Absent de «son» Orchestre Métropolitain depuis trois mois, Yannick Nézet-Séguin y revenait pour un dimanche après-midi bien rempli. Il dévoilait la programmation de la prochaine saison de l'OM (la 32e). Il recevait des mains de la ministre de la Culture le Prix Denise-Pelletier (étant absent lors de la cérémonie officielle des Prix du Québec). Il décernait à son tour un prix portant son nom à un débutant en piano, Nicolas Dupuis. Il se faisait aussi rappeler au micro qu'il vient d'avoir 37 ans. Enfin - et c'était le principal événement du jour -, il dirigeait la très rare Symphonie lyrique d'Alexander von Zemlinsky en première montréalaise.

On s'étonne que Zubin Mehta, lors de son long mandat à l'OSM, n'ait jamais programmé cette oeuvre très proche de lui, de Mahler et du Chant de la terre, et que Dutoit lui-même n'y soit jamais venu, lui qui ressuscita maintes oeuvres oubliées. Voilà donc une initiative importante qu'on doit à Nézet-Séguin.

Que le résultat n'ait pas été pleinement convaincant, la chose s'explique facilement. L'oeuvre est longue - 43 minutes sous la baguette de Nézet -, elle ne se révèle pas entièrement du premier coup et demande de l'auditeur un certain effort, étant composée de sept textes plus ou moins mystiques, érotiques et hermétiques de Tagore chantés en allemand, en alternance par un baryton et par une soprano.

Les deux solistes, le baryton canadien Brett Polegato et la soprano américaine Angela Meade, ont abordé l'oeuvre avec grand sérieux. Après quelques incertitudes au début (de voix chez lui, de concentration chez elle), ils sont entrés dans le vif du sujet et ont entraîné dans l'expérience l'auditoire nombreux et très attentif.

Le principal héros ici fut cependant l'orchestre, très augmenté pour l'occasion, préparé dans le détail par son jeune chef, et techniquement impeccable, explosif ou très discret, selon le cas. Il était clair que les répétitions avaient surtout porté sur le Zemlinsky. En conséquence, l'Adagio de la 10e Symphonie de Mahler découvrit quelques petites imprécisions.

À la conférence de presse précédant le concert, on avait annoncé que celui-ci était - et je cite - «complet, complet, complet, complet». On voyait pourtant des sièges vides un peu partout.

Les notices biographiques des chanteurs étaient fort approximatives. Ainsi, on ne précisait pas que M. Polegato est canadien. Mais on disait que sa discographie «se glisse dans tous les genres et époques». Chose plus grave encore en ce qui concerne Angela Meade: pas un mot pour rappeler qu'elle fut l'une des principales gagnantes du Concours musical international de Montréal.

ORCHESTRE MÉTROPOLITAIN. Chef d'orchestre : Yannick Nézet-Séguin. Solistes : Angela Meade, soprano, et Brett Polegato, baryton. Hier après-midi, Maison symphonique de Montréal, Place des Arts. Programme : Adagio de la Symphonie no 10, en fa dièse majeur (1910) - Mahler Lyrische Symphonie, pour soprano, baryton et orchestre, op. 18 (1924) - Zemlinsky