L'histoire ne dit pas pourquoi cet ensemble allemand piano-cordes a pris le nom de Fauré, compositeur français s'il en est.

Chose certaine, ses débuts dimanche au LMMC ne sont pas passés inaperçus. Les quatre musiciens jouent avec une puissance de son parfois excessive et une passion d'autant plus forte qu'elle est contrôlée; ils ont suscité une ovation monstre comme on en voit rarement en ces lieux.Première pièce: l'unique mouvement d'un quatuor laissé inachevé par l'étudiant Mahler en 1876. On reconnaît le futur grand compositeur dans cette charmante curiosité de 10 minutes, jouée ici chez Allegra puis à Musica Camerata.

La puissance et la passion dont j'ai parlé caractérisent le Mahler et accompagnent le dernier des trois Quatuors avec piano de Brahms, l'op. 60. Le pianiste joue extrêmement fort: le tout premier accord est marqué «f» et est joué «fff»; il en sera ainsi jusqu'à la fin. La force est davantage dosée chez la violoniste, que certaines de nos délicates demoiselles-qui-font-du-violon devraient prendre comme modèle. Mme Geldsetzer a cependant joué un peu bas dans le finale et, curieusement, dans la reprise du même mouvement.

Beaucoup de force, donc, chez ces Allemands, et, en même temps, des nuances, voire de la douceur, quand il en faut. Ainsi, le mouvement lent du Brahms s'ouvrit sur une tranquille sonorité de violoncelle et se poursuivit comme une grande rêverie. Le Fauré - qu'on attendait, à cause du patronyme - reçut la même interprétation que le Brahms: très grave au mouvement lent, tumultueuse au finale. Mais le Scherzo découvrit quelques légères faiblesses de coordination.

Un rappel suivit immédiatement: le Rondo alla zingarese d'un autre Brahms, l'op. 25, plus survolté encore que tout ce qui précédait. Le groupe dédia cet ajout à Mme Marcelle Gagné, ex-présidente du LMMC qui, fêtée dimanche pour ses 100 ans, reçut les hommages de tous dans son fauteuil roulant.

En soirée, le Studio de musique ancienne ouvrait sa saison par un concert réunissant le Choeur du Studio et les Sacqueboutiers de Toulouse. La formation ainsi créée par Christopher Jackson - 10 chanteurs, cinq instrumentistes et Réjean Poirier au petit orgue - entreprenait dimanche une brève tournée du même programme qui la conduira jusque dans l'Ouest canadien.

Giovanni Gabrieli occupait la majeure partie de cette heure de musique dominée par de très beaux alliages de voix droites et de cuivres. Des regroupements vocaux et instrumentaux, différents pour chaque pièce, allégaient la monotonie de l'ensemble.

Vendredi soir, l'Ensemble Kore du pianiste Marc Couroux consacrait un programme à John Abram, compositeur canadien d'origine britannique. J'ai écouté une heure de ce minimalisme et suis parti. Il y a des limites à tout. Première pièce: le pianiste martèle interminablement la ou les mêmes notes comme un accordeur de pianos. Deuxième pièce: six musiciens debout devant deux tables jonchées de bébelles en tirent toutes sortes de petits bruits selon une rythmique assez savante mais qui ne rachète pas la déconcertante pauvreté du contenu musical.