Véronique Cloutier anime à compter de ce soir la nouvelle émission 1res fois, à 20h, à ICI Radio-Canada Télé. Retour sur une année mouvementée pour la reine de la télévision québécoise.

Marc Cassivi: J'ai aimé ta nouvelle émission. Ce n'est peut-être pas une bonne nouvelle pour tes cotes d'écoute...

Véronique Cloutier: En effet! [rires]

Marc Cassivi: Est-ce que les cotes d'écoute t'inquiètent ? Et le fait qu'il y ait beaucoup de concurrence en face [Face au mur, animée par Maripier Morin, à TVA]?

Véronique Cloutier: Honnêtement, pas tant. J'aimerais que beaucoup de gens soient au rendez-vous parce que c'est comme ça que l'on mesure le succès, malheureusement. Si on veut que l'émission ait une certaine durée de vie, c'est comme ça. Il y a des émissions dont les cotes ne sont pas à la hauteur des attentes et que les diffuseurs gardent en ondes pour différentes raisons. Mais moi, j'ai une carrière plus populaire, plus grand public, alors on s'attend à ce que j'attire un bon nombre de gens. Je ne peux pas en faire abstraction complètement, mais, pour être très honnête, ça ne me stresse pas présentement. Je ne peux rien y faire. Ce que je pouvais faire, je l'ai fait. L'émission est sur les rails. On en a déjà enregistré quatre.

Marc Cassivi: La réaction est très bonne jusqu'à présent...

Véronique Cloutier: Oui. Ça a quelque chose de très rassurant et de très apaisant par rapport à ce que j'ai vécu l'an dernier. Mes années de métier m'ont appris qu'après, ça ne m'appartient plus. Il faut une certaine dose de lâcher-prise. Mais je te mentirais si je te disais que je ne serai pas déçue si les cotes d'écoute sont faméliques. J'aimerais que les gens voient la première et se fassent une idée ensuite. Mais il faut d'abord qu'ils nous donnent une chance.

Marc Cassivi: L'an dernier, les attentes étaient trop élevées pour Votre beau programme?

Véronique Cloutier: Assurément. Les attentes n'étaient pas réalistes au niveau des cotes d'écoute. Radio-Canada l'a reconnu aussi. Les émissions de variétés n'ont plus le même attrait, partout dans le monde, à moins d'être un gros format comme La voix. C'est plus difficile pour les talk-shows. La tendance se confirme dans les marchés de télévision depuis des années. Il faut changer nos attentes, je crois.

Marc Cassivi: Comment expliques-tu l'échec de Votre beau programme?

Véronique Cloutier: C'était un show inégal.

Marc Cassivi: Est-ce qu'il était trop ambitieux?

Véronique Cloutier: Oui.

Marc Cassivi: J'avais l'impression qu'on nous offrait le «package Véro» au grand complet - l'animatrice, la comédienne, l'artiste qui peut faire des parodies, chanter, danser - et que c'était trop. C'est mieux que ce soit plus morcelé?

Véronique Cloutier: Je pense que c'est plus sage, plus intelligent et plus sain pour moi. Parce que c'est un rythme qui n'avait pas d'allure. En même temps, on a retenu que «Véro était partout», mais les numéros étaient bâtis autour des invités! J'étais la comédienne maison de service. Est-ce qu'on reproche à Jimmy Fallon de se mettre partout dans son show ? Je ne me compare pas à lui - tu vois ce que je veux dire. Quand on adhère à un concept, on suit l'animateur. Les gens n'ont pas acheté le concept...

Marc Cassivi: Tu l'as ressenti comme un désaveu?

Véronique Cloutier: Pendant ce temps-là, les abonnements à Véro.tv ont explosé. Il y avait quand même ma face et mon nom. On a vendu 250 000 billets du spectacle des Morissette. Les gens avaient envie de venir me voir faire des blagues...

Marc Cassivi: Ça t'a permis de relativiser les choses?

Véronique Cloutier: Pendant l'émission, je ne relativisais pas du tout! J'étais très inquiète pour mon avenir. C'est le temps et le recul qui m'ont permis de comprendre que c'est l'émission qui ne marchait pas. C'est le public qui, ultimement, décide. À un moment donné, c'est sûr que tu le prends un peu personnel. Tu te dis: ça ne vous tente plus de me suivre, ça ne vous tente plus d'embarquer dans ce que j'ai envie d'essayer, d'accepter ce que je suis.

Marc Cassivi: C'était ton grand retour à la télé...

Véronique Cloutier: Après trois ans. Ça ajoute aux attentes. Je ne me promenais pas avec une pancarte en disant: attention, je reviens! Je ne voulais pas de cette pression-là, mais elle vient naturellement avec ma notoriété et mon degré de popularité. À tout choisir, j'aime mieux être moi et me péter la gueule parce qu'il y a trop d'attentes que de passer sous le radar et qu'il n'y ait jamais d'attentes parce que ce que je fais laisse les gens de glace, que ça ne les choque pas, mais que ça ne les enchante pas non plus. J'aime mieux être dans ces extrêmes-là, qui viennent avec la carrière que j'ai la chance d'avoir, même si des fois ça fait plus mal.

Marc Cassivi: Disons que tu as vécu des controverses plus importantes que ça par le passé...

Véronique Cloutier: Et plus graves et plus tristes. Ce qui est dur, ce n'est pas l'échec de l'émission comme tel ou le manque de cotes d'écoute, mais la remise en question que ça provoque.

Marc Cassivi: Ta nouvelle émission a un concept simple et consensuel. Tu y tiens un rôle d'animatrice, je dirais, plus traditionnel. La tournée des Morissette est terminée, tu ne fais plus de Bye bye... L'artiste que tu es par ailleurs va s'exprimer de quelle manière?

Véronique Cloutier: J'ai annoncé mardi que je vais animer un gala ComediHa!. C'est exactement pour ça. Ce sera mon terrain de jeu. Animer, c'est mon travail premier, ce pour quoi on me connaît et on m'apprécie. Quand j'ai la chance de faire autre chose, je me «paie des trips», et ceux qui ont envie de suivre sont les bienvenus.

Marc Cassivi: Est-ce «Véro l'humoriste» qui poursuit sa carrière?

Véronique Cloutier: Non. Je ne suis pas humoriste. Je ne m'accorderai jamais ce titre-là. Je suis une polyvalente qui a la chance, quand elle est bien entourée, de pouvoir faire plusieurs choses. Je pense que j'apprends vite, que je suis douée pour certaines choses. Je sais que ça va me manquer de faire de la scène, donc ça tombait bien. Ce sera une petite bulle dans mon année. Comme lorsque j'animais les Gémeaux. De faire des parodies, de faire un stand-up en ouverture... Je ne veux pas l'imposer à tout le monde, mais à des moments choisis, où les gens seront plus enclins à me suivre.

Marc Cassivi: Il y a un poste d'animateur qui s'est libéré au gala des Gémeaux...

Véronique Cloutier: Oui, semble-t-il. Je n'ai pas eu d'appel. Je te donne le scoop.

Marc Cassivi: Cette semaine, sur Facebook, tu critiquais le site de potins Monde de stars, qui détourne les statuts d'artistes sur les réseaux sociaux pour faire du clickbait...

Véronique Cloutier: Je nommais Monde de stars parce que, pour moi, c'est le pire et c'est celui qui a le plus d'attention. Il y a 700 000 abonnés. Ça ne me dérange pas que ça existe parce que, pour être bien franche, quand ils parlent de nos projets, souvent ça fait notre affaire. Mais j'ai un problème avec la malhonnêteté et les pratiques tendancieuses. De prendre un statut Facebook dans lequel je souhaite à ceux qui vivent un Noël difficile d'en connaître de meilleurs, et d'en faire un article avec ma photo dont le titre est «Un Noël triste mais il y en aura des meilleurs», c'est malhonnête. Les gens, souvent, ne lisent que les titres. Après, ils commentent en disant: «Heille, elle, la riche, elle me fera pas brailler!» Ça génère de la haine. La semaine dernière, ils ont titré: «Véro en guerre contre Maripier Morin». J'adore Maripier! Radio-Canada nous a donné la case de 20 h le jeudi et TVA a décidé de changer l'heure de diffusion de Face au mur pour nous affronter. Les réseaux sont en guerre! Maripier et moi, on n'a rien à voir là-dedans! Mais c'est nous qui nous faisons chier dessus! On vit déjà dans une époque difficile, cynique, d'intimidation. On essaie de créer des mouvements de solidarité pour se rallier et vivre dans un monde meilleur. Est-ce nécessaire de prendre nos statuts généreux et de les revirer contre nous?

Marc Cassivi: En plus, c'est un site qui appartient à une entreprise qui produit des émissions de télévision [Attraction Images]...

Véronique Cloutier: C'est un non-sens. Les compagnies de production ont besoin des personnalités connues pour nourrir leurs émissions. Il faut que ces pratiques-là cessent. Les lecteurs se font avoir par le clickbait. Je vais à l'épicerie et les gens m'accostent en me disant: «Je suis désolé pour toi et Louis!», parce qu'ils ont lu une fausse nouvelle qui parlait de nos «moments difficiles». Ça nous nuit, forcément.

Marc Cassivi: Tu parlais des mouvements de solidarité. En entrevue avec Paul Arcand, cette semaine, tu as parlé de tes réserves à soutenir publiquement un mouvement comme #moiaussi. Ça aussi, ça a été repris sur plusieurs sites...

Véronique Cloutier: Comme je lui ai expliqué, je ne peux pas m'exposer à ça, donc je ne veux pas faire de déclaration publique. J'aime mieux ne plus en parler et j'ai expliqué pourquoi. Ça ouvre la porte à ce qu'on m'insulte. Il y a des gens mal intentionnés, qui ne m'aiment pas, à qui ça donne du gaz. Ce matin, j'ai reçu des insultes de quelqu'un qui avait lu un extrait de l'entrevue sur un site. C'est blessant. C'est un sujet très blessant pour moi.