Un air de déjà vu? Absolument. À commencer par ses formes, qui lui donnent l'allure d'un Murano miniature avec ses ailes renflées et sa troisième glace latérale arquée.

Pas de doute, un Murano devait se trouver tout près au moment de la création du Rogue dans les studios de Nissan, à San Diego. Mais au-delà des formes, il y a le fond. À ce chapitre, ce véhicule appelé à faire concurrence aux CR-V, RAV4, Vue et autres multisegments du même genre repose sur une architecture similaire à celle étrennée par la Sentra.

 

Donc, en gros, le Rogue est une compacte habillée comme un utilitaire. Ce faisant, ce nouveau véhicule permet non seulement à son constructeur de rentabiliser ses investissements, mais aussi d'engranger plus de bénéfices en commercialisant une compacte qui, à l'image d'un PT Cruiser ou d'une Matrix, s'affranchit délibérément des codes un peu stricts imposés depuis des lustres au sein de l'industrie.

 

Plus long qu'une Sentra, plus haut aussi, mais plus court et plus bas qu'un utilitaire pur sirop, le Rogue n'est pas le premier à vouloir marier le meilleur de deux mondes. En l'occurrence unir les avantages d'un VUS (position haute, qui sécurise psychologiquement tant de conducteurs; volume habitable appréciable; traction intégrale) et les qualités reconnues aux automobiles «traditionnelles», notamment en matière de comportement routier. Mais quel mérite a alors Nissan à interpréter le même refrain que la concurrence? Aucun. Mais, comme le démontre l'intérêt des consommateurs à l'égard de cette nouvelle génération de véhicules, le Rogue aura certainement droit, lui aussi, à son heure de gloire ou, mieux encore, à une belle carrière commerciale.

 

Le Rogue se décline en deux livrées, S et SL. Toutes deux font appel au quatre cylindres de 2,5 litres. Ce moteur de 170 chevaux et 175 lb/pi de couple est associé exclusivement à une transmission à variation continue (CVT). L'acheteur aura seulement à choisir le groupe motopropulseur: deux ou quatre roues motrices. Tout un dilemme? Pour y voir plus clair, sachez que le système à quatre roues motrices entraîne un débours additionnel de 2800$ dans la version S et de 2000$ dans la SL.

 

C'est beaucoup d'argent compte tenu du fait que les versions à traction avant bénéficient, sans frais, des mêmes aides à la conduite (correcteur de stabilité électronique, antipatinage) et que le dispositif à quatre roues motrices offert est du type «vraie fausse intégrale»; cela signifie que dans des conditions normales, sur route sèche, seules les roues avant sont sollicitées et que l'essieu arrière ne devient moteur que lorsque les conditions l'exigent, le transfert du couple étant assuré par un embrayage commandé électroniquement.

 

D'ici là, ouvrons les portières. La présentation intérieure ne dépaysera personne. La première impression est bonne, malgré l'abondance de plastiques. Rien à redire si ce n'est que les rangements sont peu nombreux et peu pratiques. À l'arrière, la banquette accueille sans problème deux adultes, mais le dégagement est moindre qu'à bord du CR-V et du RAV4, voire du Vue de Saturn. En revanche, le volume du coffre de la japonaise (818 L) surpasse celui de l'américaine (750 L), sans pour autant inquiéter les ténors de la catégorie dont la capacité de chargement excède les 1000 L d'espace utile. Ces derniers innovent également en proposant une banquette arrière coulissante dans le but de vous permettre de moduler l'espace à votre guise.

Le secret est dans la suspension

Bien qu'ils aient la même architecture, le Rogue se révèle sur le plan dynamique beaucoup plus convaincant que la Sentra. L'explication tient sans doute à la suspension arrière à bras multiples qui assure au Rogue un comportement routier plus vif, plus agile. Voilà de quoi nous faire oublier l'ennui ressenti au volant de la Sentra, dont le compte rendu a été publié dans nos pages il y a quelques mois.

 

Malgré sa hauteur, le Rogue maîtrise correctement le roulis de sa caisse dans les virages et se montre imperturbable même lorsque le vent souffle ou que le coefficient d'adhérence de la chaussée est faible. À ces qualités s'ajoute un confort de roulement digne de mention. À ce sujet, le Rogue se révèle plus confortable que le CR-V mais ne parvient pas à rivaliser avec la douceur d'un Santa Fe, par exemple.

 

Court et doté d'une direction précise, le Rogue se montre également à son aise dans la circulation urbaine. On aurait seulement souhaité une meilleure visibilité vers l'arrière (les montants arrière gênent et la lunette manque de hauteur) et un diamètre de braquage un brin plus court.

 

Pour animer le Rogue, Nissan glisse sous son capot le quatre-cylindres de 2,5 litres. Robuste et volontaire, ce moteur manque hélas de caractère et de souplesse. Certes, les temps d'accélération et de reprise sont probants, mais son mariage obligé avec la transmission à variation continue (CVT) ne nous est pas apparu des plus heureux.

 

Excessivement bruyant à l'accélération, ce duo ne s'assagit qu'une fois la vitesse de croisière atteinte. Jusqu'à preuve du contraire, ce type de transmission donne de bien meilleurs résultats avec un six-cylindres. Pour justifier leur choix, les concepteurs du Rogue soutiennent que ce mariage permet des économies d'essence. Sans doute, mais nous avons l'impression que la boîte CVT sert plutôt à masquer le rendement plutôt moyen du 2,5 litres.

 

Au final, le Rogue parviendra à semer la pagaille dans ce créneau très encombré grâce à ses prix très compétitifs, à sa présentation dynamique et à son agrément de conduite. En revanche, la boîte CVT pourrait lui nuire plus que l'aider, et sa faible capacité de remorquage (454 kg) par rapport à ses concurrents pourrait inciter la clientèle à reconsidérer l'offre de Nissan, qui, à bien des égards, innove peu.