L'an dernier, le jury était divisé sur tout sauf sur un point: le Parc X Trio avait «quelque chose», mais n'était pas encore «là». Et le jury a fait changer les règles du Grand Prix de Jazz TD (TD depuis cette année) pour que Parc X puisse se réprésenter au concours. Et gagner le Grand Prix de Jazz TD qui leur a été remis hier avant le concert du Dave Brubeck Quartet, en clôture du 31e Festival international de jazz de Montréal.

«On se proposait de lancer notre deuxième CD en décembre», sourit Gabriel Vinuela-Pelletier, le pianiste de Parc X (comme dans Parc Extension, le quartier du nord de Montréal). «Mais fallait trouver l'argent... Là, avec 50 heures de studio, on peut se concentrer sur la musique...» Approche qu'approuvent ses collègues Alex Lefaivre (contrebasse) et Mark Nelson (batterie).

 

«Parc X Trio, c'est quatre personnes», a expliqué Michael Bourne de la revue Downbeat, le président du jury. «Il y a trois musiciens plus cette quatrième personnalité collective qui les fait jouer comme une seul unité créatrice.» Le jury a donné le Prix Étoiles Galaxie (5000$) pour la meilleure oeuvre au tromboniste Darren Sigesmund pour Dance for Leila.

Les gars de Parc X, eux, ont aussi reçu 5000$, une proposition de licence pour un disque chez Effendi, une bonne maison, 50 heures au studio Karma et des invitations pour 2011 au FIJM, à Rimouski et à Zacatecas où ils ont bien hâte de se rendre.

Pour sa part, le multi-intrumentiste Don Thompson a reçu le prix Oscar-Peterson en reconnaissance de «sa contribution au jazz canadien et la qualité de son art». M. Thompson joue du piano, de la basse et des persussions en plus d'être un «maestro» du vibraphone. Originaire de Vancouver, cette icône du jazz canadian s'est surtout fait connaître aux côtés du virtuose de la guitare jazz Sonny Greenwich et du saxo Moe Koffman (1928-2001). M. Thompson enseigne depuis longtemps au Humber College de Toronto. «Les mots me manquent... Le nom d'Oscar Peterson et mon nom sur le même trophée, je peux à peine y croire.»

Dave Brubeck avait ouvert ce marathon, hier après-midi, en acceptant des mains d'Alain Simard, président du FIJM et fan fini du pianiste, la statuette du prix spécial Miles-Davis qu'on lui remettait pour l'ensemble de sa carrière de six décennies. «Oh! it's heavy» (c'est lourd) a lancé M. Brubeck, l'oeil vif, ajoutant dans le même souffle: «Miles aussi était heavy...»

Et la salle de se bidonner avec ce monsieur généreux et attachant. «J'ai entendu une de mes vieilles pièces en arrivant ici et je me suis dit: pourquoi je ne joue pas du piano comme ça?» Et Dave Brubeck a demandé qu'on fasse rejouer Mr. Broadway, pour montrer, en battant la mesure avec sa main frêle, que sa signature à lui, c'était les superpositions de rythmes.

Dave Brubeck aura 90 ans en décembre. «Ce soir, je devrai porter une attelle», dira-t-il enfin en montrant l'annulaire de sa main gauche gonflé par une quelconque excroissance. «L'attelle glisse, je ne peux jouer comme je veux.» La voix s'étrangle et le vieillard finit par lâcher les mots qui lui barrent la gorge: «Et ça me frustre...»