Le chanteur français Pierre Perret fête mercredi ses 80 ans à l'Olympia à Paris, là où en 1964, il avait été ovationné par une salle de blousons noirs venus pour les Rolling Stones. Mais cet amoureux des mots «ne veut pas entendre parler de retraite.

«Le concept ne mérite même pas une chanson!», lance cet épicurien prosélyte.

Trousseur de calembours et fervent opposant au racisme et à l'intolérance, «l'ami Pierrot», comme on le surnomme, «ne regarde jamais dans le rétroviseur».

«J'approche 500 chansons et près de 50 albums. Je n'ai rien dans mes tiroirs, mais tout dans ma tête. J'ai toujours envie d'écrire», assure-t-il à l'AFP.

Du Tord-boyaux au Zizi, en passant par Les jolies colonies de vacances ou La cage aux oiseaux, ses plus grands succès sont devenus des classiques, repris par toutes les générations. Rien de tel pour réjouir l'enfant du Sud-Ouest qui n'en revient toujours pas d'être aussi célèbre et aimé.

«Je n'ai jamais imaginé un tel succès. Très vite, la notoriété m'est tombée dessus. Je n'ai jamais été à la mode. Donc, je n'ai jamais été démodé! Même devant un public qui a moins de trente ans, tout le monde connait mes chansons, comme dans toutes les couches de la société», s'étonne encore celui qui sera fait Commandeur des arts et des lettres le jour de son anniversaire. «Qu'une trentaine d'écoles, des places, des rues, des médiathèques portent mon nom, c'est surréaliste!».

Ce qui réjouit le plus Pierre Perret est de savoir que ses chansons sont souvent au programme des écoles, surtout les plus engagées, comme Lily, contre le racisme: «être présent dans la culture des enfants, c'est au dessus de tout. C'est magique!», dit-il en écarquillant les yeux.

«Je chante juste, c'est tout»

De toutes ses récompenses et disques d'or, Pierre Perret préfère de très loin les deux prix de la Licra (Ligue contre le racisme et l'antisémitisme): «Je ne suis sans doute qu'une goutte d'eau dans le combat, mais de goutte d'eau en goutte d'eau, ça peut remplir une rivière».

En France comme en Europe, la progression de l'extrême droite «(le) terrifie»: «Je me battrai toujours contre ça, tant que j'aurais du souffle. Je déplore que les gens (NDLR: les électeurs du Front national) prennent ça à la légère, qu'ils ne se rendent pas compte de l'engrenage dans lequel ils ont mis un pied. ils ne savent pas qu'on peut les tirer par la jambe, et les avaler tout crû, comme le pays entier».

«Mon crédo, c'est la liberté du stylo, au détriment des bien-pensants. C'est ma fierté», estime le chanteur, devenu indépendant très tôt en créant sa maison de disques. «Je suis plus auteur qu'artiste. Je n'ai jamais été chanteur. Je chante juste, c'est tout!»

L'heure n'étant pas à la retraite, Pierre Perret rêve à 80 ans de monter une comédie musicale. Dans le plus grand secret, il a déjà rédigé le livret et les musiques. «Vous êtes les premiers à qui j'en parle», dit-il.

Grand aîné de la chanson française, Pierre Perret regrette «le manque de savoir et de culture» chez certains jeunes chanteurs.

«Quand on veut écrire une bonne chanson, il vaut mieux avoir quelques réserves dans la tête. Quand, adolescent, j'ai pris conscience du vide sidéral qui était le mien, j'ai beaucoup lu et j'ai découvert tout, pèle-mêle, de façon anarchique», raconte-t-il. «On n'avance pas par le piston!».