Avec On ne badine pas avec l'amour, Claude Poissant ouvre sa première saison à la direction du Théâtre Denise-Pelletier sous le signe de la jeunesse. Alfred de Musset a écrit cette courte pièce en 1834, à 24 ans. Il s'est inspiré entre autres de sa relation tumultueuse avec George Sand.

Dans la pièce, l'amour est constamment mis à l'épreuve, au rythme changeant du coeur humain. Dans ce jeu cruel, on teste davantage l'amour-propre que les sentiments, et personne ne gagnera.

Promis l'un à l'autre, Camille et Perdican se retrouvent après des années de séparation. Mais les retrouvailles sont très froides. Camille, 18 ans, refuse même un baiser de son cousin Perdican. Au lieu du mariage heureux prévu, on apprendra que Camille a décidé d'entrer au couvent pour se fiancer à Dieu. «Je vous ai paru brusque et hautaine; cela est tout simple, j'ai renoncé au monde», dit-elle.

Claude Poissant nous offre une lecture très moderne de ce classique qui démontre que l'orgueil est plus fort que la passion, et le mensonge, plus habile que la vérité.

Si les acteurs sont tous très bons, la mise en scène manque de fluidité et de légèreté. Poissant souligne davantage le sous-texte (l'inconscient des personnages) que la prose belle et fluide de Musset. Certes, il est indispensable de revisiter cette pièce, mais doit-on lui enlever tout son romantisme, l'essence de l'oeuvre?

Par contre, le metteur en scène a eu la bonne idée d'introduire un choeur pour commenter l'intrigue. Il accentue aussi le choc des générations, en caricaturant les personnages adultes et secondaires: le baron, dame Pluche, Bridaine, Blazius.

Dans le rôle de Perdican, Francis Ducharme prouve encore une fois l'étendue de son registre de jeu. Il est tragique et romantique, élégant et physique, moderne et classique. Très volontaire et émancipée, la Camille d'Alice Pascual détonne un peu. Pieds nus, jupe courte, blouse ajustée - les magnifiques costumes aux tons clairs de Marc Sénécal lui donnent un air de gitane -, sa Camille n'a vraiment pas l'air d'une jeune femme qui s'en va se cloîtrer au couvent!

À la fin, Perdican s'exclame: «Orgueil, le plus fatal des conseillers humains, qu'es-tu venu faire entre cette fille et moi?» Du marivaudage du début, il ne reste que le drame de l'inconstance du coeur des hommes et des femmes. Sans être la meilleure relecture d'un classique signée Poissant, On ne badine pas avec l'amour va sûrement atteindre son public.

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On ne badine pas avec l'amour. D'Alfred de Musset. Mise en scène de Claude Poissant. Au Théâtre Denise-Pelletier jusqu'au 24 octobre.