En plus d'une apparition au lancement de Pierre Lapointe et d'une performance dans le cadre de la Nuit blanche, Albin de la Simone a profité de son séjour au Québec pour présenter son nouveau disque, Un homme. Ses chansons racontent des histoires de gars, sans les gros bras.

Avant de s'afficher au micro, Albin de la Simone cumulait les seconds rôles auprès de têtes d'affiche respectées. Il a en effet accompagné pendant des années des artistes tels Salif Keita, Souchon et Arthur H. C'est avec ceux qu'il accompagnait sur scène, aux claviers, qu'il a fait ses premières visites au Québec il y a 20 ans. Puis, au tournant de l'an 2000, il prend les devants: il se met à écrire.

«Je chante et je compose des chansons parce que j'écris des textes. C'est à partir de ces textes que je deviens chanteur», établit-il. Albin de la Simone continue à collaborer avec d'autres artistes, notamment Vanessa Paradis, Keren Ann, Jérôme Minière et Pierre Lapointe (il était du concert-lancement de l'album Punkt), mais, lorsqu'il monte sur scène, c'est désormais pour porter ses propres mots.

Sur son plus récent disque, Un homme, il aborde un sujet plus délicat et complexe qu'il n'y paraît: la condition masculine. La sienne, bien sûr, mais pas seulement. Et il le fait d'une plume raffinée, jamais tape-à-l'oeil, même si elle apprécie les formules imagées et précises jusque dans les ellipses.

«Ce n'est qu'après coup que j'ai réalisé que, sur les 11 chansons que j'avais écrites, 10 évoquaient d'une façon ou d'une autre le fait d'être un homme», soutient Albin de la Simone. L'artiste insiste: il n'a pas réfléchi à la condition masculine en général au moment d'écrire ses textes. «C'est une expression artistique, ce n'est pas un travail sociologique», dit-il.

L'effet demeure le même: en 10 morceaux soigneusement arrangés et portés le plus souvent par des guitares électriques tamisées, de l'orgue ou des claviers chaloupés et un peu de cordes lyriques, il fait le portrait d'hommes fragilisés, à des kilomètres des beaufs niais, des hommes mous ou des machos souvent dépeints dans les publicités. Sans apitoiement et sans non plus s'empêcher de rigoler un peu.

Mes épaules, qui ouvre l'album, dit sur une mélodie accrocheuse les doutes de l'homme face au poids des responsabilités familiales. «Je voulais qu'elle raconte exactement ce que je ressens», révèle l'auteur-compositeur. D'autres sont des constructions fictives. Comme Tu vas rire, où un homme raconte ses aventures passées à la femme qu'il s'apprête à épouser... L'inquiétude point derrière l'humour caustique.

Le droit à la complexité

«L'écriture de chanson est un travail de précision, insiste Albin de la Simone, qui dit utiliser l'humour avec beaucoup de circonspection. Un mot peut avoir un effet sur la perception du texte en entier. Si on change un mot au début, il faut parfois en changer un à la fin pour garder l'équilibre. C'est d'une complexité folle, mais passionnante.»

Un homme se trouve à des lieues du Cali époque Menteur, teinté par le discours masculiniste. Albin de la Simone ne revendique rien, sauf le droit à la nuance et à la complexité. Sans surprise, ses chansons sont douces, bien qu'elles misent sur des arrangements plus étoffés qu'auparavant.

Il croit avoir trouvé le point d'équilibre pour mettre en valeur sa musique, ses mots et sa voix. «Ma voix ne peut pas faire beaucoup comparativement à d'autres voix ou à des instruments, convient-il. Là où s'arrêtent les possibilités de ma voix commencent celles de la musique.»