La définition d'oothèque, selon le Larousse: «Coque dans laquelle sont enfermés les oeufs des insectes dictyoptères et orthoptères.»

Oothèque, c'est également le nom du projet - ou du moins le fruit d'une démarche artistique arrêtée dans le temps - de Francis Mineau, alias le batteur de Malajube. Pour lui, «l'album d'Oothèque est une équation musicale constituée de particules colorées». La rencontre possible de références pêle-mêle, du SEGA Genesis à Madame Bovary en passant par les Beatles et «Jodie Foster sans t-shirt».

«C'est un hasard, tout ça», lance Francis Mineau, assis sur un banc de parc du Mile End. «Avant que Malajube décide de prendre une pause, j'avais commencé à travailler sur des démos assez poussés de chaque chanson.»

Le public connaît Francis Mineau comme batteur, mais voilà l'homme-orchestre multi-instrumentiste. Avec Oothèque, Mineau s'est toutefois caché comme auteur-compositeur en évitant les textes directs et personnels au «je». Le but: «Préserver une distance avec le réel.»

«Cela m'intéresse rarement quand l'auteur est le personnage et qu'il raconte son quotidien, explique-t-il. Mon je est extérieur. C'est tout de moi, mais ce n'est rien de moi en même temps. [...] Je ne voulais pas me présenter comme un chanteur qui sort son disque.»

Sans plan, Francis Mineau s'est lancé le «défi de faire tout son album», ou presque. En cours de route, Francis Mineau ne ressentait pas le besoin d'avoir de la rétroaction. C'est seulement en fin de parcours qu'il a confié l'enregistrement d'Oothèque à Pascal Shefteshy (Peter Peter, Fanny Bloom, Rufus Wainwright).

«J'ai proposé l'album à Bonsound [son label] lorsqu'il était fini», souligne-t-il.

Jouer sur les contrastes

Dans les instrumentations et les textes des paroles d'Oothèque, Mineau s'est plu à exposer la dualité entre «le synthétique et l'organique», «la nature et la culture», «le rock et la chanson» et «les hommes et les femmes».

Si les chansons explorent de nombreux horizons, elles empruntent des chemins mélodiques faciles à suivre. «La musique actuelle me parle beaucoup, mais en matière de chansons, il n'y a rien qui bat Tears for Fears! lance Francis Mineau. J'ai une facilité à comprendre le langage pop. C'est ce qui me touche et me remue le plus. Ça se reflète dans ce que je fais. Je voudrais faire la meilleure toune pop au monde... En même temps, je n'arrive pas toujours à un résultat pop, car je ne suis pas maître de ce que je fais.»

Pour Francis Mineau, la création est synonyme «de ne pas être totalement en contrôle». «J'ai appris à être conscient de mon inconscient, dit-il. Dans la création, les mystères sont insondables... comme la voix du Seigneur!» En d'autres mots, «se tromper d'accord en composant est peut-être mieux pour une chanson».

En entrevue, Francis Mineau est une sorte de philosophe et psychologue de la création musicale. Des chansons comme Robothérapie (au refrain grunge irrésistible) et Secrétaire (ballade au piano qui explose à mi-chemin) sont inspirées du cours Psychanalyse et littérature que Francis Mineau a suivi à l'université dans le cadre de ses études en littérature française. «On a analysé Freud, Georges Bataille, Nerval...», énumère-t-il.

Au propre comme au figuré, Oothèque est à l'image de l'être curieux et intéressé à tout qu'est Francis Mineau. En voyageant de Kuala Lumpur jusqu'aux ravages d'une amoureuse «lycanthrope», l'auditeur doit tirer ses propres conclusions. L'album amalgame plusieurs inspirations différentes... plusieurs oeufs réunis dans une coque, pour reprendre la définition du Larousse.

Pour les spectacles d'Oothèque, Francis Mineau prévoit jouer de la guitare. Programmé dans plusieurs festivals cet été, il ne souhaite pas nécessairement une longue vie de scène à Oothèque. «Je me sens libre dans ce projet-là. Je n'ai pas signé mon testament. J'ai juste voulu faire un album moi-même sans avoir de plan.»

Anxieux ou relax, Francis Mineau? «Anxieux!», lance-t-il. Et pourtant...

ROCK

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