Le ton a monté d'un cran cette semaine entre la Guilde des musiciens et musiciennes du Québec (GMMQ) et l'American Federation of Musicians (AFM). Cette dernière menace de placer l'organisation québécoise sous tutelle si elle ne respecte pas les règles qui encadrent le référendum de désaffiliation qu'elle tiendra au début de juin.

La Guilde québécoise, qui fait partie de l'AFM depuis 1897, veut s'en désaffilier afin de négocier elle-même avec les producteurs qui font des affaires dans la province. Actuellement, ces ententes seraient élaborées « à New York », déplore le président de la GMMQ, Luc Fortin. Une situation qui empêcherait de bien représenter le caractère unique du marché québécois.

L'AFM a envoyé une mise en demeure à la Guilde, la sommant de respecter les règles qui encadrent les référendums, notamment l'obligation que ce dernier soit consultatif et non décisionnel. Une « campagne de peur qui frôle l'intimidation », dénonce M. Fortin, dont l'organisation syndicale représente 3300 membres.

« On nous somme de nous conformer à leurs règles. Même si une majorité de nos membres souhaitent la désaffiliation, c'est l'AFM qui aurait le dernier mot. Et au final, elle pourrait saisir tous nos biens, pour qu'on reparte à zéro  », déplore-t-il vigoureusement.

L'AFM réplique

Selon l'AFM, alors que le marché de la musique se transforme et devient « plus mondialisé », les musiciens québécois ne devraient pas quitter une fédération syndicale qui négocie des ententes ailleurs au Canada et aux États-Unis.

« S'ils veulent se désaffilier, ils doivent suivre leurs propres règles et les règlements de l'AFM. Le référendum doit d'abord être consultatif. Si une majorité des membres se prononce pour une désaffiliation, la Guilde doit les convoquer en assemblée, environ 15 jours plus tard. Ensuite, elle doit obtenir l'appui des deux tiers «, explique Alan Willaert, vice-président de l'AFM pour le Canada.

« Si toutes les procédures menant à cette assemblée de désaffiliation sont suivies et si les deux tiers des membres votent en faveur d'un départ de l'AFM, la Guilde devra demander la désaffiliation au comité exécutif international. Si tout a été fait dans l'ordre, il n'y a aucune raison que ce comité refuse une telle demande », ajoute-t-il.

Si la GMMQ ne s'oppose pas à une telle procédure, elle ne s'y sent pas liée. « Je serais inconfortable si une assemblée générale où 50 membres se sont présentés renversait le choix exprimé par environ 2000 membres en référendum. L'AFM a peut-être raison que c'est techniquement ce qu'il faut faire, mais je ne pense pas que nous devions moralement suivre cette procédure », réplique le président de la Guilde, Luc Fortin.

Une entente à portée de main

Le point de rupture pourrait ainsi être imminent. Pourtant, il y a quelques semaines, une entente était à portée de main.

Chaque année, la Guilde remet 325 000 $ en cotisations syndicales à l'AFM. Selon elle, récupérer cette somme lui permettrait d'augmenter sa présence sur le terrain et d'embaucher du personnel pour négocier des ententes.

Pour régler la crise, l'AFM a tenté de couper la poire en deux, soutient le vice-président du syndicat, Alan Willaert. Il a proposé à la GMMQ de lui redonner annuellement 170 000 $ des cotisations syndicales qu'elle lui envoie et d'être partenaire dans les ententes qu'elle négocie au Québec.

Toutefois, la Guilde québécoise a aussi exigé d'obtenir le droit de négocier ses propres ententes avec des producteurs du reste du Canada et des États-Unis qui feraient des affaires au Québec. Cette demande n'a pas été acceptée.

Le référendum marquant la première étape vers une désaffiliation de la Guilde des musiciens et musiciennes du Québec de l'AFM aura lieu du 2 au 8 juin.