Trôner au sommet du hit-parade et être invité à Laser 33-45, c'était le summum du cool à l'époque où l'industrie du disque n'en était encore qu'à la préhistoire. De nos jours, le nec plus ultra, c'est court-circuiter l'industrie du disque et devenir célèbre grâce à sa page MySpace. Ou récolter les éloges d'un influent webzine branché tout en levant le nez sur les magazines de mononcles comme le Rolling Stone.

Internet a radicalement transformé la façon de découvrir, de consommer et de diffuser la musique, on ne peut le nier. Sauf que la tentaculaire autoroute de l'information n'a pas encore détrôné la bonne vieille télé quand il s'agit de faire connaître une chanson ou un artiste à un vaste public.

 

«Un passage à la télé continue d'être important», affirmait d'ailleurs le patron de l'étiquette Tôt ou Tard dans un récent numéro du journal français Le Monde. Vincent Frèrebeau ne produit pourtant pas des disques de nymphettes siliconées en bobettes de latex, mais des artistes comme Thomas Fersen, Yael Naim et Jeanne Cherhal. De la chanson plutôt champ gauche à vocation artistique avant d'être commerciale.

Star Académie recommence demain. Ça signifie qu'on va être assommé pendant trois mois de nouvelles insignifiantes concernant les angoisses et les rêves démesurés d'académiciens avec ou sans talent. Ça signifie qu'on va encore tenter de faire passer ce show de téléréalité pour une très sérieuse école de la chanson.

Mais ça signifie aussi qu'il y aura désormais quatre émissions consacrées à la musique au petit écran, puisque Normand Brathwaite continue de porter Belle et Bum (où la diversité est reine) et que Radio-Canada a mis en ondes deux nouveautés cette saison: M pour Musique et Studio 12, toutes deux consacrées aux prestations musicales live. Une rare bonne nouvelle pour une industrie dont on ne cesse de dire qu'elle tombe en morceaux.

Comme Tout le monde en parle, Star Académie fait vendre des disques. Les siens, bien sûr, et ceux de ses invités triés sur le volet - et rarement québécois, cette année. Belle et Bum, M pour Musique et Studio 12 aussi. Pas autant que les deux autres, mais elles jouent un rôle crucial. Si la carrière de Dany Bédar a décollé grâce à Star Académie, l'excellent bluesman Harry Manx doit sa percée québécoise en partie à ses apparitions répétées à Belle et Bum.

«Le monde qui écoute ça, ce sont par définition des fans de musique», dit Simon Fauteux, de Six Medias Marketing, parlant des émissions de Télé-Québec et Radio-Canada. «S'il y a 300 000 personnes qui regardent M pour musique, ce sont 300 000 personnes sensibles et intéressées par la musique», renchérit Élisabeth Roy, de Roy&Turner Communications (Mes aïeux, Éric Lapointe).

Il est désolant que Star Académie mette autant d'énergie à mousser la nostalgie avec Les BB, The Box et Michel Fugain. Sauf que l'émission accueillera aussi Jane Birkin et Diana Krall. Pourquoi pas Karkwa? Sais pas. Mais ce n'est pas bien grave, parce que désormais il y a aussi une place pour Karkwa à la télé, à Studio 12 (le 27 février). Et aussi pour Bïa, Caracol, Plants&Animals et même Beast!

On n'a pas vu une telle diversité musicale à la télé depuis un sacré bail. Ça donne même le goût d'être optimiste.