D'ici à la fin du siècle, le niveau de la mer montera de 80 à 150 cm. Mais il s'agit d'une moyenne. En Louisiane, la montée des eaux pourrait dépasser 5 m alors que, en Arctique, le niveau de la mer sera fort probablement moins élevé en 2100 que maintenant.

«Le niveau moyen de la mer augmente, mais seulement dans l'absolu», explique Jeff Williams, géologue à la Commission géologique des États-Unis, en entrevue au congrès de l'Association américaine pour l'avancement de la science à Washington. «Il faut tenir compte du comportement des côtes et aussi des courants marins. À certains endroits, les continents sont en train de couler par eux-mêmes, alors qu'à d'autres, ils se relèvent. Et les courants peuvent provoquer des accumulations d'eau plus ou moins temporaires à certains endroits.»

Le comportement des continents est généralement lié aux glaciations. «Quand une glaciation se termine, les terres qui ont été écrasées par les glaciers se relèvent, dit M. Williams. Après un certain temps, elles cessent de monter et redescendent, comme une balle qu'on a lancée par terre rebondit puis retombe. Dans les régions où la glaciation est terminée depuis peu, comme dans le nord de l'Amérique du Nord, les terres sont encore en train de remonter.»

Depuis 50 ans, le niveau de la mer a monté de 2 mm par année en moyenne sur la planète. Mais ce rythme s'accélère et atteint maintenant 3 mm. «En Louisiane, on en est à 1 cm par année compte tenu de l'affaissement des terres et des changements climatiques, dit M. Williams. Dans le sud du Canada, les terres remontent encore, alors vous êtes un peu en dessous de la moyenne mondiale.»

L'érosion en Arctique

Les côtes arctiques ne seront pas nécessairement protégées par la montée des terres. «Les glaces protégeaient les côtes contre les tempêtes. Il y aura plus d'érosion quand l'Arctique sera complètement libre de glace, en 2050. Des villages en Alaska ont déjà été évacués à cause de l'augmentation de l'érosion.» Parmi les autres effets indirects, les estuaires salés pénétreront plus avant dans les fleuves, ce qui perturbera les écosystèmes.

Le géologue américain estime que les efforts actuels de limitation des émissions de gaz à effet de serre ne permettront pas d'échapper aux effets à court terme de la hausse du niveau de la mer. «Il faut penser à s'adapter. Les Néerlandais ont de formidables leçons à nous donner parce qu'ils combattent la mer depuis des siècles. Mais ils se sont récemment rendu compte que de refaçonner des côtes a eu des conséquences écologiques catastrophiques. Et leurs solutions sont très coûteuses et donc inadaptées aux pays pauvres ou aux régions moins densément peuplées.»

Certains commentateurs ont récemment avancé que les «réfugiés climatiques» pourraient être moins nombreux que prévu parce qu'ils proviendront de régions qui connaissent déjà une forte émigration, par exemple le Bangladesh. «Il faut tenir compte de ce phénomène, mais je crois que, idéalement, personne ne devrait avoir à déménager à cause des changements climatiques», dit M. Williams.