Après trois courts et un long métrages, le cinéaste Guy Édoin plonge dans le documentaire avec Corno, film sur la peintre saguenéenne qui vit au rythme de New York depuis plus de 20 ans. Un sujet «lumineux» que le réalisateur a abordé sans compromis.

Scénariste de métier, Guy Édoin a tout de suite vu dans la vie de la peintre Corno une histoire à raconter. Ce n'était pas pour autant un conte de fées.

C'est ce que le cinéaste s'emploie à expliquer dans un documentaire nuancé qu'il consacre à cette artiste.

D'aucuns pourraient énumérer quelques éléments biographiques de la carrière de la peintre. Originaire de Chicoutimi, elle fait sa marque avec ses grands tableaux de corps dénudés. Installée à Montréal, Johanne Corneau s'y sent tout de même à l'étroit. Au début des années 90, elle s'installe à New York, mange son pain noir, mais vit de sa peinture. Aujourd'hui, ses grandes fresques de visages féminins sont reconnaissables de par le monde.

Mais pour plusieurs, Corno fait une peinture commerciale et tarde à se renouveler. Ce que Guy Édoin signale aussi dans ce film biographique.

«Je demeurais très libre dans ce projet, dit-il. Ce n'était pas une infopub. J'avais le désir de faire une radiographie du réel et toute la liberté de le faire.»

Le projet lui a permis de sortir de sa zone de confort. «Je faisais la tournée des festivals avec Marécages, qui est un film sombre et assez dur. Et là, je me retrouvais avec un sujet super lumineux. Ça me permettait d'explorer autre chose, même dans la forme cinématographique», dit le cinéaste.

Derrière les toiles flamboyantes de Corno se cache une face qui se trouve au coeur du documentaire. «Corno est un être paradoxal, dit Édoin. Et explorer ce paradoxe est ce qui m'a intéressé dès le départ. Elle a cette force surhumaine de caractère qui cohabite avec une fêlure, une fragilité. Ce que j'ai trouvé de plus beau dans mon travail est cette métamorphose de Johanne Corneau en Corno. Johanne arrive au studio en talons aiguilles et manteau de designer, elle rentre dans sa salle de bains, met sa combinaison de travail et devient une peintre. Même physiquement, elle change. «

S'apprivoiser

Le film s'est construit par petites touches. Protégeant son intimité, Corno s'est lentement abandonnée à l'équipe du film. «Ça nous a pris plusieurs blocs de tournage avant qu'elle se livre, probablement comme elle ne l'avait jamais fait dans la vie, assure le cinéaste. Au début par exemple, elle ne voulait pas qu'on la filme en train de peindre. Nous y sommes allés lentement. Même chose avec certains sujets abordés dans le film. «

Le résultat ne laisse pas voir ces aspérités dans ce travail en amont. Édoin propose un film avec un bon équilibre entre images et paroles. Et ratisse assez large autour de la peintre pour obtenir des commentaires sur elle et sur son travail.

«L'engagement de cette femme par rapport à son art est admirable. C'est très inspirant», conclut-il.

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Après sa projection en première mondiale ce samedi au FIFA, le film sort en salles le 29 mars.