot le plus populaire du débat d'hier soir : «sûr» (safe). Comme tous les participants à ce débat axé sur la sécurité nationale et survenant 13 jours après la tuerie de San Bernardino, le gouverneur du New Jersey s'est présenté comme la personne la plus apte à protéger les Américains contre la menace terroriste.

Quant à Carson, il a probablement fourni la pire performance de la soirée. Après s'être plaint de ne pas avoir assez de temps pour parler, il a refusé de répondre à une question portant sur sa réaction à des propos qu'il venait d'entendre.