«Je m'aime plus que tu m'aimes», chante le duo Milk & Bone sur une poignante ballade de son deuxième album, Deception Bay, qui sort le 2 février.

Le tandem traite d'un sujet inépuisable dans la pop: l'insatisfaction amoureuse. Contrairement à une Lykke Li sur I Never Learn, Laurence Lafond-Beaulne et Camille Poliquin ne s'enfoncent pas dans la tristesse et le désarroi. Elles ne jouent pas non plus les superfemmes.

C'est avec cran et avec ardeur qu'elles manifestent le désir de s'émanciper au sein de relations saines. En se disant «déçues» plus que tristes, elles dégagent une force.

«Dans les textes comme dans la musique, nous avons un recul. Nous sommes moins à fleur de peau. Sur le premier album, nous étions écorchées par des émotions que nous ne savions pas gérer», estime Camille Poliquin.

«On a créé avec plus de détachement. Comme si on sortait de nos corps pour analyser la situation, renchérit Laurence Lafond-Beaulne. Inévitablement, quand tu vieillis, tu comprends mieux les choses que tu vis.»

Mais ce n'est pas une simple figure de style si le deuxième album de Milk & Bone s'intitule Deception Bay. La baie Déception, elle existe. Dans le nord du Québec, dans la péninsule d'Ungava.

«J'ai un ami qui travaille dans le Nord. C'est une baie au milieu de nulle part où il y a tout le temps des aurores boréales. L'idée de la baie des déceptions, je trouvais cela tellement beau et évocateur. Comme un endroit où tu transportes tous tes échecs...»

«Toutes les chansons de l'album, c'est un peu cela, résume Camille Poliquin. Les essais et erreurs émotionnels.»

Se faire confiance

Milk & Bone est synonyme de succès. Pourtant, en ces temps difficiles pour les musiciens, les revenus du duo ne permettent pas à Laurence Lafond-Beaulne et Camille Poliquin de payer leur loyer. La première a notamment partagé la scène avec Alex Nevsky et Ariane Moffatt, en plus de son duo parallèle Paloma. La seconde a lancé un album solo sous le pseudonyme Kroy. Milk & Bone a aussi écrit la bande originale du film King Dave de Podz.

Vu tous leurs engagements en marge du duo, les deux musiciennes ont bouclé Deception Bay rapidement, en moins d'un an. «Nous avons mis nos textes en commun l'hiver dernier. C'était la première fois qu'on se retrouvait dans un lieu isolé, juste avec notre vibe à nous», raconte Camille Poliquin.

Avant d'entrer en studio, le tandem a pu passer du temps à Los Angeles avec son réalisateur Gabriel Gagnon, qui avait également travaillé à son premier album, Little Mourning. Il y avait une pression de créer.

«Le deuxième album était attendu et nous avions un deadline. Cela a engendré un stress [...], mais, avec le recul, ce n'était pas une mauvaise chose», explique Laurence Lafond-Beaulne.

Le deuxième album est un passage difficile pour les artistes qui ont eu un grand succès avec leur premier. Autant on peut se sentir perdu dans la création musicale, autant on peut sentir en pleine maîtrise, comme ce fut le cas pour Milk & Bone. «Nous avons tenu à nous faire plus confiance, à défendre nos idées et à être les maîtres de notre musique», dit Laurence Lafond-Beaulne.

«Nous ne doutions pas, aussi, que ce qu'on vit méritait d'être sur une chanson», ajoute Camille Poliquin.

Gonzales et cri

Cette confiance a permis aux deux musiciennes d'ouvrir la porte à plus de collaborateurs. Moment fort de l'album: les voix de Milk & Bone sur une ballade jouée magnifiquement au piano par Gonzales, un de leurs admirateurs.

«C'est solennel, presque une marche funèbre, dit Camille Poliquin. Il fallait quelqu'un comme lui, en qui nous avons une confiance complète et qui aime notre musique, pour enregistrer ce qu'il y avait de mieux pour la chanson.»

«Tu l'entends respirer sur la chanson. De la vraie chaleur humaine», renchérit Laurence Lafond-Beaulne.

Parmi les autres collaborateurs - tous réunis sur la pièce instrumentale finale -, on retrouve Jonathan Dauphinais, Max-Antoine Gendron, Navert et CRi, dont les beats mettent sous tension la chanson Faded.

De la chanson réconfortante KIDS à la rêveuse Sad Eyes jusqu'au puissant refrain de Deception Bay, Milk & Bone explore plusieurs palettes musicales avec de petits coups de génie pop, comme l'enivrante boucle vocale de la chanson Daydream.

Lors de notre rencontre en début de semaine, le duo préparait le spectacle d'une tournée internationale à venir. Milk & Bone se produira dans plusieurs grandes villes nord-américaines, ainsi qu'à Paris et Londres, après un grand spectacle au Corona le 5 avril.

«On veut donner le meilleur qui soit à Montréal.»

Leur deuxième opus, Deception Bay, sort le 2 février. On pourra les voir à l'Impérial Bell (à Québec) le 3 mars et au Corona (à Montréal) le 5 avril.