Réaliser une bande-annonce de film est un art en soi. En plus de donner envie aux cinéphiles de voir le long métrage, sans tout révéler pour autant, elle doit établir une ambiance, une signature. Chaque semaine, durant le prochain mois, des réalisateurs québécois nous présenteront leur préférée.

Pourquoi est-ce votre préférée ?

C'est une oeuvre en soi, pas juste un objet promotionnel. En la voyant, j'ai retrouvé le plaisir que j'avais à regarder des courts métrages ou des vidéoclips, il y a 15 ou 20 ans. La conception sonore est réfléchie. On sent qu'elle n'est pas conçue pour être séduisante, mais efficace artistiquement. Aussi, la bande-annonce n'a pas de trame narrative : elle ne raconte pas le synopsis court du film, et encore moins le synopsis long comme on voit trop souvent. Ça prend beaucoup d'imagination pour deviner ce que sera le film [de Darren Aronofsky]. La bande-annonce dégage surtout une émotion inquiétante. On aperçoit des personnages torturés, dont on découvrira la vraie nature seulement durant le film. En plus, on dirait que les images n'ont pas été puisées à même le film. C'est comme si on avait filmé quelque chose uniquement pour la bande-annonce.

Montez-vous les bandes-annonces de vos films ?

Je m'en suis occupé pour quatre films que j'ai produits avec mon argent. Les bandes-annonces ne servaient pas nécessairement à vendre des billets, mais elles étaient au service du propos. Ce sont de petits poèmes visuels de 60 à 90 secondes, qui ne racontaient pas trop l'histoire. Ce n'est pas étranger à mon intérêt pour celle de Mother !, qui est une petite oeuvre d'art.

Que pensez-vous des bandes-annonces de Camion et de Gurov et Anna ?

Celle de Gurov et Anna a été faite par le distributeur. C'est tellement loin de ce que je voulais faire... J'ai suivi leur travail, j'ai exigé quelques corrections et apporté des nuances à gauche et à droite, mais j'aurais dû me battre davantage. Pour Camion, j'ai demandé à la monteuse Élisabeth Tremblay de me proposer une première mouture. Quand je me suis assis dans sa salle de montage, j'ai été pas mal séduit. La bande-annonce représente bien le film, son environnement sonore et ses personnages, sans vendre de punch. J'aime beaucoup qu'il n'y ait pas de narration. Ça nous force à créer quelque chose d'original qui repose sur les éléments à notre disposition, les images et le son.

Image tirée de l'affiche du film Mother!

Jennifer Lawrence dans Mother!