Dialyse ou pas, Guy Nadon continue de faire ce qu'il a fait toute sa vie: jouer «pour le monde». Ce midi, Guy Nadon va luncher comme d'habitude à La bonne humeur, rue Bellechasse. Après, Pierre Girardeau, son protecteur, chauffeur et ami, va l'amener à l'hôpital Maisonneuve-Rosemont pour son traitement de dialyse. Et ce soir, après une petite sieste, «le roi du drum», 80 ans bientôt, va monter sur la scène de L'Astral pour sa 31e apparition au Festival de jazz de Montréal.

«Je joue encore avec les top en ville», nous disait Guy Nadon mardi, avant la deuxième et dernière répétition de l'ensemble où l'on retrouve entre autres Jean-Pierre Zanella, Ron Di Lauro et Jean Fréchette. Les meilleurs, oui, dans un combo de 10 musiciens pour qui «Ti-Guy» a écrit chacune des partitions qu'il a lui-même «recopiées au propre dans des beaux cahiers» dont Pierre Girardeau a illustré la page couverture. L'ancien chef de la Pollution des sons nous montre le cahier du «2e trompette» où est collée une photo de lui: «Ça, c'est en 55 au Beaver Café, Bleury-Sainte-Catherine, à côté de l'ancien Spectrum. J'étais jeune dans ce temps-là...» Et tout le monde voulait avoir ce drummer au talent fou qui avait refusé de se joindre à l'orchestre de Tony Dorsey parce qu'il ne parlait pas anglais.

Plus loin dans le cahier, la partition de «Souvenir for Marcelle - Composition et arrangements: Guy Nadon». «Marcelle a été ma première femme. Moi, j'ai eu cinq femmes: une fois marié, quatre fois accoté. Je suis tout seul depuis 14 ans et je suis bien...»

- Comment as-tu appris à écrire la musique?

- J'ai suivi des cours d'arrangements avec un violoniste qui s'appelait Frank Mella, un Italien. J'ai commencé tranquillement...

- Combien de pièces as-tu écrites?

- Une centaine, je dirais... Toutes sortes d'affaires: Souvenir pour Marcelle et Guy, pas la même chose que l'autre, Happy Day, Fricassée, No TPS... Je veux faire un livre avec mes compositions, mais ça vend pas...

Mis à part son concert annuel au Festival de jazz, Guy Nadon ne joue plus. Il a terminé sa carrière active il y a une dizaine d'années après avoir joué dans des noces italiennes pendant plus de 15 ans. Comment retrouve-t-il chaque année son niveau «royal» ? «Il faut que je me réchauffe plus longtemps. Tout est dans les poignets... Une fois réchauffé, je suis correct.» Tac! Tiketi-ketac! Et la dialyse? «J'ai un problème aux reins, mais depuis que je suis ces traitements-là, je me sens bien. Trois fois par semaine à l'hôpital, man! Lundi, mercredi, vendredi. Au début, ça durait trois heures; là, on a descendu à deux heures. Je suis content.»

«Le jazz, man»



Ce soir, avec son band de cracks, «Le roi du drum» - du titre du docu de Serge Giguère (1991; voir https://www.tagtele.com/videos/voir/69927) - va jouer quelques musiques de lui et certains standards qu'il joue depuis qu'il est petit gars, comme You Don't Know What Love Is, du film Keep'em Flying d'Abbott et Costello en 1941. Puis des pièces d'époques subséquentes telles All Blue de Miles Davis, Miles qu'il connaît par coeur, et Killer Joe du saxophoniste Benny Golson. «Moi, dit Guy Nadon, ma musique, c'est le jazz. Je suis capable de jouer n'importe quoi, mais ce que j'aime, c'est le jazz. Le jazz, man

Ce soir, après le show, Guy Nadon va jaser un peu avec les gars, peut-être aller manger un morceau, puis Pierre va le ramener au Chez-nous des artistes, rue Beaubien. Et ça va être la dialyse lundi-mercredi-vendredi jusqu'à l'an prochain alors que, si le ciel est bon, le concert-événement du 80e anniversaire de Guy Nadon fera partie de la programmation du 35e Festival de jazz.

Un concert avec un vrai big band. Avec «les top en ville» pour le roi du drum qui jouera toujours «pour le monde».

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Guy Nadon, ce soir 18h à L'Astral.