Men I Trust se produit demain soir au Balattou avec sa musique langoureuse qui puise dans le soft-disco, le shoegaze et le trip-hop. Entrevue avec un groupe qui vit en bonne partie de Spotify et partira en tournée aux États-Unis en première partie de Belle & Sebastian.

Men I Trust totalise des millions d'écoutes sur Spotify. Le groupe peut compter sur un agent de tournée. Mais sinon, ses membres font tout eux-mêmes, des relations de presse à l'envoi de t-shirts en passant par la réalisation des clips. Vous savez quoi? Ils en sont ravis, et c'est ainsi qu'ils gagnent leur vie.

Au secondaire, Dragos Chiriac et Jessy Caron concoctaient des «instrus de hip-hop». Ils se sont retrouvés des années plus tard au département de musique de l'Université Laval. Le premier étudiait en guitare jazz et le second, en réalisation audionumérique. «On avait envie de faire des chansons french touch et italo-disco», indique Dragos.

Un premier album sorti en 2014 réunissait des chanteurs, collaborateurs fort connus aujourd'hui, dont Geoffroy, Gabrielle Shonk et Helena Deland.

Pendant que le deuxième album - «plus organique» - se finalisait, Emmanuelle Proulx, que tout le monde surnomme Emma, s'est greffée au groupe. «Mon amie a uploadé une vidéo de moi sur Facebook où je chantais près d'un feu de camp avec mes amis. Dragos m'a vue et m'a dit qu'il cherchait une voix comme la mienne. J'étais une grosse fan de Men I Trust. Quand c'est sorti à Québec, cela n'avait pas rapport comme c'était bon.»

Cent pour cent indépendants

La magie de l'internet a opéré plus d'une fois pour Men I Trust. Le groupe - établi aujourd'hui à Montréal - vit en bonne partie de ses millions d'écoutes sur Spotify. Or, il carbure encore au DIY (do-it-yourself).

Après avoir pris contact en vain avec de nombreux labels, les membres de Men I Trust ont appris à administrer un groupe, de la distribution à la commercialisation. Aujourd'hui, ils font tout eux-mêmes, sauf qu'ils ont deux agents de tournée qui programment leurs spectacles.

Paradoxe: on leur court maintenant après. «Nous recevons des offres non-stop, même de majors», indique Dragos.

«Nous voulons rester indépendants le plus longtemps possible. Nous avons 100 % de nos droits. Beaucoup de labels demandent 50 %.»

«J'adore terminer un clip et le sortir quand je veux», ajoute Emma, qui gère néanmoins les sorties selon une cadence calculée.

Grâce à Spotify

Depuis six mois, Men I Trust vit de sa musique. En attendant le troisième album qui devrait paraître l'été prochain, il a sorti trois extraits depuis un an, dont Tailwhip, écouté 3,1 millions de fois sur Spotify.

«Pour les artistes francophones, Spotify est un marché pas facile et les gens de l'ancien système sont réfractaires à ce qui se passe... Mais nous, on vit grâce à Spotify», fait valoir Emma.

Mais Spotify, ce n'est pas tout, souligne Dragos. Le succès d'un groupe sur le service d'écoute en ligne suédois doit se traduire en engagement envers le groupe. Près de 17 000 personnes - un nombre considérable - aiment la page Facebook du trio. «Notre fan base sur Bandcamp est précieux», ajoute Emma.

Men I Trust vend beaucoup de produits à son effigie. Ses fameux t-shirts où il est simplement écrit Chaudière-Appalaches se sont écoulés en 48 heures et sont maintenant partout dans le monde. «Les gens de Postes Canada sont découragés quand ils nous voient arriver», dit en riant Dragos.

Si des tâches viennent à être déléguées, elles seront «techniques» et non «artistiques». «Tant et aussi longtemps que l'indépendance ne nuit pas à l'expansion du groupe», résume Dragos.

Dans ses clips, Men I Trust préserve une image de positivisme, de naturel et de beauté. «On ne veut pas que ce soit cool, mais que ce soit intemporel», précise Emma.

Aux États-Unis avec Belle & Sebastian

L'une des missions de Men I Trust sera accomplie en mars avec une petite tournée américaine qui s'arrêtera au festival South by Southwest, à Austin (où Men I Trust fait partie de la délégation officielle). En juin, le trio doit aussi assurer plusieurs premières parties pour le légendaire groupe écossais Belle & Sebastian. «On voulait vraiment aller aux États-Unis. Plus de 50 % de notre fan base est là-bas, se réjouit Emma. On va faire des salles de 6000 places.»

«Et il y a beaucoup de dates non annoncées», ajoute Dragos.

Le groupe devrait donner une centaine de spectacles cette année.

C'est aujourd'hui un terme galvaudé, mais l'étiquette indie-rock colle parfaitement à Men I Trust. Des labels doivent sûrement s'en mordre les doigts.

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Men I Trust se produit au Balattou, demain soir, avec Harfang en première partie.