Évidemment personne n'est contre la vertu. Les méfaits de la pollution automobile sont bien documentés et reconnus de tous, y compris par l'industrie. Il y a urgence d'agir, mais le plan vert du gouvernement Harper n'est que poudre aux yeux. Ce qu'il donne d'une main, il la reprend de l'autre.

Évidemment personne n'est contre la vertu. Les méfaits de la pollution automobile sont bien documentés et reconnus de tous, y compris par l'industrie. Il y a urgence d'agir, mais le plan vert du gouvernement Harper n'est que poudre aux yeux. Ce qu'il donne d'une main, il la reprend de l'autre.

Dans son énoncé, le gouvernement sous-entend que l'objectif de cette mesure fiscale est de parvenir à une utilisation de l'énergie plus efficace et plus responsable. Alors comment expliquer, par exemple, l'absence des camionnettes dans son scénario? Totalement aberrant. Pour vous en convaincre, sachez qu'une camionnette F150 émet en moyenne 6708 kilogrammes de CO2 par année, c'est-à-dire l'équivalent de deux Yaris Où est le bâton et surtout en quoi la qualité de l'air que nous respirons sera améliorée si je vous dis que l'année dernière il s'est écoulé 72 218 camionnettes de série F au pays contre 34 202 Yaris? Pas la peine de sortie vos calculettes, cette statistique parle d'elle-même. En fait, même si nous faisions la somme des unités vendues de véhicules «verts» admissibles à une remise, nous n'atteindrions pas le cinquième des ventes totales de camionnettes au pays. Une chose est sûre, nous pouvons entendre d'ici le soupir de soulagement des Prairies, très avides de ces chariots de l'Ouest. Conséquemment il faut mettre un gros bémol sur les déclarations de l'analyste Dennis Desrosiers qui prétendait la semaine dernière que l'industrie automobile américaine serait la plus durement touchée. On aimerait savoir en quoi? La camionnette, le château fort des trois grands, a été épargnée et les marges bénéficiaires des gros utilitaires ont toujours été bien grasses, ne l'oublions pas.

Politiquement correct, le gouvernement fédéral préfère taper sur les gros utilitaires dont les ventes sont déjà en chute libre et les automobiles diffusées au compte-gouttes. À quoi bon faire payer 4000 $ de plus à une douzaine d'acheteurs de BMW M6? Coup d'épée dans l'eau si ce n'est que le montant récupéré par le gouvernement lui permettra de financer les primes accordées aux 21 véhicules recensés dans ce programme. Véhicules à poly-carburant inclus. Au fait, on se les procure où ce poly-carburant?

Parmi les mesures adoptées on note également que les véhicules d'occasion ne sont pas assujettis à ce programme, mais seulement s'ils ont été achetés au Canada. En fait, contrairement à ce que certains analystes ont prétendu la semaine dernière, si vous vous procurez un Hummer H2 aux États-Unis et que vous l'importiez au pays, alors là, la taxe s'applique. Doit-on comprendre que le H2 qui circule au pays de George W. est plus polluant que celui qui roule sur les terres de Stephen?

S'il ne devait qu'y avoir un point positif, c'est celui d'avoir écarté la fourgonnette de l'équation. À quoi bon vouloir chercher à ménager le portefeuille des familles nombreuses en accordant des crédits d'impôts alors que celles-ci, par nécessité, doivent souvent opter pour un véhicule spacieux et logeable. Voilà un exemple de gros bon sens, si rare, qu'il mérite d'être souligné.

Le plus ironique de toute cette histoire est que les côtes de consommation de Transports Canada ne correspondent pas du tout à la réalité. Conséquemment plusieurs véhicules qui mériteraient d'être sanctionnés profitent de cette situation qui, hélas, ne donne pas une image réelle de la pollution engendrée par l'automobile. Les essais menés par Transports Canada ne tiennent hélas pas compte de tous les facteurs (qualité de la chaussée, entretien du véhicule, conditions atmosphériques etc.) pouvant influencer la consommation des véhicules. Pas même de nos comportements individuels. Il est donc pratiquement impossible de reproduire au quotidien des côtes de consommation obtenues en laboratoire. Conscient de l'écart qui existe entre le laboratoire et la rue, Ressources naturelles Canada entend, comme les États-Unis, réviser sa façon de calculer la consommation. Une nouvelle procédure sera alors instaurée pour mieux tenir compte des habitudes des conducteurs et de l'environnement dans lequel les véhicules sont appelés à évoluer (congestion routière plus lourde, conditions climatiques, etc.). La consommation d'essence affichée sur les étiquettes ÉnerGuide risque alors de grimper brutalement et les remises... de s'envoler. Pour l'heure, la valeur des tests menés par l'agence gouvernementale canadienne a pour seul intérêt de comparer dans des conditions identiques tous les véhicules vendus au pays. Point à la ligne.

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Marque / Modèle / Livrée : Ford F-150 XL 4x4

» Moteur : V8 4,6 litres

» Prix de détail suggéré : 29 499 $

» Consommation * : Ville : 16,2 L/100 km. Route : 11,7 L/100 km

» Émissions de Co2 sur une base annuelle * : 6 816 kg

» Pénalité: 0$

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Marque / Modèle / Livrée : Jeep Grand Cherokee SRT8

» Moteur : V8 6,1 litres

» Prix de détail suggéré : 49 880 $

» Consommation * : Ville : 19,1 L/100 km. Route : 14,3 L/100 km

» Émissions de Co2 sur une base annuelle * : 8 112 kg

» Pénalité: 4 000 $

* Données tirées du guide Energuide

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Ce qu'il faut retenir

- 21 véhicules sont admissibles à un rabais gouvernemental. De ce nombre, 7 portent les couleurs de Toyota.

- Les pénalités touchent les véhicules de tourisme (VUS compris) qui consomment en moyenne 13 L/100 km ou plus. Les camionnettes et les fourgonnettes ne sont pas touchées.

- Selon les prévisions, le gouvernement devrait dégager de ce programme un surplus de 17 millions de dollars. Où ira ce surplus?

- La liste des véhicules admissibles à une remise est visible sur le site de Transports Canada (www.tc.gc.ca). Les véhicules pénalisés seront inscrits cette semaine sur ce même site.

- Tous les véhicules pénalisés qui se trouvaient chez le concessionnaire avant le dépôt du budget, le 21 mars, ne sont pas assujettis à cette mesure, ni les véhicules qui ont été commandés avant cette date.

- Les grands gagnants de ce train de mesures sont les hybrides. En plus de la remise fédérale, les hybrides bénéficient, au Québec par exemple, d'un crédit de taxe (TVQ) pouvant atteindre 2 000 $. C'est donc dire qu'une Honda Civic Hybrid actuellement vendue 26 250 $ est offerte une fois toutes les remises appliquées à 22 250 $, soit 1 380 $ de moins qu'une Civic EX (automatique) comparable. À ce prix, y a t il un consommateur qui va se priver?