L'art feutré, tamisé, ombragé, ténébreux de Mélanie De Biasio avait séduit bien des gens lorsque l'album No Deal fut lancé en 2013. On avait applaudi une voix singulière au confluent du jazz et du dark ambient, au carrefour de l'électro et de la musique instrumentale.

À Montréal, deux ans plus tard, l'artiste belge avait trouvé un public fervent, on se souvient de mélodies elliptiques, d'arrangements circonspects, de climats à la fois cérébraux et sensuels. 

Au Monument-National, la flûtiste et chanteuse reprenait hier là où elle nous avait laissés, nouvel album en poche - Lilies, sorti l'an dernier chez PIAS. Elle nous invitait de nouveau à la suivre dans la pénombre, dans ses  terres embrumées. 

Bien que mieux précisé, encore mieux arrangé, le langage est de même nature, paroles et sons sont suggérées, suspendues dans l'espace pendant que s'étendent les couches texturales des sons de synthèse, les fines percussions, les touches des claviers, les pincées des guitares, les sons voilés de flûtes,  les inflexions du blues, ou les harmonies du jazz modal coltranien dont elle reprend Afro Blue, fameuse relecture par le saxophoniste d'une pièce conçue par Mongo Santamaria. Le jeu des références est ici raffiné, riche, intelligent inspiré, jamais surchargé.

Mr. Jungle is in town/ Spreading whispers all around/ Mr. Jungle like a thief/ In my shadow, feel at ease/Nor my burden nor my beast/ Move me west, move me east/ Mr. Jungle could you please/ Come in closer, sweet will be? 

Difficile de ne pas succomber à ce pouvoir hypnotique, à ces douces transes.

En première partie, la Québécoise Alexandra Stréliski poursuivait sur cette lancée pianistique que l'on a découverte avec l'album Pianoscope et dont on apprivoisait les prolongements, aussi prévus sur Inscape, album à paraître. 

Même esprit postromantique, impressionniste, post-minimaliste, une approche très prisée par ce public en voit de plonger dans le corpus classique, moderne ou contemporain. Musiques consonantes, riches harmoniquement, faciles d'accès, chargées émotionnellement... et parfois redondantes. 

Assez rapidement, on fait le tour de ce joli jardin, à moins d'en privilégier les vertus contemplatives...