Quand Roy E. Link et son groupe ont voulu présenter des spectacles à l'étage supérieur d'un stationnement du centre-ville de Medicine Hat, les autorités municipales ont craint pour la sécurité du public. «Ils avaient peur que les gens, rendus fous par la musique, se lancent dans le vide», raconte, en souriant, M. Link qui est à Montréal pendant toute la durée du Festival. Et qui compte parmi les premiers habitués du Balmoral, le bistro de la Maison du jazz.

C'était en 1996. La direction du nouveau Medicine Hat Jazz Festival avait placé du personnel de sécurité aux 10 pieds autour de la «parkade» et les concerts avaient eu lieu sans problème. Comme c'est le cas depuis 13 ans dans cette ville de 60 000 habitants (les «Hatters») du sud-ouest de l'Alberta, une province qui présente trois festivals de jazz pratiquement en même temps.

Lorraine Desmarais et Yannick Rieu étaient au 30e Calgary JazzFest qui s'est tenu du 22 au 28 juin, avec le Monterey Quartet (Holland, Rubalcaba, Potter, Harland) et l'hommage Remembering Miles Davis' Kind of Blue en tête d'affiche. L'Edmonton Jazz Festival, le plus gros, s'est terminé dimanche et la petite Nikki Yanofski (elle «fait» la Place des festivals samedi) a chanté vendredi dernier dans ce festival qu'avait ouvert Branford Marsalis.

Medicine Hat, c'est autre chose: pas de grandes vedettes, une demi-douzaine de spectacles par jour pendant 10 jours. Cette année, le passeport coûtait 139 $ et donnait entre autres accès aux concerts de Joel Miller, de Jean-Pierre Zanella et d'Amanda Tosoff. S'il y a des problèmes, on appelle le maire; il s'appelle Norm Boucher...

Roy Link est fier du petit festival que les «Hatters» apprécient mais pour lui, Montréal, c'est le top: «Toute cette musique, c'est incroyable!» Plusieurs raisons amènent l'avocat ici. Le jazz d'abord, puis le fait que ses deux enfants étudient ici (à McGill et à Concordia). Cette année, toutefois, Roy est en «mission commandée». Le pianiste Michael Keashammer a joué à Medicine Hat il y a trois semaines et une spectatrice, qui a beaucoup aimé le pianiste et son jeu, a confié à l'avocat une lettre qu'il va remettre à son destinataire, ce soir à l'Astral.

Froid, le jazz?

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«Je ne sais pas à quoi je ressemble, mais je sais qui je suis.»

On dirait les vers d'une chanson, mais c'est la phrase que m'avait servie Bryan Lee quand, à sa première visite au Festival, j'avais interviewé le guitariste aveugle. C'était il y a 15 ans, jour pour jour. À Radio-Québec (devenue Télé-Québec), où le leader du house band de la Old Absinthe House de La Nouvelle-Orléans - il y jouera pendant 15 ans - enregistrait Beau et chaud, la meilleure émission de musique jamais présentée à la télévision d'ici.

Bryan Lee a aujourd'hui 66 ans, mais ne ralentit pas beaucoup. Il joue au FIJM aujourd'hui, à 21 h sur la scène Loto-Québec et en reprise à l'Astral à minuit; il ne verra pas la file d'attente, mais il va la sentir, comme le reste... Après, Sherbrooke, Saint-Hyacinthe, Toronto, New York.

À Beau et chaud - la première grande animation de télé de Normand Brathwaite -, Bryan Lee avait joué avec un groupe québécois appelé Uzeb. Le guitariste d'Uzeb s'appelait Michel Cusson et il avait tiré un solo d'enfer sur Braille Blues Daddy (voir http://www.youtube.com/watch?v=JqNltcdZRG8&feature=related).

Après cette brillante démonstration de guitare, Bryan Lee, qui entend bien, avait lancé: «Oh! Lord! Ça sonne comme du blues, ça!»