Comment rendre plus « populaire » le don politique ? En assurant tout d’abord sa confidentialité, estime l’auteur de cette lettre, ancien ministre du Parti libéral.

Notre mode de financement des partis politiques a plusieurs qualités, mais, comme toute chose, il est perfectible tant du point de vue des intérêts des citoyens désirant appuyer une cause politique par un don que de celui de la classe politique pour qui la sollicitation constitue aujourd’hui une tâche pénible et à haut risque.

Une première source de progrès vers la démocratisation du don politique serait de le rendre confidentiel en maintenant bien entendu un plafond semblable à celui que nous connaissons aujourd’hui. Ceux pour qui c’est important (ou même utile !) d’afficher leur engagement partisan pourront toujours le faire individuellement, mais il faut en premier lieu assurer la confidentialité pour tous du don populaire de la même façon que nous nous assurons de la confidentialité du vote, une pratique évidente aujourd’hui, mais qui a pris des siècles à s’instaurer au sein des démocraties.

Des juristes affirment en effet que le don à une organisation politique devrait être reconnu comme un droit fondamental. Si c’est le cas, autant faciliter son exercice et le rendre accessible au plus grand nombre.

Pourtant, de très nombreuses personnes se privent aujourd’hui d’appuyer un parti politique même quand elles en ont la capacité financière et l’envie. Elles ne désirent tout simplement pas que leur préférence soit révélée publiquement pour des raisons très compréhensibles, surtout à une époque comme la nôtre où un climat de suspicion entoure tout ce qui est politique.

Le droit au don politique constitue donc pour plusieurs un droit formel plus que réel. Assurer la confidentialité du don changerait totalement leur perspective, mais aussi celle des solliciteurs qui n’ont pas à pouvoir distinguer les citoyens sur cette base. Le directeur des élections serait bien entendu chargé de consigner ces dons et continuerait de rendre publiques les sommes accumulées par chaque parti, mais ces derniers ne pourraient plus identifier de façon nominative leur donateur, ce qui, à bien y penser, constitue une forme d’archaïsme dans le contexte des autres normes que nous nous donnons en la matière. Cela rendrait nécessairement le don politique beaucoup plus inclusif qu’aujourd’hui.

Je n’ose pas imaginer le nombre de personnes qui lisent ces lignes en ce moment et qui se voient bénéficier d’une telle assurance de confidentialité ! La démocratie n’a rien à y perdre tant que nous continuons de limiter la hauteur des dons possibles afin de rendre ceux-ci accessibles au plus grand nombre.

Comment continuer à prétendre qu’untel attend un quelconque retour d’ascenseur si son don reste totalement confidentiel ?

D’autres changements sont envisageables afin d’améliorer la portion publique du financement des partis politiques au Québec et de le rendre plus égalitaire. Ces changements devront aussi se faire dans une même perspective d’égalité et d’inclusivité citoyenne, car ce sont des valeurs fondamentales à la vie démocratique.

Mais pour mettre en place tout changement en la matière, la classe politique aura besoin de discipline et d’alliés. Ces derniers seront peu nombreux au sein des milieux médiatiques qui aiment bien pouvoir accéder à des informations nominatives du genre, au risque parfois de nuire à des réputations. Les prêcheurs de « transparence » sont légion de nos jours, même si les principes sur lesquels ils s’appuient en matière de financement des partis politiques n’ont simplement plus, à mon avis, leur raison d’être.

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