Grandir trop vite dans la violence latente d'une banlieue déshéritée, bombardée par des modèles féminins ultra-sexués, Fish Tank, dévoilé jeudi en compétition au 62e Festival de Cannes, restitue avec intensité la rébellion d'une adolescente face au monde d'aujourd'hui.

Découverte il y a trois ans à Cannes où son premier film, Red Road, avait reçu le Prix du jury, la Britannique Andrea Arnold revient avec cette belle chronique sociale, où éclate une comédienne débutante de 17 ans, Katie Jarvis.

«Elle a pris un agent, je pense qu'elle va continuer le métier d'actrice, je l'espère en tout cas», a dit la réalisatrice dans un entretien à l'AFP.

Insultes, coups de tête et fronde permanente : à quinze ans, Mia (Katie Jarvis) ne va plus à l'école, traînant sa rage et son ennui dans l'appartement exigu où elle vit avec sa mère et sa petite soeur.

Comme l'herbe des terrains vagues, Mia grandit sans soins et n'en fait qu'à sa tête, se heurtant à une mère immature (Kierston Wareing) davantage portée sur la fête, la boisson et la séduction, que sur l'éducation de ses filles.

En butte à l'hostilité des filles de son âge, elle est bientôt troublée par Connor - Michael Fassbender, très remarqué dans Hunger présenté à Cannes l'an dernier, ici remarquable d'ambiguïté -, le petit ami de sa mère.

Grande admiratrice du film Rosetta des frères Dardenne - présenté à Cannes en 1999 - Andrea Arnold signe là, à son tour, le portrait sensible d'une gamine grandie trop vite, qui se débat dans un milieu défavorisé.

«La vie est ce qu'elle est, beaucoup de gens doivent lutter chaque jour, mais je ne trouve pas cela triste, il y a simplement des hauts et des bas. J'ai grandi dans ce monde-là, je le connais bien, c'est celui qui me vient à l'esprit quand j'écris», dit Andrea Arnold.

Avec son horizon bouché par des barres d'immeubles, Fish Tank (L'aquarium), dépeint le sentiment d'enfermement lié à l'exclusion sociale.

Toujours en mouvement, la caméra nerveuse d'Andrea Arnold suit pas à pas l'adolescente, enregistrant la rumeur agressive du monde extérieur dans une bande-son discrètement bourdonnante, qui intègre bruits et voix parasites.

Mia encaisse la violence des institutions, celle de sa mère qui la confine dans sa chambre lorsqu'elle reçoit des amis, celle aussi des modèles sexuels imposés aux filles dès l'enfance, via notamment les vidéo-clips de musique hip hop diffusés à la télé.

«Ces images sont partout, via les médias, la télévision, internet, et les fillettes en arrivent à chanter des chansons dont elles ne comprennent même pas le sens sexuel», dit-elle.