Germinal, création signée Antoine Defoort et Halory Goerger, est une allégorie fascinante de l'histoire du théâtre et de l'humanité. Une démonstration du pouvoir infini du rituel à traduire la complexité des rapports humains. Pour leur deuxième participation au FTA, le tandem d'artistes belges livre (encore une fois) une pièce brillante, jubilatoire. Une oeuvre qui amuse le spectateur, tout en sollicitant son intelligence, durant près de 90 minutes.

Créée au Festival d'Avignon en juillet 2013, Germinal décortique la mécanique théâtrale et expose notre besoin de communiquer pour donner un sens à nos vies. La prémisse: tout recommencer à zéro, en remontant le fil de l'histoire de la représentation, par le truchement des outils que les humains se sont donnés pour s'exprimer entre eux... faute de mieux. Ainsi, ils apprivoisent la lumière, les signes, le chant et les autres langages.

Un univers à inventer

La pièce commence dans le noir absolu. Puis, des faisceaux lumineux jaillissent sur la scène. L'éclairage augmente et l'on distingue les silhouettes des quatre interprètes (dont Defoort et Goerger). Après la lumière, les protagonistes apprendront à maîtriser les symboles, la parole, le langage, les émotions, etc.

Au fur et à mesure qu'ils découvriront de nouveaux outils - techniques ou conceptuels, concrets ou philosophiques -, ils sentiront le besoin de former des catégories et des sous-catégories, afin d'y voir plus clair. Ils finiront par construire leur propre espace dans le temps. Bien sûr, ils devront s'entendre, surmonter les obstacles et donner un sens à leur action. Ce qui nous donnera un émouvant tableau final et musical.

Un théâtre brut et inventif

La grande qualité de Germinal, c'est d'inclure constamment le public dans un processus de création à la fois simple et complexe. Dans la salle, le spectateur découvre la transformation de cet univers scénique en même temps que les créateurs sur la scène.

On a comparé ces derniers à Bouvard et Pécuchet, les personnages éponymes du roman de Flaubert. Mais leur travail fait aussi penser à celui des membres du groupe Oulipo, avec cette volonté d'injecter du désordre dans l'art, d'assumer la part de risque inhérente à la liberté d'expression.

Ce spectacle ne ressemble à rien de ce que vous avez déjà vu au théâtre. L'art d'Antoine Defoort et Halory Goerger est un mélange d'humour décalé, de philosophie jubilatoire dans une forme inédite. Un théâtre à la fois brut et inventif, amusant et intelligent, ludique et intello.

Un spectacle à voir au FTA ou, la semaine prochaine, au Carrefour à Québec.

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Les 30, 31 et 1erjuin, à la Maison Théâtre.