Bien que le Trio Gryphon ne fasse pas précisément partie de nos vies, nous en avions gardé, sauf erreur, un souvenir plutôt bon. L'ensemble torontois formé en 1993 nous revenait mercredi soir, laissant cette fois une impression plus durable... parce que plutôt amère.

L'inexplicable faiblesse de la violoniste, écrasée entre la puissance «macho» du violoncelliste et du pianiste, produit un déséquilibre qui se manifeste dès les premières pages de la première oeuvre, le Dumky de Dvorak, et réapparaît de façon intermittente jusque dans l'Archiduc de Beethoven qui termine le programme.

En plus de manquer de présence, madame joue plus ou moins juste la moitié du temps. On ne parle donc plus d'un trio mais d'un duo avec un demi-partenaire. Le Dvorak s'écoute quand même assez bien car le groupe s'amuse à en scruter les divers états d'âme. Mais le Beethoven est lu au premier degré. Du reste, le violoncelliste écrase la phrase d'entrée du Scherzo, à laquelle la violoniste fait écho par une espèce de miaulement. Plus tard, dans l'Andante à variations, le violoncelliste finira par jouer encore plus faux que la violoniste.

En fin de compte, la meilleure prestation de la soirée vient du pianiste, qui se révèle technicien plus solide et musicien plus imaginatif que ses deux coéquipiers. Mais l'homme a sérieusement manqué de courtoisie en annonçant seulement en anglais, et un anglais baragouiné, une modification au groupe Piazzolla qui, au départ, était mal identifié sur le programme.

Rien de grave en ce qui concerne cette musique de restaurant. Par contre, on peut se demander comment serait reçu, à Toronto, un groupe québécois qui s'adresserait là-bas en français seulement?

TRIO GRYPHON - James Parker (piano), Annalee Patipatanakoon (violon) et Roman Borys (violoncelle). Mercredi soir, salle Bourgie du Musée des beaux-arts.

Programme:

Trio no 4, en mi mineur, op. 90, B. 166 (Dumky) (1891) - Dvorak

Pièces d'Astor Piazzolla

Trio no 6, en si bémol majeur, op. 97 (Archiduc) (1811) - Beethoven