Thee Silver Mt. Zion Memorial Orchestra (SMZ), groupe rejeton de Godspeed You Black Emperor!, lancera la semaine prochaine son sixième disque, Kollaps Tradixionales. Un disque fait avec trois membres en moins, et un peu plus d'espoir.

«Pourquoi êtes-vous anarchistes? Les "internets" disent que vous l'êtes, et ils disent aussi que l'anarchisme est naïf, alors l'êtes-vous aussi? Et si oui, pourquoi êtes-vous naïfs? Est-ce quelque chose de punk? Comme "Johnny Rodden"?»

Visiblement, SMZ se bidonne et se défoule dans la section «questions fréquemment posées» - que nous traduisons librement - de son site internet. On y lit une longue litanie de questions prévisibles. Certaines parlent de «post-rock», terme honni par le groupe. D'autres parlent de musique juive. Il n'y a pas de réponse.

On le devine, SMZ ne raffole pas des interviews. Son chanteur et guitariste Efrim Menuck accepte quand même de nous parler, mais au téléphone. «Le premier texte écrit pour ce disque était pas mal conceptuel, raconte-t-il d'un ton affable. La chanson devait s'appeler A Minor Major. Elle parlait de l'Allemagne entre les deux guerres et de sa culture de débauche, artistiquement et culturellement. Mais l'histoire n'allait nulle part. J'ai tout jeté à la poubelle.»

La deuxième version est devenue There Is a Light. La chanson se veut le contrepoids du titre, Kollaps Tradixionales, une allusion à la crise économique. Comme disait Leonard Cohen, c'est à travers les «craques» que la lumière se faufile.

«Est-ce que notre nouveau disque est plus optimiste? Je ne sais pas, répond Menuck. Nos textes véhiculent encore la même idée: le monde moderne est cruel et injuste, mais des gens réussissent malgré tout à y accomplir des choses remarquables. Face au désespoir, la seule réaction sensée est l'espoir obstiné.»

SMZ joue désormais en formation réduite. Trois membres ont quitté le groupe – le multi-instrumentiste Ian Llavasky, la violoncelliste Becky Foon et le batteur Eric Craven, remplacé par David Payant. Menuck est désormais le seul guitariste. Le quintette est complété par deux violonistes et un bassiste.

À part There Is a Light et I Built Myself a Metal Bird, toutes les nouvelles chansons ont été composées par cette formation réduite.

Le résultat est moins orageux que le disque précédent, 13 Blues for Thirteen Moons. Mais il n'est quand même pas languide. La guitare tonne encore et les cordes s'envolent dans de lents crescendos avant de s'écrouler, comme le monde que Menuck semble parfois porter sur ses épaules. «On est encore bien assez bruyant», dit-il. 

Quelque chose de punk

«Dance You Motherfuckers», crient en choeur Menuck et ses comparses dans I Built Myself a Metal Bird. «Il y a quelque chose de très punk-rock dans notre approche, explique Menuck. J'ai grandi avec le punk et le hardcore. Un groupe comme The Clash est encore peut-être mon préféré. Le punk-rock reste ma référence pour tout. J'en conserve l'esprit, la volonté de transformer le négatif en positif. Mais j'ai presque 40 ans, alors mon approche se raffine.»

Ce raffinement, on l'entend dans les textures sonores de SMZ. Elles proviennent en partie des murs de vieux amplis qu'on voit en concert. «Oui, nos amplis façonnent en partie notre son, confirme Menuck, qui vient de briser un fidèle ampli allemand datant des années 60. Les vieux circuits d'amplificateurs créent un type unique de distorsion. Ce n'est pas un son plus authentique ou plus honnête. Il est beau, c'est tout.»

Même si SMZ évolue dans le champ gauche de la pop, Menuck récuse l'étiquette d'avant-garde. «Pour nous, la musique résulte d'une longue chaîne de créateurs. On n'invente rien de si spécial, on reprend à partir de ce qui a déjà été fait en punk-rock, en folk et dans d'autres musiques. On veut s'inscrire dans cette chaîne, c'est tout.»